Le lendemain arriva.

Ce fut un jour très étrange, pendant lequel Mion fit tout son possible pour éviter de compliquer la situation.

Lorsque je croisais son regard, Mion se souvenait qu'elle devait faire ceci ou cela, ou bien même aller aux toilettes, et se barrait en courant.

Rena n'en pouvait plus et restait constamment avec elle.

Satoko

— Hmmm, notre chère Mion se comporte de manière bien étrange aujourd'hui.

Keiichi

— Je sais le pourquoi du comment, mais... je ne sais pas trop comment vous l'expliquer.

Rika

— Les filles, c'est compliqué. Parfois elles sont instables.

Laissez-la tranquille, c'est le plus efficace.

Tiens ?

On dirait que Rena m'appelle depuis le couloir.

Qu'est-ce qu'elle peut bien me vouloir ?

Rena

— Keiichi, viens par ici.

Keiichi

— Quoi ? Qu'est-ce que tu veux ?

C'est un secret ?

Rena

— Hmmm…

eh bien…

ça ne s'est pas super bien passé, hier, on dirait.

Ahaha, aha, aaa, ahem.

Keiichi

— Hmm, mouais, c'est le moins qu'on puisse dire.

Rena

— Mii a l'air sacrément mal en point, mais je crois que j'ai réussi à recoller quelques gros morceaux.

Keiichi

— Franchement, chapeau.

Comment t'as fait ?

Rena

— Oh, ben en fait, c'est comme pour la télé.

Tu frappes bien comme ça, tout fort, à 45° ! Tiens ! Prends ça ! Sale tas de boulons !

Elle leva la main devant elle, montrant le tranchant, puis l'abattit droit devant elle.

À vrai dire, j'avais du mal à voir si c'était une blague ou si ç'avait vraiment marché...

Rena

— Elle devrait s'en être remise demain.

Mais j'ai un petit service à te demander.

Keiichi

— Écoute, je l'ai pas fait exprès, mais c'est ma faute, alors j'aimerais pouvoir faire quelque chose.

Tu peux me demander ce que tu veux.

Rena

— Merci.

Je pense que Mii va faire comme si les derniers jours ne s'étaient jamais passés.

Comment ça, elle va simplement nier les faits ?

... Je vois, ouais, c'est une manière de fuir les problèmes comme une autre.

Rena

— Enfin bref.

Essaie de faire la même chose.

Je pense que comme ça, tout rentrera dans l'ordre.

Keiichi

— Mais... t'es sûre que c'est si facile que ça ?

Rena

— Écoute, sois gentil, laisse-la tranquille jusqu'à ce qu'elle ait réussi à encaisser le choc, d'accord ?

Keiichi

— Hmmm…

...

OK.

Je n'avais rien à me reprocher, mais je sentais quand même que quelque part, c'était ma faute.

Celle qui devrait avoir honte, c'est Shion ! Elle savait tout depuis le début elle a joué la comédie !

Mouais, mais elle a jamais essayé de me faire croire qu'elle était Mion.

Ah, merde...

J'ai envie de taper sur quelque chose, mais sur quoi ?

Me voyant en train de tourner comme un lion en cage, ne sachant pas quoi faire de mes nerfs, Rena se mit à rire.

Rena

— Enfin, j'espère que tu auras au moins remarqué…

Mion aussi sait être mignonne quand elle veut.

Me dit-elle, cheveux au vent, d'une voix douce et sereine.

Keiichi

— Ouais...

En tout cas, c'est pas une fille chiante.

Rena

— Tant mieux, alors.

Elle se mit sur la pointe des pieds et s'étira.

Rena

— Si tu as remarqué, alors ces derniers jours n'auront pas été en vain. Tu verras, dans quelques semaines, on pourra en rire.

Je regardai le ciel, puis m'étirai moi aussi.

L'azur limpide s'étendait à perte de vue.

Rena

— Aujourd'hui, pas de club ni rien d'autre pour remplacer.

Désolée pour toi, Keiichi,

mais aujourd'hui, tu devras rentrer tout seul…

d'accord ?

S'il suffisait vraiment pour moi de les laisser tranquilles une journée pour tout réparer entre nous, alors j'étais partant, c'était bien peu de choses, finalement.

Keiichi

— OK, entendu.

... Comme je peux pas lui dire, j'en profite pour te le dire à toi, mais...

Je tiens à m'excuser pour toute cette histoire, c'est pas... c'est... enfin, désolé, quoi.

Rena

— Hmmmouiiii, pourquoi pas.

Après tout, c'est bien à cause d'un de tes commentaires que tout cela a commencé.

J'espère que ça te servira de leçon et que tu apprendras à faire preuve d'un peu plus de tact désormais ?

Keiichi

— Ouaiiiis, ouais, c'est bon, je vais faire un effort.

Ce fut le jour le plus court de toute ma vie.

Apparemment, Rena passa tout son temps à parler à Mion.

Elles avaient l'air de bien s'amuser, et j'aurais vraiment voulu aller leur parler, mais j'avais promis de ne pas le faire.

Mion aussi avait l'air de faire des efforts, pour ne pas faire attention à moi.

Alors j'en fis de même. Ce fut très difficile.

À midi, je mangeai tout seul, pour la première fois depuis des semaines.

Mion mangea avec Rena.

Alors que je poussai un soupir dépité, Rika fut soudain derrière moi et me caressa lentement la tête en souriant.

Rika

— Eh bien alors, vous avez appris beaucoup de choses sur la vie, on dirait.

Je ne pensais pas qu'elle dirait un truc pareil.

En même temps, ça sonnait comme si j'avais eu mon premier chagrin d'amour, je n'aimais pas ça.

J'espère que la maîtresse ne va pas s'y mettre aussi...

Rika

— Allons, allons, je suis sûre que vous deviendrez un adulte formidable.

Allez, encore une caresse pour la route.

Keiichi

— Mouais...

Et toi qui bûches tout le temps, tu deviendras quoi alors, wonder woman ?

Rika

— Je l'espère bien.

Quand je serai adulte, tout le monde m'adulera.

Satoko

— Oh, mais vous savez, lorsque je serai adulte, tout le monde m'admirera aussi !

Keiichi

— Dis pas de bêtises, tu resteras toujours une gamine. Je parie ma main au feu.

Satoko

— Mais, mais, mais comment osez-vous !

Satoko pointa l'index en l'air, et aussitôt une bassine vide me tomba sur le coin du crâne.

Keiichi

— Aïeuh, eh, ça fait mal !

Viens par ici, SatokooooooooOooo !!!!

Je lui chopai les joues et tirai légèrement dessus,

lui mettant parfois de petites baffes rapides et indolores de tous les côtés de la tête.

Finalement, ce jour-là, la vie m'apprit une grande leçon : c'était très important d'avoir des amis.