Le 28 juin de l'an 58 de l'ère Shôwa. (1983)

Agression au village de Hinamizawa, district de Shishibone, dans la préfecture de ****.

La victime est l'un des survivants de la série de disparitions, Keiichi Maebara.

Vers 2h du matin, il a été grièvement blessé d'un coup de couteau à l'abdomen par le principal suspect dans l'affaire des disparitions -- Mion Sonozaki.

Réveillés par le bruit, ses parents l'ont trouvé gisant par terre et emmené à la clinique immédiatement.

Il a survécu à ses blessures.

Le coupable a pris la fuite.

Le même jour, environ à la même heure.

Chute accidentelle depuis un immeuble du quartier de Kami'isshiki, district de Shishibone, dans la préfecture de ****.

La victime est l'une des survivantes de la série de disparition, Shion Sonozaki.

Tard dans la nuit, un voisin de palier prévient le concierge car d'après les bruits et les cris, il semble évident qu'elle se dispute violemment avec une personne non-identifiée.

Le concierge ramena un double des clefs de l'appartement, mais ne put que constater que la victime était morte d'une chute du septième étage.

L'intérieur de l'appartement était sens dessus-dessous et présentait des traces de violences.

Le voisin de palier était un vieux domestique du clan des Sonozaki et a témoigné que les voix qu'il a entendues lui ont fait penser aux prises de becs entre les deux sœurs jumelles.

Il apparut évident que cet incident avait un rapport avec l'agression commise à Hinamizawa la même nuit.

Les recherches balistiques ont été poussées très loin, mais l'appartement n'a montré aucune trace d'une personne autre que la victime dans ses murs.

La victime est tombée dans la rangée d'arbres en contrebas.

Elle a eu la nuque brisée et est morte sur le coup.

Ses vêtements indiquaient les traces d'une altercation violente.

Mais son état mental très fragile et très instable laisse apparaître la possibilité d'un suicide.

L'enquête est menée très prudemment pour vérifier les deux théories.

Docteur

— ... Je vous donne cinq minutes, et pas une de plus.

Ne le brusquez surtout pas.

Ôishi

— Oui, bien sûr, ne vous en faites pas, j'ai l'habitude.

La porte s'ouvrit.

J'en étais sûr... l'inspecteur.

Ôishi

— Bonjour, M. Maebara.

Ca fait longtemps, n'est-ce pas ?

Comment allez-vous depuis notre dernière rencontre ?

Keiichi

— Les médecins disent que je récupère bien de mon opération, mais... votre présence ici risque de me faire faire une rechute.

Ôishi

— Éhhéhhéhhéhhéhhé ! Vous êtes dur avec moi...

Il me présenta un paquet de gâteaux qu'il avait sûrement acheté dans l'hôpital même.

Ôishi

— Je m'excuse, madame.

Puis-je vous demander de me laisser seul avec votre fils quelques instants ?

Ma mère tira une sacrée tronche, il était évident que ce n'était pas une perspective plaisante pour elle.

Mais je décidai d'enfoncer le clou.

Keiichi

— M'man,

c'est rien.

Laisse-nous, juste cinq minutes, tu veux ?

Ma mère me regarda, soupira, puis sortit à contrecœur de la pièce.

Une fois sortie, l'inspecteur se mit enfin à sourire en promenant son regard dans la chambre.

Ôishi

— Vous en avez de la chance, une chambre pour vous tout seul !

Ma vieille mère n'y a jamais droit, vous savez.

Après, ça a l'avantage d'être assez vivant.

Vous êtes bien vu, dites-donc.

Ôishi

Il faut dire que la gravité des blessures vous donne un certain statut par ici.

Keiichi

— M. Ôishi, vous n'avez que cinq minutes.

Si possible, j'aimerais ne plus avoir affaire à vous après cela.

Keiichi

Je vais quitter Hinamizawa. D'ailleurs c'est pour ça que je suis ici et pas là-bas à l'hôpital.

Ôishi

— Oui, il n'y a pas d'hôpital général à Okinomiya, de toute façon.

Ah, je peux m'asseoir ?

Allons-y.

J'étais hospitalisé dans un établissement célèbre dans la ville-même de Shishibone.

C'était vraiment autre chose que la campagne.

Difficile de croire que j'étais dans le même district.

Ôishi

— Vous pensez changer d'hôpital quand ?

Keiichi

— Aucune idée.

Personnellement, je partirais bien dès aujourd'hui.

À cause de cette agression, nous avions dû repousser notre déménagement.

Mais mes parents vivaient déjà dans notre nouvelle maison.

J'étais censé être transféré dans un autre hôpital, plus proche de chez nous, dès que mon état de santé le permettrait.

Keiichi

— Ne venez pas me voir là-bas,

je vous préviens.

Ôishi

— Hmmm, vous ne m'aimez vraiment pas, hein ?

Je sais que ça fait partie du métier, mais c'est dur.

Pour me faire pardonner, je vous ai ramené des tas de choses aujourd'hui.

Keiichi

— Vous savez, ce ne sont pas les gâteaux qui vont arranger les choses.

Ôishi

— Ah, mais en fait,

la boîte de gâteaux ne contient pas de gâteaux.

Regardez !

Il ouvrit la grande boîte en fer et en sortit

......

Hein ?

Ôishi

— Je ne connaissais pas vos goûts, alors j'ai pioché un peu partout dans le rayon.

Ôishi

Regardez, on dirait du photoréalisme celui-là. Celui-là est plus mignon, et celui-là est plus hardcore.

Ôishi

Ah, celui-là est peut-être plus pour les filles...

Keiichi

— Mai-mai-mais vous êtes fou ou quoi ?

J'en veux pas de vos livres de cul ! Rangez-les dans la boîte !

Ow, ow ow ow ow...!!

Ôishi

— Éhhéhhéhhéhhéhhé !

Allons, allons, vous êtes un jeune garçon en pleine santé, je suis passé par là aussi !

Ôishi

Il ne faut pas vous priver, si vous restez trop longtemps à l'hôpital vous allez finir par faire une fixation sur les femmes en uniforme d'infirmière.

Ôishi

Il n'y a pas que les infirmières dans la vie !

Ne vous limitez pas, fouinez un peu partout !

Des plus grosses, des plus maigres, des plus jeunes ou des moins jeunes... essayez un peu tout, sans préjugés !

Ôishi

Éhhéhhéhhéhhéhhéhhé !

Je lui répondis par un rire un peu gêné.

Mais je savais que cela cachait autre chose.

Il voulait me dire

quelque chose d'important, je pense.

Ôishi

— ... Ce qui est arrivé à Shion est vraiment terrible.

Keiichi

— ... ...

La nuit où Mion m'a mis ce coup de couteau,

Shion est tombée du balcon du septième étage.

La police ne ménageait aucune piste, accident et suicide entre autres, mais personnellement, j'étais sûr que c'était Mion qui avait fait le coup.

Mion avait retrouvé sa sœur et l'avait poussée dans le vide.

C'était la seule explication.

Keiichi

— ... Ce n'était pas un accident.

C'est Mion.

Sûr et certain.

Ôishi

— Les médecins-légistes disent que ça ne peut être qu'un suicide, mais je dois dire que je suis de votre avis.

Elle a poussé sa sœur et est venue tenter de vous tuer,

le tout dans la même nuit.

Keiichi

— …

Vous…

Vous avez une piste pour Mion ?

Ôishi

— Ah,

c'est exactement ce dont je voulais vous parler, en fait.

Oui.

Oui, nous l'avons retrouvée.

Keiichi

— Quoi !?

Aïe, ma blessure...

Cela me fit un drôle d'effet.

D'un côté, une certaine sécurité car maintenant, j'étais sûr que tout était fini, et de l'autre, une tristesse d'apprendre que ma meilleure amie avait été rattrapée par la police.

Et puis d'autres émotions encore.

C'était très bizarre.

Ôishi

— Mais ce n'est pas tout.

Dans le temple souterrain des Sonozaki.

Nous avons aussi trouvé le fameux puits.

Ôishi

Comme vous nous l'aviez dit, nous avons retrouvé les corps de toutes les personnes disparues au fond de ce puits.

Keiichi

— ... Oh…

je vois...

J'avais espéré que Rika et Satoko étaient encore en vie, l'absence de cadavre laissait un mince espoir,

mais maintenant…

Ôishi

— Il était vraiment bien caché.

C'était vraiment un angle mort à l'intérieur d'un autre angle mort.

Ôishi

Il y avait un grand trou, mais en fait il y avait une échelle sur le côté, tout le long. Un peu comme un tunnel vertical.

Ôishi

Il fallait prendre l'échelle, et tout en bas, il y avait un tunnel à l'horizontale, cette fois, qui continuait sur plusieurs centaines de mètres.

Ôishi

Il débouchait dans la forêt, dans un puits naturel, en pleine montagne.

Keiichi

— Je suppose que c'était une voie de secours créée par le clan des Sonozaki il y a très, très longtemps.

Ôishi

— Oui, sûrement.

Enfin, probablement construite à l'ère Meiji.

En tout cas, bravo à celui qui y a pensé, c'est impressionnant.

Keiichi

— …

Et tous les corps…

étaient au fond, alors ?

Ôishi

— Oui.

Bien plus bas que le tunnel de sortie, il y avait de l'eau croupie avec de la mélasse, un peu comme du goudron de houille.

Les corps ont été balancés là-dedans.

Ôishi

Ils sont tombés de très haut, alors ils étaient bien enfoncés.

Nous avons eu beaucoup de mal à les récupérer.

Keiichi

— ... …

Vous…

vous les avez tous trouvés, alors ?

S'il vous plaît, pas Rika... Pas Satoko...

L'inspecteur mit immédiatement fin à mes maigres espoirs.

Ôishi

— Oui,

Ôishi

ils étaient tous là.

Ôishi

D'ailleurs, nous avons même trouvé des ossements qui étaient là depuis sûrement plus de dix ans.

Ôishi

Il y en a au moins pour trois personnes dans ce que nous avons trouvé, et ce n'est que le début.

Ôishi

Les Sonozaki étaient sûrement des assassins de l'ombre par le passé.

Ôishi

Je me demande combien de cadavres on va trouver là-dedans.

Je dois avouer que j'ai un peu peur.

... Quand je pense que Mion devait vivre avec ce poids sur les épaules...

Mion

...

Ôishi

— Nous sommes en train de rechercher dans les archives de la police à Shishibone pour comparer les fichiers de certaines personnes disparues.

Ôishi

Certains collègues en plaisantent en disant qu'on risque de faire du vide dans les archives des affaires non-résolues.

Keiichi

— ...

Après un long silence, il poussa un long soupir.

Ôishi sortit une cigarette, mais au moment de l'allumer, il se souvint qu'il était à l'hôpital et la rangea dans la poche de sa veste.

Ôishi

— Ah au fait.

Je change de sujet mais…

Vous connaissiez la petite Rika Furude, n'est-ce pas ?

Keiichi

— Oui, évidemment.

C'était l'une de mes amies.

Ôishi

— Elle avait souvent des seringues sur elle ? Je veux dire, était-elle diabétique ou quelque chose de ce genre ?

???

Rika, diabétique ?

Mais de quoi il parle ?

Ôishi

— En fait, on a retrouvé des choses sur elle.

Ôishi

Dans la poche de sa jupe, elle avait une seringue.

Ôishi

Elle était cassée et l'on a pas pu identifier le contenu,

Ôishi

mais disons que ça m'a semblé bizarre, alors je pense que c'est important.

Ôishi

Vous ne voyez vraiment pas ce que ça pourrait être ?

Je n'ai jamais entendu dire qu'elle avait une seringue sur elle à l'école.

Ôishi

— Les Sonozaki…

je veux dire, les Yakuzas, pas les autres.

Ils vendent de la drogue, enfin, selon la rumeur.

Je me suis dit que c'était une possibilité.

Keiichi

— Pardon ? Rika, une droguée ? Non mais ça va pas la tête ?

Ôishi

— Ah, non, ce n'est pas ce que je voulais dire.

Ôishi

Mais vous serez d'accord pour admettre que l'on ne prend pas une seringue pour aller chercher de la sauce de soja, non ?

... Je ne comprenais plus rien.

Je me sentis mal.

J'allais vomir...

Ôishi

— Vous êtes sûr que ça va ?

Vous voulez une infirmière ?

Keiichi

— Non, c'est bon.

Continuez.

Ôishi

— Ben, c'est tout à propos de cette seringue, en fait.

Je voulais juste savoir si vous étiez au courant.

Rika...

Ôishi

— Vous savez, c'était un peu la mascotte du village.

Le village est en guerre en ce moment.

Les anciens du village en veulent beaucoup aux Sonozaki.

Ôishi

Les trois clans fondateurs sont maintenant presque éteints.

Ôishi

Si le barrage est remis sur la table, le village sera déserté.

Keiichi

— Bah, ça ne me concerne plus.

À dire vrai, j'étais très touché par cette histoire.

C'est pour ça que j'avais envie d'en finir vite.

Quelqu'un toqua à la porte.

Ma mère voulait savoir si nous en avions encore pour longtemps.

Ôishi

— Oh ?

Bah mince alors, j'aurais dû commencer plus tôt.

C'est bête, ça.

Je regardai l'horloge.

Cela faisait bien plus que cinq minutes que nous discutions.

Mais je voulais savoir la suite. Je demandai à ma mère encore un tout petit peu de temps.

Maman de Keiichi

— Hmmm,

d'accord, mais faites vite.

Je pouvais comprendre son anxiété, elle ne savait pas ce que la police me voulait, après tout.

Ôishi

— ... Je devrais peut-être revenir une autre fois.

Keiichi

— Dites, inspecteur...

Mion…

Comment va-t-elle ?

C'était la seule chose que je voulais savoir.

Ôishi

— ... Avant de vous en parler...

j'ai une question pour vous, et j'ai besoin que vous me disiez la vérité.

Keiichi

— Je vous en prie.

Ôishi

— ... Je vous préviens, répondez-moi pour de vrai.

Si vous ne dites pas la vérité, je vous jure que je vous traînerai au poste par la peau du cul s'il le faut.

Il avait l'air de ne vraiment pas vouloir plaisanter.

Mais qu'est-ce qu'il lui arrive ?

Ôishi

— M. Maebara.

D'après vous, qui a poussé Shion ?

Keiichi

— ... Honnêtement, à part Mion, je ne vois pas.

Ôishi

— Alors, qui vous a mis ce coup de couteau ?

Keiichi

— ... Je ne vais pas vous le dire cent fois ?

C'est Mion.

Mion Sonozaki.

L'inspecteur sortit un mouchoir et s'essuya la sueur du front.

Je voyais bien qu'il s'attendait à ma réponse, mais que pourtant il n'était pas satisfait.

Keiichi

— Elle a poussé sa sœur et est venue me mettre un coup de couteau.

Vous l'avez dit vous-même, tout à l'heure. C'est votre théorie, non ?

Ôishi

— C'est juste une supposition émise par le témoin.

Ôishi

Et ce témoin, c'était en réalité le garde du corps personnel de Shion Sonozaki.

Ôishi

Il était au service du clan depuis longtemps et avait eu souvent à s'occuper des deux filles.

Voilà ce qu'il a dit.

Il a dit que les cris qu'il a entendus depuis sa chambre étaient les mêmes que lorsque les sœurs se disputaient.

Mais vraiment exactement les mêmes.

Il les a entendues s'insulter et se battre.

Mais au début, il pensait que Shion devait s'être fait des idées et qu'elle avait une hallucination.

Elles étaient fréquentes, presque tous les soirs.

Mais ce soir-là, la dispute faisait rage, alors il s'est dit qu'il devrait lui administrer un sédatif.

Le temps que le concierge arrive avec un double des clefs, la dispute s'était calmée.

Mais il s'est dit qu'il valait mieux vérifier dans quel état elle était.

Il l'a appelée de l'extérieur, et c'est seulement parce qu'elle n'a pas répondu qu'il a fait ouvrir l'appartement.

Tout était en désordre, sens dessus-dessous.

Et comme il a vu le cadavre de Shion en contrebas, il s'est dit que ça ne pouvait être que Mion qui avait fait le coup.

Ôishi

— Donc en fait, il a seulement entendu des voix à travers le mur.

Et cet immeuble appartient aux Yakuzas, ils s'en servent pour leurs deals, alors il n'y a presque personne qui habite là-bas.

Ôishi

Ils sont donc les seuls à avoir entendu tout ce raffut.

Pour en venir là où je veux en venir, personne n'a vu Mion Sonozaki ce soir-là.

Keiichi

— Mais enfin... je sais pas, ça paraît évident, non ?

Ôishi

— Allons, allons, calmez-vous.

Enfin bref, du coup,

vous êtes la seule personne à avoir vu Mion Sonozaki ce soir-là.

Si Shion l'a vue, elle n'est plus vivante aujourd'hui pour nous en parler.

Keiichi

— ... Où est-ce que vous voulez en venir, inspecteur ?

Je ne comprends pas.

Ôishi fit une pause.

Il reprit ses cigarettes encore une fois.

Il prit son briquet, en alluma une,

et tira une longue bouffée.

Ôishi

— Est-ce que c'est vraiment Mion qui vous a mis ce coup de couteau ?

Keiichi

— Oui.

Absolument sûr et certain.

Ôishi

— ... ... ...

Ôishi reprit de longues bouffées.

Keiichi

— ... M. Ôishi, vous n'avez pas le droit de fumer ici.

Les infirmières vont vous engueuler.

Ôishi

— Eh bien en fait...

Mion Sonozaki aussi était au fond de ce puits.

Keiichi

— ... Hein...

Ôishi

— Elle est morte en tombant dedans.

Elle a essayé de s'enfuir par le tunnel, mais a dû rater un échelon, je ne sais pas.

Elle est tombée dans ce trou

et s'est brisé la nuque.

Eh oui,

Ôishi

comme sa sœur.

La nuque brisée.

Keiichi

— Hein ?

Mais... Comment ? Quoi ?

Ôishi

— Ce jour-là, après vous avoir rendu inconscient, Mion Sonozaki a prit la fuite.

Ôishi

Elle a voulu prendre la sortie secrète, a raté un échelon et est tombée au fond du puits, mourant sur le coup.

Ôishi

Comme si les autres victimes l'avaient aspirée là-dedans.

Keiichi

— …

Mais alors, c'est pas normal ?

Enfin, c'est pas possible, votre histoire ?

Ôishi

— Nous avons pratiqué une autopsie, M. Maebara. Elle est morte ce jour-là.

Ôishi

Le jour où nous vous avons retrouvés, Shion et vous, sains et saufs.

Ce jour-là, Mion était déjà morte.

J'en restai bouche bée.

C'est pas possible... c'est absurde.

C'est Mion qui m'a mis ce coup de couteau. J'en suis sûr et certain.

Ça ne pouvait être personne d'autre...

Keiichi

— Mais alors…

à ce moment-là…

qui est-ce qui m'a attaqué ?

Qui ?

Ôishi

— Eh bien... quelqu'un qui se faisait passer pour Mion Sonozaki, je suppose.

Je ne comprenais plus rien à cette histoire. Je n'arrivais plus à réfléchir...

Ôishi

— Vous vous souvenez de la mort de Mme Takano ?

Keiichi

— Quoi ?

Takano ?

Ah, oui, oui, bien sûr.

Keiichi

Elle a été retrouvée dans la montagne, très loin. Brûlée ?

Ôishi

— On sait qu'elle a été d'abord étranglée, puis brûlée.

Ce sont les policiers de Gifu qui ont procédé à l'autopsie.

En fait, il y a un problème aussi.

Ôishi

Le premier rapport d'autopsie indique que la mort remonte à 24h ou plus.

Mais comme cela ne coïncidait pas avec les événements, le rapport a été modifié à la hâte pour être bien en accord avec notre affaire.

J'avais déjà du mal à suivre avec Mion, alors franchement, je ne voyais pas pourquoi il continuait avec ça...

Il veut me dire quoi au juste ?

Je ne voyais pas où tous ces détails nous menaient.

Ôishi

— Mme Takano était morte depuis 24h ou plus quand on l'a trouvée là-bas. Nous avons un vieux médecin-légiste par chez nous,

Ôishi

il m'a dit que le premier rapport d'autopsie était sûrement dans le vrai.

Ôishi

Mais alors, qu'est-ce que ça veut dire pour nous, ce détail ?

Ôishi

Eh bien... Je sais que je vous ai souvent posé la question, mais,

le soir de la cérémonie,

vous avez rencontré Mme Takano, n'est-ce pas ?

Keiichi

— Oui.

Ôishi

— La veille, lors des préparatifs, vous lui avez parlé.

J'étais là, vous vous souvenez ?

Keiichi

— Oui,

je l'ai vue aussi.

Ôishi

— Mais si elle était morte 24h avant la découverte du corps...

alors cela veut dire qu'elle est morte la veille de la cérémonie.

Keiichi

— Ahahaha !

C'est pas possible, voyons...

Ôishi

— Elle était vivante pendant les préparatifs.

Ôishi

Mais lorsque vous êtes entrés dans le temple,

elle était déjà morte depuis presque 24h.

L'entrée par effraction dans le temple avait été le premier élément,

celui qui avait mis le feu aux poudres.

C'était Mme Takano

qui nous avait convaincus

d'y entrer.

Mais lorsqu'elle nous a demandé de la suivre… elle était déjà morte.

Ôishi

— Je ne sais pas pour vous, mais je trouve que ça fait beaucoup de morts-vivants pour une seule affaire.

Éhhéhhéhhéhhéhhé...

En fin de compte,

c'était un mort qui avait tout déclenché,

et un mort qui avait mis un terme à toute cette histoire.

Ôishi

— En ce moment, il y a beaucoup de pressions de ma hiérarchie pour faire modifier l'heure du décès de Mion Sonozaki.

Ôishi

Il y a beaucoup de gens qui souhaitent faire le silence sur toute cette affaire.

Alors gardez ces éléments pour vous, d'accord ?

L'inspecteur reprit sa veste du dos de la chaise, écrasa son mégot par terre et dispersa la fumée.

Ôishi

— Je m'excuse d'être resté aussi longtemps.

Ôishi

Je voulais vous en parler pour que vous puissiez faire votre deuil et passer à autre chose, mais…

je crois bien que j'ai seulement réussi à vous compliquer le tout.

Je restais silencieux, les yeux dans le vague, incapable de dire quoi que ce soit. L'inspecteur se dirigea vers la porte.

Ôishi

— Si jamais…

si jamais un jour vous voudriez m'en reparler,

je vous ai laissé ma carte dans les gâteaux.

Ôishi

Si vous voulez, je pourrai vous refaire un joli cadeau la prochaine fois !

Éhhéhhéhhéhhéhhé !

Il pense... que je lui cache encore des choses.

Mais j'ai pourtant rien à lui cacher !

C'est même le contraire,

il y a des tas de choses que je voudrais savoir !

Ôishi

— Bon, eh bien, au plaisir de vous revoir.

Faites attention à vous.

Il sortit puis ferma la porte.

J'entendis ses pas s'éloigner... et leur bruit s'estomper.

Mais je n'arrivais pas à sortir de ma torpeur.

Il croyait que ses explications me permettraient de faire mon deuil ?

Mais comment ?

Rien n'est résolu, rien n'est terminé !

L'affaire…

n'a toujours pas…

dit son dernier mot.

C'est alors qu'un bras pâle

sortit de sous mon lit.

Je ne m'étonnai pas outre mesure.

C'était une hallucination créée par la peur.

Mion

— Alors, p'tit gars ?

Je te l'avais dit, pourtant ?

Depuis sous mon lit, j'entendis une voix gutturale résonner.

Celle de Mion.

Keiichi

— De quoi, Mion ?

Tu m'avais dit quoi ?

Mion

— Je…

t'ai prévenu ce jour-là.

Mion

Même si tu devais me revoir bientôt... ne t'approche surtout pas de moi.

Je serai déjà morte.

Ce sera le démon devant toi,

contrôlant mon cadavre. Tu te souviens ?

Keiichi

— Ahahaha !

Ouais, si, tu me l'as dit.

Désolé.

J'ai pas fait attention.

C'est d'ailleurs pour ça que j'ai pris ce coup de couteau.

Ahahahaha...

Je ne sais pas si elle s'est fait ça en tombant de l'échelle,

mais elle avait plusieurs ongles à moitié arrachés.

Le bras se leva lentement, très lentement au dessus du lit, et se mit à chercher le mien.

Keiichi

— Euh…

Mion ?

Je…

je pensais à un truc…

c'est juste une idée, hein.

Tu veux bien m'écouter ?

... Mion, cachée sous mon lit, ne répondit pas.

Keiichi

— Imagine que…

que je

meure aujourd'hui. Imagine juste.

Keiichi

Sauf que demain, je serai encore là, et je ferai semblant de vivre normalement.

Keiichi

Et imagine qu'un jour l'inspecteur l'apprenne.

Et qu'il dise encore une fois que l'heure de la mort correspond pas, et tout.

Keiichi

Jamais deux sans trois, non ?

D'abord Mme Takano, et puis toi, et puis moi.

Alors ?

Ce serait marrant, non ?

Ça me ferait délirer, pas toi ?

Keiichi

Ahahahahaha !

Mion

— Kei...

Keiichi

— Bah, rigole, quoi.

Ah, tu trouves peut-être pas ça très marrant, alors ?

La main ensanglantée de Mion chercha mon poignet à tâtons et finit par le trouver.

Puis elle le serra très fort...

Keiichi

— Aïe, eh,

mais aïeuh,

tu me fais mal ! Mais arrête !

Mion

— Kei…

je suis venue te chercher, il est temps de mourir pour toi…

J'essayai de dégager mon poignet, mais elle avait une poigne phénoménale. Impossible de bouger.

En fait, mon corps entier était paralysé, c'était bizarre, elle ne me tenait qu'un seul poignet pourtant.

Je ne pouvais plus faire le moindre geste.

Elle m'ouvrit la main, chaque doigt bien séparé des autres.

Je me souvins de l'étoile de bois où elle m'avait attaché...

... ... !!!

Je sentis la pointe d'un clou sur mon auriculaire gauche.

Mion approcha son visage tout près du mien,

l'haleine fétide, le visage ensanglanté, le front écharné.

Keiichi

— Non, cette histoire n'est pas finie.

Pas du tout.

Keiichi

Il y aura encore des victimes.

Keiichi

Je le sais.

Keiichi

Je le sens.

Keiichi

Il faut que quelqu'un mette un terme à cette affaire.

Keiichi

C'est trop cruel, trop inhumain, trop... injuste.

Il faut que ça cesse.

Keiichi

C'est

la seule chose que je souhaite...

Mion

— Non, Kei. Je te l'ai dit, ce jour-là,

je ne t'accorderai qu'un seul souhait.

Maintenant, il est trop tard.

Ahahaha, hahaha,HAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHA !

Mion me tint le doigt bien en place, avec le clou bien calé juste au milieu.

Puis lentement, très lentement, elle leva son autre main, et je vis la masse monter, et monter, et monter encore, puis s'arrêter, et...