Les dés du destin étaient jetés.

Nous avions pourtant fait attention à ne pas appeler les services sociaux à la légère…

et elle l'avait fait comme ça, sur un coup de tête.

Est-ce que c'était ma faute, pour m'être laissé emporter par mes émotions ?

J'aurais peut-être dû laisser Mion parler. Elle était plus calme, même si elle était restée d'un silence buté.

Je me souvins de ce que Satoko m'avait dit lors du gage avec le curry. Elle avait dit de les laisser parler, sinon moi et mes gros sabots pouvions faire de gros dégâts.

Elle avait peut-être eu raison.

J'aurais peut-être dû rester silencieux, la tête baissée, au lieu de donner mon avis en toute franchise.

Mais il ne servait à rien de s'en plaindre maintenant.

Les dés ne reviendront plus dans le gobelet.

Tout ce qu'il nous restait à faire, c'était de prier pour avoir un gros nombre.

Rena

— Keiichi, tu as fait tout ce que tu pouvais faire.

Maintenant, il est temps de laisser les adultes faire ce qu'ils ont à faire.

D'accord ?

Keiichi

— Tout ce que je pouvais faire, t'es sûre de ça ?

Si vraiment j'avais fait ça, Satoko serait dans une cabane secrète en ce moment, en sécurité.

Keiichi

C'est justement parce que je n'ai pas fait tout ce qui était en mon pouvoir qu'on en est là.

Rena

— ... Arrête d'y penser, d'accord ?

Tu es un peu trop impliqué, Keiichi.

Tu ne vas pas tenir, à ce rythme-là.

Oh, foutez-moi la paix...

Fatigué, je me mis à fixer le plafond de la salle de classe.

Je me demande si la maîtresse a vraiment compris la situation.

J'espère qu'elle fera son possible pour que les services sociaux interviennent encore aujourd'hui.

Est-ce que les maltraitances seront reconnues ? Est-ce qu'ils la prendront sous leur aile ?

Après la pause de midi, les cours reprirent, mais nous étions la plupart du temps livrés à nous-mêmes.

Parfois la maîtresse revenait, mais c'était pour mieux repartir vers la salle des professeurs pour répondre au téléphone.

Apparemment, les autres élèves n'étaient pas dupes et avaient une vague idée de ce qu'il se passait.

La maîtresse revint encore une fois depuis la salle des professeurs.

Cie

— Je suis désolée pour tous les appels téléphoniques aujourd'hui.

Je pense que ça suffira pour aujourd'hui.

Déléguée ?

Mion

— Gaaaaaarde à vous !

La maîtresse avait eu le regard sombre toute la journée.

Ce n'était pas rassurant.

En même temps,

même en admettant qu'elle ait compris à 100% ce que je voulais lui dire,

ce n'était pas elle qui prenait la décision, c'étaient les instances publiques.

Et la maîtresse le savait aussi... ce qui expliquait peut-être son air soucieux, d'ailleurs.

Mion

— Allez, p'tit gars, rentrons.

Je n'ai pas envie de jouer, je parie que toi non plus ?

Rena

— Ahahahaha.

Mii, tu sais bien qu'on ne joue pas s'il manque quelqu'un à l'appel.

Rena avait raison.

Nous ne pouvions pas jouer s'il manquait quelqu'un, ce n'était plus amusant.

Si la maîtresse avait eu l'air un peu plus rassurée, j'aurais pu aussi rentrer à la maison un peu plus calme.

... Mais là, franchement, je ne pouvais pas encore baisser ma garde.

Je ne pouvais pas prier et attendre, c'était trop naïf.

Si jamais Satoko n'était pas prise en charge par les services sociaux, si jamais ils décidaient d'attendre encore une fois,

alors il me faudra trouver un plan B.

J'ai déjà demandé aux instances compétentes officielles.

... Il me reste encore un endroit, mais nettement moins officiel. Mais ça peut valoir le coup.

... Est-ce qu'elle va se moquer de moi ?

Ou bien est-ce que je me ferai liquider parce que j'en sais trop ?

De toute façon, je devais essayer.

Keiichi

— Ah au fait, Mion ?

Je peux passer chez toi aujourd'hui ?

T'as pleins de manga, non ?

J'aimerais t'emprunter une ou deux séries complètes, je peux ?

Mion

— Hein ?

……...Ah... Ouais, pourquoi pas.

Mion avait l'air d'avoir compris que ce n'était pas vraiment ce que je voulais faire.

Je voulais lui parler en privé.

Juste elle et moi.

Rena

— Mii, Keiichi !

Allez venez, on rentre !

Rena avait déjà remis ses chaussures et nous attendait dans la cour de l'école.

La maison de Mion était... gigantesque.

Le bâtiment principal était une vieille baraque avait un toit en mains jointes, et le jardin... enfin, le terrain... enfin, la propriété, quoi, était immense.

Effectivement, je pouvais comprendre que sa famille dirigeât le village.

Mion me fit entrer dans la salle de réception, et une femme de ménage vint m'apporter un thé.

Keiichi

— Eh ben,

on voit que vous êtes riches.

Vous avez des domestiques ?

Mion

— Tu sais, il n'y a que moi et ma vieille grand-mère ici.

Je ne peux pas m'occuper de tout.

La domestique s'inclina devant nous et lui dit qu'elle prenait congé, étant donné qu'il était 17h, soit la fin de son service. Elle se retira de la pièce et nous l'entendîmes marcher à très petites foulées dans le couloir. Discrète et distinguée jusqu'au bout...

Mion

— Elle vient quelques fois par semaines pour s'occuper de mon aïeule et pour faire le ménage.

Mion

Elles sont généralement 3 ou 4 à tourner, donc il y a toujours quelqu'un à la maison, en fait.

Mion

Mais elles ne restent que jusqu'en fin d'après-midi.

Mion

Ah, sinon, nous faisons appel à ces gens lorsque nous avons des réceptions ou des dîners importants.

Je lui lançai un regard de tueur.

Puisque vous avez tellement d'argent, prenez donc Satoko chez vous, merde ! Mes pensées ne semblaient pas avoir échappé à Mion.

Mion

— ... Désolée.

Keiichi

— C'est pas grave,

je sais que c'est pas seulement un problème qui se règle à coup de biftons.

Mion

— ... Je te préviens tout de suite, nous avons les moyens, mais…

je ne dispose pas de ces sommes d'argent à ma guise. D'accord ?

Ne te méprends pas…

À croire que je la persécute.

Elle s'excuse souvent ces derniers jours.

C'était pas son genre avant, si ?

Ou bien alors, est-ce que c'est moi qui tire tout le temps une gueule de tueur en ce moment ?

Mion

— Et donc ?

Qu'est-ce que tu me veux ?

Tu voulais me parler en privé, non ?

Keiichi

— Écoute, Mion, j'ai quelque chose de très sérieux à te dire.

Je sais que je t'ai jamais embêté avec ça, alors ça risque d'être un peu soudain, mais j'aimerais que tu m'écoutes jusqu'au bout. Tu veux bien ?

Mion

— Hein ? De quoi, qu'est-ce qu'il y a ?

Keiichi

— Ah, il vaut mieux que je te laisse une porte de sortie, d'abord.

Keiichi

Même si je suis dans le vrai, je ne te demande pas de me l'avouer, d'accord ?

Keiichi

Tu peux même faire semblant de pas comprendre si tu veux.

Keiichi

Mais je veux absolument que tu m'écoutes jusqu'au bout, OK ?

Keiichi

... Il faut que je parle à Mion Sonozaki, héritière du clan ancestral des Sonozaki, clan fondateur du village des abysses des démons. C'est possible ?

Mion

— ... ... ...

Mion avait l'air de ne rien comprendre à mon charabia, mais quand j'ai dit “héritière”, elle sembla réagir.

Mion

— ... Je peux savoir où tu as appris ça ?

Keiichi

— Je... C'est pas important.

Je n'avais pas le droit de lui dire que c'était madame Takano.

Elle m'avait dit de ne jamais en parler, mais là, madame, désolé,

mais c'est pour la bonne cause.

Mion

— Je suis déjà très surprise que tu connaisses l'ancien nom du village,

mais je suppose que tu as appris pas mal de choses sur moi ?

Keiichi

— Ouais,

j'en ai appris de bonnes.

Peut-être que je fais erreur.

Mais je veux quand même que tu m'écoutes.

Et si jamais c'est vrai...

Mion

— Écoute, p'tit gars, je ne sais pas de quoi tu veux me parler,

mais je t'arrête tout de suite.

... Tu te méprends sur un paquet de choses.

Si possible, je préfèrerais ne pas t'écouter,

Mion

parce que je sais que je ne peux probablement rien faire pour toi.

... Mais bon...

si ça peut t'être utile ou si c'est le seul moyen de te rassurer...

Mais attention, hein, je t'écoute, rien de plus.

Je ne ferai rien.

Mion

Ça te va ?

Keiichi

— ... Ouais.

Apparemment, elle savait à peu près de quoi j'allais lui parler.

Et elle m'avait mis en garde, de ne pas continuer.

Ce qui était tout à fait logique.

Si mes informations étaient bonnes…

le clan des Sonozaki…

était responsable des meurtres qui avaient lieu chaque année.

Keiichi

— Tu connais l'existence…

de la malédiction de la déesse Yashiro, n'est-ce pas ?

Mion acquiesça.

Keiichi

— On ne sait pas trop ce que c'est au juste, on ne sait pas non plus pourquoi elle frappe.

Keiichi

Chaque mort est explicable séparément, mais prise avec les autres, la série de meurtres semble impossible à résoudre.

Keiichi

Mais il y a un point commun :

Keiichi

la victime est toujours un ennemi du village.

Mion

— ... Oui, il paraît.

Comme si cela ne la concernait pas...

Après tout, pourquoi pas.

Elle n'avait pas besoin d'avouer les faits.

Pour l'instant, elle pouvait se permettre d'écouter en silence.

Keiichi

— C'est après-demain, la purification du coton.

Est-ce que la prochaine victime... a déjà été choisie ?

Mion ne répondit pas.

Elle restait sans réagir.

Comme elle me l'avait dit, elle ne faisait qu'écouter.

Keiichi

— Ah, désolé,

tu m'avais dis que tu ne ferais qu'écouter, mais j'ai quand même posé la question.

Mion me regarda avec un regard un peu détaché, mais aussi comme si je lui faisais pitié à voir. En tout cas, c'était la première fois que je lisais cette expression dans ses yeux.

Elle ne répondait rien, elle avait un vague sourire et me laissait parler.

Keiichi

— Si jamais... ... Si jamais la victime, cette année,

c'est pas l'oncle de Satoko…

... y aurait moyen de changer ?

Keiichi

Je veux dire, l'année dernière, c'était sa femme ?

Keiichi

Donc ce serait pas illogique de l'avoir lui ensuite dans la liste, non ?

Mion

— Ahahahahahaha,

oui, c'est sûr que ça ferait une sorte de suite logique.

Keiichi

— Et puis d'abord, après la malédiction de l'année dernière, il est parti pendant toute une année en laissant Satoko derrière lui !

Cette année, ce sera lui, obligé, quoi !

Keiichi

La déesse lui pardonnera jamais de s'être enfui !

Mion

— ... Oui, pas bête.

S'il venait à mourir cette année, je pense que ça n'étonnerait personne.

Keiichi

— Je... J'ai entendu dire que…

que cette malédiction, en fait...

Je peux pas lui dire ça, quand même...

C'est trop dur... je ne peux pas...

Mion

— La série de meurtres à Hinamizawa

-- plus connue par le grand public sous le nom de “malédiction” -- est en fait l'œuvre du village complet, dirigé en secret par le clan des Sonozaki.

J'ai juste ?

Keiichi

— Mai-mais tu sais,

ça me dérange pas, hein !? Je me fous de savoir si tu as un rapport là-dedans,

mais juste...

Si tu as des relations avec... les gens qui font ça quoi, ben...

Keiichi

je voudrais que tu leur demandes s'ils pourraient prendre Teppei Hôjô pour cible cette année.

Je t'en supplie !

Mion

— ... ... ...Tu sais que c'est dégueulasse, ce que tu me dis depuis tout à l'heure ?

Si les Sonozaki sont derrière tout ça, ça veut automatiquement dire que c'est moi le cerveau dans l'affaire, tu sais ?

Mion

Ça veut dire que ce serait moi qui décide qui va frapper la malédiction,

qui donnerait les instructions,

que j'aurais déjà tué plusieurs personnes,

et décidé de la mort de plusieurs autres.

Mion

Tu me traîtes d'assassin, p'tit gars.

Keiichi

— … J'ai pas dis ça !!

Tu m'écoutes pas ou quoi ?

Mais justement, je te l'ai dit, j'm'en fous !

Même si c'était réellement toi la coupable, ça ne changerait rien à notre amitié !

Keiichi

Ça me dérange pas du tout, tu sais ?

Si la police te cherche, tu pourras compter sur moi !

Je te ferai un alibi, je t'aiderai à fuir s'il le faut !

T'es ma meilleure amie !

Non ?!

Mion resta un moment silencieuse.

Elle était sidérée.

Mion

— ... Ah ouais, carrément, tu m'aiderais à faire le coup ?

P'tit gars, c'est culotté ce que tu dis.

Keiichi

— Bon écoute, ne cherche pas à faire dévier le sujet !

Demande à ce que l'oncle so--

Mion

— P'tit gars, stop.

Il va falloir que je prépare à manger tout doucement, alors arrêtons-en là pour aujourd'hui, d'accord ?

Keiichi

— Mais... MION !

Je sentis les larmes couler sur mes joues.

Elles se mirent à dégoutter depuis mon menton et à tomber sur les tatamis.

Mion

— ... Je te l'ai dit dès le départ,

tu fais fausse route, p'tit gars.

La malédiction, c'est une malédiction.

Mion

Et même si ce sont probablement des humains qui sont derrière tout ça, les Sonozaki n'ont rien à voir là-dedans, et a fortiori JE n'ai rien à voir là-dedans.

Keiichi

— Ouais…

Je sais, mais...

Mion

— ... Écoute, p'tit gars, je suis de tout cœur avec toi là-dessus, mais…

rien de plus.

Même si je voulais t'aider avec ça, je ne pourrais pas.

Tu comprends ça, quand même ?

Keiichi

— ... Ouais.

Mion

— Mais je comprends tout à fait ce que tu ressens.

... Si vraiment ce que tu penses était vrai et que j'étais en mesure de décider de la prochaine victime de la malédiction,

je choisirais d'exaucer ton vœu.

Keiichi

— ... Mion !

Mion

— Mais la vérité est tout autre. Je ne suis que Mion Sonozaki.

Mion

C'est vrai qu'on raconte beaucoup de choses sur ma famille, et c'est vrai qu'on dirige un peu les choses dans le village.

Mais nous n'avons rien à voir avec les meurtres en série.

Mion

Oui, nous étions acharnés pour nous battre contre le projet de barrage, oui nous avons été violents, mais sans plus.

Nous ne sommes pas…

des meurtriers.

Keiichi

— Arrête... Dis pas ça...

Allez quoi,

même si c'est un mensonge,

tu pourrais pas faire semblant, juste maintenant, juste pour moi ?

Mion

— P'tit gars,

si t'as envie de rêver, tu peux rêver.

Je peux te dire oui et te promettre monts et merveilles et tu dormirais super bien en pensant qu'après-demain, tout serait fini.

Mion

Sauf que l'oncle de Satoko, lundi matin, il sera encore vivant. Et le jour d'après aussi. Et le jour d'après encore.

Et la semaine prochaine, et le mois prochain.

Alors prépare-toi à morfler.

Mion

Et t'avise pas de venir me voir après la purification du coton et à me faire des reproches parce qu'il n'est pas mort.

Keiichi

— ... ... ... Mion...

Elle se leva lentement, puis ferma la porte en papier de riz pour empêcher l'air frais du soir de venir nous gêner.

Mion

— ... Je suppose que c'est Miyo ?

Mion

Qui t'a raconté ces salades ?

Mion

Elle se fait des films sur ce village, cette femme.

Mion

Enfin, tant qu'elle reste dans son coin et qu'elle ne dérange personne, je préfère la laisser tranquille.

Mion

Mais je n'aime pas trop qu'elle vienne te monter la tête.

Mion

Rah là là,

ces étrangers, c'est bien tous les mêmes...

Keiichi

— Madame Takano n'a rien à voir là-dedans.

Mion

— Oui, oui,

Mion

c'est compris, c'est pas elle qui te l'a dit.

Mion

Mais ne t'inquiète pas, même si j'apprenais que c'était elle qui avait vendu la mèche, il ne lui arriverait rien.

Mion

Elle ne sera pas la victime de la malédiction,

Mion

on ne sait même pas si la malédiction va frapper cette année, c'est pas sûr, hein ?

Ce n'est qu'une suite de hasards malencontreux.

Keiichi

— ... Ben écoute, merci de m'avoir écouté.

Si vraiment tu n'as rien à voir avec ces meurtres, je me suis montré particulièrement odieux aujourd'hui,

alors je m'excuse.

Mion

— Je vois…

Merci de t'excuser…

Putain, encore heureux, merde ! Ahahahahahaha !

Mion n'avait soi-disant pas trop le temps, mais elle m'accompagna quand même jusqu'à la grande porte extérieure.

Ce soir, elle avait une réunion avec les personnes s'occupant de l'installation et des préparatifs du dimanche, et donc elle attendait de la visite.

Et pourtant, malgré ces obligations, elle m'avait écouté.

Mion

— Si vraiment les dieux existent quelque part dans les cieux,

alors ils exauceront ta prière.

Keiichi

— ... Oui, sûrement.

Désolé de t'avoir dérangée avec ça aujourd'hui.

Tu peux considérer qu'il ne s'est jamais rien passé.

Mion

— ... D'accord.

Je vais faire en sorte d'oublier ça, alors.

Keiichi

— OK. Bon alors…

À demain.

Mion

— Salut.

Finalement, tout cela n'avait pas duré bien longtemps.

Il m'était venu un truc à l'esprit pendant que je lui parlais.

Apparemment, les histoires que m'avait racontées madame Takano, c'était pas du bidon.

Si vraiment elle n'avait rien à voir là-dedans, je pense qu'elle ne m'aurait pas écouté comme elle venait de le faire.

Le fait qu'elle ne se soit pas moqué est une preuve... je pense.

J'étais tellement désespéré que je me serais raccroché à n'importe quoi.

Même si effectivement, à tête reposée, c'est une histoire de fou.

Je me suis quand même pointé chez ma meilleure amie pour l'accuser de plusieurs meurtres et pour lui dire que s'il le fallait, je pourrais l'aider pour un petit cinquième.

C'est pas rien...

Mion m'avait écouté comme un prêtre qui écoute les confessions de ses paroissiens.

Elle aurait pu s'énerver, me gueuler dessus comme un putois, me jeter dehors comme un malpropre.

Mais elle avait choisi de ne pas le faire.

Est-ce que c'était là la preuve que sa famille était bel et bien le cerveau derrière ces événements,

ou est-ce qu'elle avait simplement eu pitié de moi car elle me prenait pour un débile mental ?

Je ne savais pas trop, à dire vrai.

Mais c'était l'une des choses que je pouvais faire, en dehors de demander l'aide des services sociaux.

Une sorte d'assurance,

de plan B au cas où ils décideraient de rester dans l'expectative.

C'était vraiment une tentative désespérée de ma part, comme si je me rattachai à un roseau pour me sauver de la noyade.

La maîtresse pensait que si elle contactait les services sociaux, tout rentrerait dans l'ordre le jour-même.

Alors normalement, ça devrait être en train de se faire en ce moment-même ?

Si demain, Satoko revient à l'école, alors tout cela n'aura été qu'un mauvais rêve.

Vivement demain...

Ce soir-là fut particulièrement chaud et désagréable. Impossible de m'endormir.

Je l'avais prévenue.

Normalement, cette année, les services sociaux feraient quelque chose.

Je me demande comment Satoko va passer la nuit.

Est-ce qu'elle savoure sa délivrance ? Est-ce qu'elle sent arriver le bout du tunnel ? La fin du cauchemar ?

Sous ma couette, je joignis les mains, et me mis réellement à prier.