— Salut tout le monde !
Kei, bravo pour hier soir !
— Bravo à toi aussi,
on s'est super bien marrés !
— Merci encore pour l'ours en peluche,
Keiichi.
— Je suis content qu'il te plaise. Et alors ? Tu lui plantes des aiguilles partout ?
— Ben, bien sûr que non !
Nous étions presque en classe, rigolant encore de la soirée d'hier, lorsque soudain
je sentis une drôle de sensation à mon pied droit.
Je regardai en bas... et vis que j'avais marché dans un seau rempli d'eau.
Mon pantalon et ma chaussure étaient en plein dedans.
— Eh bien, eh bien ! Vous comptez passer la serpillière de si bon matin ? Admirable attitude !
Floutch,
floutch.
Hhhhhhh !! Tonk
— Ouiiiiiiiiiiinnnnnnnnnn !
Keeeeiiichiiii m'aaa taaaapééééé !
— Je te l'ai déjà dit, pose des pièges plus dangereux !
Rena les regardaient en transe, et Mion regardait Rena avec incrédulité.
C'était le train-train quotidien.
Personne ne manquait à l'appel. Tous les élèves avaient l'air normaux.
Les idées noires qui me taraudaient dans un coin de ma conscience s'envolèrent en clin d'œil.
— Qu'est-ce qu'il y a, Keiichi ?
Tu n'as pas assez dormi, peut-être ?
Peut-être ?
— Non, non, j'ai dormi comme un loir. Si tu veux, je peux te le refaire en cours tout à l'heure ?
— Mais t'es fou, t'as pas le droit !
Mion annonça l'arrivée de la maîtresse. Nous nous levâmes tous.
— Bonjour à tous.
Hier, c'était la fête du village.
Merci à tous ceux qui sont restés pour ranger.
Notre clique n'avait pas fait grand'chose dans cette direction, donc nous passions tous pour de sales gosses...
...De toute façon, j'ai bien l'impression que nous n'avons fait que profiter des stands.
— Bien. Comme chaque année, des journalistes viendront de loin pour faire un reportage sur la fête du village. Certains sont déjà arrivés, d'ailleurs.
D'habitude, je la laissais parler sans vraiment écouter, mais là, elle eut toute mon attention.
— Il se peut que les journalistes vous posent des questions, alors faites bien attention à bien répondre et à ne pas inventer d'histoires...
C'est bien clair ?
La classe répondit en chœur par l'affirmative.
La maîtresse ne parlait qu'à demi-mots, mais je voyais où elle voulait en venir.
Après tout, c'était la cinquième année.
Il était très propable qu'une horde de journaleux de troisième zone se fissent un malin plaisir à chercher des détails croustillants sur la malédiction.
Le village n'avait aucun avantage à retirer d'une telle publicité.
La maîtresse voulait à tout prix qu'aucun d'entre nous ne racontât de salades.
Et je faisais partie de ceux qui avaient l'intention de la fermer.
Ah là là, me voilà tout sérieux et grave pour une broutille. C'est désarmant comme naïveté...
Après les cours, il y eut un rassemblement général pour notre club.
Je pensais que Mion voudrait se tenir tranquille après le boxon que nous avions fait hier, mais non, ça ne lui serait pas venu à l'esprit.
— Bon, alors aujourd'hui... j'aimerais qu'on joue à un jeu de déduction un peu plus hardcore.
Qu'est-ce que vous en dites ?
— Ah, ça c'est un jeu étranger !
Ça a l'air intéressant...
— Les explications sont en anglais,
mais ne vous en faites pas, le principe est très facile à comprendre !
— ...Je n'ai pas l'intention de perdre, je vous préviens !
— Je n'ai jamais trop de problèmes avec ce jeu, je suis d'accord.
— Hmmm... Rena n'avait pas l'air à l'aise.
— Le but du jeu, c'est de trouver le coupable, l'arme et le lieu du crime !
Apparemment, il y avait en conséquence trois types de cartes.
Je regardai les cartes du coupable d'un peu plus près... Il y avait marqué des noms dessus. Mion... Rika ?
Eh ! Il y a même la mienne !
— Il y a aussi plusieurs cartes pour les armes, c'est assez varié !
Une hache, un couteau, du poison...
Les cartes des lieux du crime sont pas mal non plus !
Le salon, la bibliothèque, le jardin... Cool !
— Écoute bien.
Maintenant, on retire une carte de chacun des tas.
Ces cartes représentent la solution.
— Puis on prend le reste des cartes et on les distribue entre tous.
Il faut ensuite chercher à savoir quelles sont les cartes au milieu en posant des questions aux autres.
Aaaah, d'accord... Et donc les cartes que personne ne tient dans les mains sont celles du crime !
— Quand tu penses avoir la solution, tu lèves la main.
La partie se finit et nous comparerons la réponse.
— Si tu as bien trouvé, alors un point pour toi !
Mais si tu n'as pas donné la bonne réponse, alors tu auras un point de pénalité !
Quel que soit le résultat, les cartes sont redistribuées et on commence une nouvelle partie !
— Vous verrez bien, c'est en forgeant que l'on devient forgeron !
Vous allez mettre vos cellules grises à contribution, croyez-moi !
— Il faut prendre des notes, autrement c'est difficile.
— Bah, je verrai bien en jouant... Et donc, Mion ?
Le gage ?
Tous les regards se tournèrent vers elle.
— Hmmm...
Vous êtes tous peut-être encore fatigués à cause d'hier, alors on va y aller soft aujourd'hui. Celui qui perd sera le sous-fifre du gagnant !
Il devra aller courir lui acheter deux ou trois trucs. Ça vous va ?
— Un jus de fruit ou un paquet de gâteaux ?
— Tout cela paraît bien simple, aujourd'hui...
... Je n'en suis pas si sûr.
— Keiichi ? Vous semblez en douter.
— Ben...
on ne sait pas vraiment ce que l'on devra acheter...
Telle que je connais Mion, elle nous fera acheter un tube de crème contre les hémorroïdes ou bien carrément une boîte de préservatifs !
Les cartes sont mélangées... puis distribuées.
Puisque les cartes du vrai tueur n'ont pas été distribuées, toutes celles que nous tenons en main sont “innocentes”.
— OK, je commence.
Alors disons...
“Mion”,
avec “le couteau”,
dans “la bibliothèque” !
Il faut demander à la ronde si les joueurs possèdent certaines cartes.
Celui qui en possède une est obligé de le dire. (Il n'est pas forcé de dire quelle carte il possède, ce qui n'est pas la même chose !)
— Ah, j'en ai une.
— Moi aussi.
— Moi aussi...
— Ah, mais c'est très bien, ça...
Si nous avons trois joueurs qui répondent, cela veut dire qu'aucune des trois cartes ne peut faire partie de celles au milieu.
Ce n'est donc ni “Mion”, ni “le couteau”, ni “la bibliothèque”. Je note, je note...
— Bon, à moi maintenant...
“Rena”
avec “la hache”
dans “le salon” !
Ah, seulement deux réactions !
Donc l'une de ces trois propositions est la bonne ?
Quoique.
Après tout, peut-être que quelqu'un possède deux cartes parmi celles-ci !
— Bon, à ton tour, Kei. Quand tu veux !
— Ouais, bon, une seconde...
Je suis encore en train de comparer les informations.
Dis-donc, il fait chauffer la cervelle, ce jeu !
Hmmm... ça va pas être facile.
— OK ! Je sais qui c'est !
— Hein,
déjà ???
Après quelques propositions de ce genre, Mion leva la main.
— Le meurtrier, c'est “Rika” !
Elle a utilisé “le poison” dans “l'infirmerie”.
Alors ?
Mion prit les cartes qui étaient placées dans la boîte. Elle les retourna...
— Hé hé, tout juste !
— Aaaah ! Quand je pense que j'y étais presque !
Je ne savais pas si c'était le pistolet ou le poison...
— Pfff, moi, utiliser un pistolet ?
Je préfère le poison, c'est beaucoup mieux, ça vous cuisine quelqu'un en le tuant à petit feu.
De tels mots dans une bouche si innocente... Rika me fait peur parfois.
Apparemment, Satoko et Rika étaient à deux doigts de trouver la solution.
Par contre, Rena et moi...
— Keiichi, tu avais trouvé une carte ?
Moi, je n'avais pas la moindre idée de la solution...
— T'en fais pas,
j'avais aucune idée non plus.
— Eh ben alors vous deux, faut pas abandonner !
Vous allez finir derniers à ce rythme-là !
Arghh, tout mais pas ça !
Si l'on est obligés d'aller faire des courses ensemble,
je peux parier qu'elle va nous envoyer acheter des boîtes de préservatifs !
— Keiichi, on dirait que ce jeu, ce n'est pas votre fort.
— M-mais
mais non, qu-qu'est-ce qui te fait croire ça ?
Je vais te montrer ce que je sais faire ! Je suis Sherlock Maebara, moi !
— Tiens donc ? Mais quel plaisant hasard !
Je n'en aurai que plus de plaisir à vous ridiculiser en public !
Je commençais à comprendre le principe, mais j'étais toujours en retard sur les autres.
En particulier Mion. Apparemment, elle pouvait tirer des conclusions sur nos cartes selon la manière que nous avions de poser la question.
On sent bien qu'elle a une grande expérience !
Comment faire pour inverser la vapeur... Il va falloir être plus radical !
Il faut arrêter de voir par le petit bout de la lorgnette. Comment faire pour gagner...
Le plus important n'est pas de trouver le coupable... c'est de gagner.
...Ah !
Eurêka !
— Bougez pas, je vais aux toilettes, je reviens.
— Prends ton temps pour couler ton bronze !
— Mii, t'es écœurante...
Je sortis de la classe et déambulai dans le couloir.
L'air est si pur dehors...
Il n'y a que dans la classe qu'il fait lourd, à cause de nous.
D'autres élèves couraient dans la cour. Comme nous, ils ne rentraient pas tout de suite après les cours.
Je restai un petit moment ici à me rafraîchir les idées. Soudain, je vis Rena venir dans ma direction.
— Keiichi ? Tu m'as appelée, n'est-ce pas ?
— Exact.
Je lui avais fait signe du coin de l'œil en me levant.
Heureusement qu'elle avait compris.
— On n'a pas de temps à perdre, alors je vais être franc.
Tu as déjà gagné à ce jeu ?
Rena ne répondit pas tout de suite, mais finit par dire d'une voix timide :
— Euh... eh bien... non, jamais.
Pourquoi tu demandes ? Pourquoi ?
À vrai dire, je m'en doutais. Il suffisait de voir comment elle jouait... Elle n'y mettait aucun entrain.
— Tel que je suis parti... je vais perdre aussi.
Le pire, c'est que je ne vois pas trop comment m'en sortir.
— Ça veut dire que... Nous allons avoir un gage tous les deux, aujourd'hui ?
— Ouh là, on se calme, doucement, ok ? On n'a pas encore perdu non plus, hein !
Il faut juste que l'on se débrouille pour gagner !
Tous les deux !
— Mais comment ?
Je lui susurrai quelque chose à l'oreille.
*chuchote chuchote chuchote*
— QUOI ??? Mais... on a le droit de faire ça ?
— Tu as oublié le règlement ? Article numéro deux.
Il faut tout faire pour gagner.
— D'accord, j'ai compris.
En fait, l'affaire était très simple.
Au début de la partie, juste après avoir reçu les cartes, tout le monde est occupé à les vérifier et à les rayer de la liste des suspects. Du coup, personne ne regarde ce que font les autres.
Comme Rena et moi sommes assis l'un à côté de l'autre, nous pouvons en profiter pour nous montrer nos cartes.
Si on met nos cartes sur les genoux, on peut les montrer au voisin sous la table, donc on ne risque pas de se faire caler.
Nous aurons donc le double des infos des autres ! Cela devrait nous donner un avantage certain.
On posera moins de questions, donc les autres obtiendront moins d'indices.
— Avec ça, on devrait pouvoir jouer avec un sacré avantage par rapport aux autres.
— Oui... Avec ça, on pourra peut-être gagner !
Un grand sourire malicieux ornait désormais nos visages.
Si je suis Echigoya, maître secret du marché noir et de tous les trafics de la ville, alors Rena est le vice-gouverneur verreux. Hé hé hé, je suis un petit malin !
— Retournons vite en classe ! J'ai hâte de voir la surprise sur leur visage !
— Non mais ça va pas ?
Si on retourne en classe ensemble,
ils sauront tout de suite que l'on prépare un coup en douce !
— Ah, oui, c'est vrai... Mais alors, on fait comment ?
— Rentre déjà toi.
Je vais me passer un coup d'eau sur la figure, j'attends un peu et je reviens ensuite.
— OK ! J'y vais !
Rena tourna les talons et repartit aussitôt.
Elle aurait dû attendre un peu.
C'est un peu rapide pour quelqu'un qui avait une envie pressante. Si Mion flaire la supercherie, on est mal...
Bah, de toute façon elles finiront bien par comprendre. On va gagner à tous les coups à partir de maintenant.
Il suffit juste qu'elles ne s'en rendent compte seulement une fois que Rena et moi ne sommes plus les derniers.
Je dois dire,
c'est plutôt pas mal comme plan !
— Ah, tiens, Maebara ?
Tu peux venir une minute ?
Quelqu'un m'appelait... La maîtresse ?
Mais pourquoi ? Et surtout pourquoi maintenant ?
— Que se passe-t-il ? Je n'ai pas vraiment le temps, là, je...
— Il y a quelqu'un dans l'entrée qui veut te voir.
Tu veux bien aller jusqu'au portail ?
— Mais, qui ça ?
J'ai rien demandé, moi !
— Il t'attend. Allez, dépêche-toi.
Mais j'ai une bataille à gagner, moi ! Qui ça peut être, à un moment pareil ? Je dois avouer que quelque part, j'étais curieux de savoir qui c'était.
Comme je n'avais pas que cela à faire, je décidai de rencontrer cette mystérieuse personne le plus vite possible.
Le soleil de plomb inondait la cour de lumière, qui offrait un fort contraste entre les zones au soleil et les zones à l'ombre.
Au milieu de l'entrée, dans la lumière crue, se tenait un homme d'âge mûr, la cravatte desserrée, la veste sous le bras. Il avait l'air d'avoir très chaud.
— C'est vous, Maebara ?
Keiichi Maebara, c'est bien cela ?
Ce n'était pas quelqu'un de Hinamizawa, et je pouvais même affirmer que je ne l'avais jamais vu de ma vie.
Apparemment, j'ai du succès chez les adultes.
— Oui, c'est bien cela.
Et vous êtes ?
— J'ai la clim' dans la voiture, on pourrait en discuter à l'intérieur ?
Vous n'avez pas chaud ?
Sans attendre ma réponse, il se dirigea vers son véhicule.
Mais... il me prend pour un naïf ou quoi ? Il croit quand même pas que je vais monter dans la voiture d'un parfait inconnu ???
— Bah, c'est bon, là, je ne vais pas vous manger.
Venez donc !
Il ouvrit la portière arrière.
... Je n'aime pas ce genre de type, mais je voulais savoir ce qu'il me voulait.
Je savais par expérience que ce genre de combines ne finissait jamais bien, mais je décidai d'y aller quand même.
Il faisait agréablement frais dans la voiture.
Ça coûte cher, une climatisation. C'est un signe extérieur de richesse.
Enfin... en tout cas, la voiture de mon père n'en a pas.
— Si vous avez froid, dites-le, hein.
Je préfère quand il fait frais dans la voiture, personnellement, alors j'ai toujours la clim' à fond.
— Et donc, qu'est-ce que vous me voulez ?
S'il croit qu'il est le seul à pouvoir mettre un vent, il se trompe.
Il prit un agenda de la poche de sa chemise et le feuilleta, puis en sortit une photo.
Sur la photo, on pouvait voir un homme qui avait l'air complètement à la masse.
— Si vous savez quelque chose sur cet homme, j'aimerais que vous m'en parliez.
C'est qui, ce mec ?
On dirait une photo de permis, comment veux-tu reconnaître quelqu'un ?
— Il y avait votre nom marqué sur sa chemise.
Celui de certains de vos camarades de classe aussi, d'ailleurs.
— ... Quoi ?
Vous voulez dire, c'est M. Tomitake ?
Je ne reconnaissais aucune des expressions habituelles de son visage sur cette photo.
Il avait l'air à la masse... Qu'est-ce que cela pouvait-il bien vouloir dire ?
— Et cette femme ?
Je savais un peu à quoi m'attendre.
— Aah, euh.... Je ne connais pas son nom, mais elle était avec M. Tomitake l'autre soir.
Je ne connaissais pas son nom, mais je savais qu'elle habitait au village.
— Quand les avez-vous vus pour la dernière fois ?
— On a discuté ensemble le soir de la purification du coton.
Ils avaient l'air très proches.
— Vous n'avez rien remarqué de particulier ?
Dites-moi tout ce qui peut vous passer par la tête,
même le moindre détail suffira.
Je dois avouer que c'était un peu gênant d'être pressé de questions...
Je commençais à comprendre à qui j'avais affaire.
— Est-ce qu'il leur... est arrivé quelque chose ?
L'homme ne répondit pas.
Je décidai de garder le silence. Il veut jouer au con ? Nous serons deux.
Il fait sûrement partie de la police.
Mais alors, que fait-il ici ?
Pourquoi vient-il me poser des questions sur Tomitake ?
Il lui serait arrivé quelque chose ??
Et même, d'abord, pourquoi moi ?
Il y a sûrement des tas de gens qui le connaissaient mieux que moi, quand même ?
On n'entendait que le bruit agaçant de la climatisation.
Après un long silence, l'homme se décida enfin à parler.
— M. Maebara, vous n'habitez ici que depuis peu, c'est bien cela ?
Est-ce que vous...
Est-ce que quelqu'un vous a déjà parlé d'une certaine chose à propos de ...
...
la déesse Yashiro ?
J'ai bien cru que mon cœur allait défaillir.
Et comme je suis pas doué pour cacher mon jeu,
je suis sûr que l'homme en face de moi a tout compris.
— Vous n'en avez jamais entendu parler ?
Ce n'est pas grave, hein...
— Eh bien... en fait, si, un peu, vaguement.
M. Tomitake m'en a déjà parlé.
— Que vous en a-t-il dit ?
Un meurtre avec démembrement.
Un accident.
Un malaise cardiaque, un suicide.
Un lynchage.
Chaque année, il se passe un truc louche le jour de la fête de la purification du coton.
Je ne pense pas que Tomitake m'ait caché quelque chose.
Je ne vois pas ce qu'il pourrait y avoir d'autre.
Ou plutôt, je voudrais bien qu'il n'y eût rien d'autre.
— Est-ce que vous... Est-ce que vous croyez en la malédiction ?
Vous pouvez être direct, je ne m'en offusquerai pas.
— Je n'y crois pas.
Comme ça, cash.
En fait, je dis ça, mais c'est plutôt parce que je veux qu'il me rassure en me confirmant qu'effectivement, il n'y a pas raison d'y croire.
— Oh, vraiment ?
Ça tombe bien.
On voit que vous avez grandi en ville !
— Cela pose un problème si je n'y crois pas ?
Parce que là, j'ai des copains qui m'attendent, j'ai pas trop le temps.
— L'homme de la photo est mort hier soir.
Ma tête se vida de toute pensée cohérente.
Quoi ? Tomitake est quoi ? Qu'est-ce qu'il a dit ?
— Le problème étant que bien sûr, le hasard faisant bien les choses, il est mort hier.
Donc, le jour de la fête de la purification du coton.
Vous saisissez ce que cela implique, M. Maebara ?
— Euh... eh bien...
Il ne parle pas du mobile ou de la cause du décès.
Le problème, c'est la date de la mort.
Cette année encore... La malédiction de la déesse Yashiro a frappé !
— À vrai dire, la mort de M. Tomitake est encore tenue secrète.
Je pense que vous comprenez pourquoi ?
Je n'avais pas envie de comprendre.
— ...Dites-moi ce qui c'est passé.
S'il vous plaît, il faut que je sache !
— Sa mort ne peut pas être naturelle.
C'est un peu gros, même pour Hinamizawa.
Il faisait durer le suspense, mais ceci me faisait douter de moi. J'avais de moins en moins envie de savoir ce qu'il s'était passé, finalement.
Par le passé, il m'est arrivé de chercher mordicus à découvrir des choses que l'on voulait me cacher, et je l'ai souvent amèrement regretté.
Et là, j'avais le sentiment que c'était ce qui allait se passer...
— Le corps a d'abord été découvert par une voiture de police. Nous avions des équipes en place pour la sécurité, et l'une d'entre elle l'a vu sur le chemin en rentrant au commissariat.
Il était 23h55.
Le corps a été découvert près de... euh, vous voyez le chemin qui sort du village pour monter sur la nationale ?
Il y a un croisement là où commence la voie carossable. Le corps était là, dans le fossé.
C'est un chemin sans aucun éclairage.
Il faut s'y guider à la lueur de la lune, ou bien faire confiance à ses phares.
C'était sûrement le plus grand des hasards d'avoir trouvé le corps de Tomitake par un temps pareil.
Son corps ensanglanté gisait au fond du fossé.
Seule restait une mare de sang et de tripes sur la chaussée.
— Au début, on pensait qu'il avait été renversé par un chauffard et que celui-ci avait pris la fuite.
Mais l'officier qui s'est approché pour voir s'il était conscient a tout de suite vu que quelque chose clochait.
Comment dire... Eh bien, en fait, il avait la gorge tranchée.
— Vous voulez dire, il a été égorgé avec un couteau ?
— Non...
Avec des ongles.
Des ongles ???
Mais comment on égorge quelqu'un avec les ongles ??
Il faut gratter, il faut arracher la carotide, c'est un truc de dingue !
— L'autopsie a révélé qu'il s'était tranché la gorge avec ses propres ongles.
— HEIN ?? Comment, mais... Quoi ?! Mais enfin, qu'est-ce que ça veut dire ?
Cela veut dire que ce n'est pas un meurtre... mais un suicide.
Mais qu'est-ce qui a bien pu lui passer par la tête ?
Pourquoi est-ce que Tomitake se serait-il arraché lui-même la carotide ?
Il a gratté... et gratté, et gratté encore, même après s'être mis à pisser le sang...
Il s'en est même retourné un ongle...
Il faut vraiment qu'il se soit gratté comme un possédé pour en arriver là !
Et à force de se gratter,
il a fini par toucher à un truc qu'il n'aurait pas dû gratter...
et là...
Splurt
...le sang a dû gicler comme il faut.
Et puis il est tombé.
Il s'est étouffé dans son propre sang.
Il s'est avachi. Et il est mort, dans des spasmes de douleurs...
— Je pensais que cela était dû à une drogue ou à un poison, mais l'autopsie n'a rien trouvé.
Mais quand même... On ne peut penser une seule seconde que c'est un suicide !
Ce serait un comble !
... C'est du jamais vu !
C'est une mort... sordide, il n'y a pas d'autre mot.
C'est peut-être la mort la plus bizarre parmi les victimes de ces cinq années ! On pourrait vraiment croire à une malédiction !
Comme si la déesse avait voulu me prouver l'étendue de son pouvoir en choisissant de tuer Tomitake, qui précisément n'y croyait pas !
— Il y a d'autres détails qui sont très suspects.
On a constaté des sécrétions anormales, une forte activité des glandes eccrines et sudoripares, ainsi qu'une perte de cheveux, ce qui indique un état de nervosité voire d'anxiété extrême juste avant son décès.
Ben tu m'étonnes...
On ne s'arrache pas la carotide comme ça, tranquille, facile, pendant la pause...
— Les marques sur ses mains correspondent avec le morceau de bois que l'on a retrouvé près du corps.
Il s'en est servi pour frapper tout autour de lui, on a d'ailleurs retrouvé des traces sur la glissière de la route.
Il y avait aussi des tas de petites gouttes de sang un peu partout.
Ce qui veut dire...
...que Tomitake se défendait avec cette branche de bois, alors qu'avec son autre main il se grattait jusqu'au sang.
— D'après les blessures de l'épiderme, on peut dire que M. Tomitake a été blessé par quelqu'un d'autre.
Cela veut dire que quelqu'un l'a attaqué délibérément.
D'ailleurs, il est fort probable que plusieurs personnes l'aient attaqué.
Pour résumer, voilà comment ça a dû se passer.
Tomitake est tombé dans une embuscade.
Après avoir couru comme un dératé dans la nuit, il a finalement été rattrapé, et a ramassé une branche pour se défendre.
Pendant qu'il se défendait, il a été pris d'un accès de folie et a commencé à se gratter jusqu'au sang,
puis s'est arraché la carotide.
Puis... il est mort.
— La mort est située entre 21h et 23h le soir de la fête de la cérémonie du coton.
Ce qui veut dire qu'il est mort juste après avoir discuté avec vous, le soir de la cérémonie.
Nous lui avons écrit nos messages sur le t-shirt... Nous lui avons souhaité bonne chance...
Et il est mort juste après...
Mais au fait... Il n'était pas tout seul !
Où est passée la femme qui était avec lui ?
— Elle est portée disparue.
Elle ne s'est pas rendue à son travail aujourd'hui, et n'est pas rentrée chez elle hier soir non plus.
Il est extrêmement vraisemblable qu'elle était sur les lieux lors des événements.
Je restai silencieux, assommé.
Je n'aurais jamais cru qu'un truc pareil puisse arriver à quelqu'un de mon entourage.
Oh bien sûr, nous n'étions pas des amis de longue date.
...mais tout de même, nous nous étions amusés comme des petits fous pendant la fête...
C'était un peu un compagnon d'armes.
— Nous essayons de poursuivre notre enquête sans ménager de piste, mais je sais que les villageois ne voudront pas parler...
C'est un peu compréhensible, remarque.
D'ailleurs, si Tomitake ne m'en avait pas parlé, les villageois ne m'auraient sûrement jamais mis au parfum à propos de la malédiction...
— ... Aaaah, je vois, et c'est pour ÇA que vous vouliez me parler à moi, n'est-ce pas ?
Parce que je ne suis pas vraiment du village.
Si c'est la seule raison, il peut aller se faire voir...
— Si vous ne m'aidez pas, les gens diront que Jirô Tomitake est mort à cause de la malédiction.
L'homme détourna le regard.
— ...Le soir du meurtre, pendant la cérémonie religieuse, il a offensé la déesse en prenant des photos comme un vulgaire touriste. Voila ce que les gens vont dire, et ils y croiront dur comme fer !
— Mais enfin, c'est n'importe quoi !
Tomitake est mort tué par des humains. De bons salauds, apparemment.
Je ne laisserai personne mettre ça sur le compte d'une soi-disant malédiction ! Jamais !
— Je suis de votre avis, c'est n'importe quoi.
Les malédictions, ça n'existe pas.
Nous restâmes silencieux et tendus pendant un moment... puis l'homme eut un sourire.
— Et donc, voilà où j'en suis, M. Maebara.
Il me faut l'aide de quelqu'un qui ne croie pas en la malédiction.
Vous voyez où je veux en venir ?
Ni moi ni Tomitake ne croyions en la malédiction.
Seulement si personne ne fait rien, les gens vont mettre sa mort sur le compte de la déesse, et on ne saura jamais la vérité.
Cela voudrait dire que Tomitake était un exclu, un paria.
Et ça, je ne l'accepterai jamais !
Tomitake était un de nos amis.
Il n'habitait pas à Hinamizawa, mais il nous rendait visite tous les ans. D'ailleurs, il était beaucoup plus impliqué dans la vie du village que moi, par exemple !
La déesse Yashiro n'avait absolument aucune raison de le tuer lui !
— Je ne veux pas vous décevoir,
mais je ne pense pas que je puisse vous être d'un grand secours...
— Oh, ne vous en faites pas, je veux juste que vous me préveniez si vous voyiez des choses louches dans les jours et les semaines qui viennent.
Comment ça, il parle du futur, là ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
— Prévenez-moi, même pour des broutilles.
Si quelque chose vous paraît bizarre, n'hésitez surtout pas à m'en parler.
Que ce soit une chose, ou une personne avec un comportement bizarre, ou même un détail qui vous revient.
...Ah, j'en profite, voici mon numéro de téléphone. Vous pourrez m'y joindre presque tout le temps. Si je ne suis pas libre, parlez-en avec la personne qui vous aura répondu, elle me fera suivre l'information.
Juste avant de prendre le numéro, j'eus une hésitation.
Si je l'accepte, je serai impliqué, de gré ou de force.
— Je vous en prie, faites-le pour Tomitake. J'ai besoin de votre aide.
Il a raison.
Je sais même pas pourquoi j'hésite !
Il faut trouver le... ou les salauds qui ont fait ça !
Je pris de force le papier qu'il me tendait. L'homme eut un large sourire, puis reprit une mine sérieuse.
— Que tout ceci reste secret.
Vous ne savez rien de tout ce que je vous ai raconté, c'est bien clair ?
— Tout à fait.
— N'en parlez même pas à vos amis !
Surtout pas à mademoiselle Sonozaki ou à mademoiselle Furude. Surtout pas à elles, suis-je bien clair ?
— De quoi, pas à Mion ?
Mais pourquoi ? Vous n'allez pas me dire qu'elle est impliquée dans l'affaire, quand même ??
Je n'aimais pas la direction que prenait cette conversation. Je n'aime surtout pas faire des cachotteries à mes amis !
— À vrai dire, je n'ai pas le droit de vous en parler...
— Pas de ça avec moi, d'accord ?
Mion est une amie, j'ai confiance en elle !
Apparemment, l'homme n'avait pas l'air de se formaliser de ma réaction.
— Je peux vous donner certains éléments, mais...
...
ne le prenez pas mal, d'accord ?
— Crachez le morceau !
Il avait l'air d'hésiter.
Il regarda par la fenêtre, puis se mit à réfléchir un peu avant de commencer à parler.
— Il est fort possible que le village complet soit impliqué dans certaines affaires louches.
— ...Mais enfin... vous n'êtes pas sérieux ?
Il y a des limites, quand même !
Et d'abord, sur quoi il se base ? Il a des preuves ??
— Je n'ai pas de preuves.
De plus, les événements des années précédentes ont été traités comme des affaires indépendantes, et ont été menées à bien chacune de leur côté. Aucun des coupables n'avait de lien direct avec le village.
— Alors comment est-ce que vous faites pour en arriver à ce genre de conclusion ?
— Chaque année, une personne opposée aux intérêts du village est retrouvée morte !
Vous ne croyez pas que cela suffit amplement ?
Les seules personnes au monde à se soucier du jour de la purification du coton sont les gens de Hinamizawa.
Par déduction, cela veut dire que si quelque chose se passe précisément à cette date, c'est qu'il y a un rapport direct avec la vie du village !
— La première victime était le chef de chantier du barrage !
Puis l'un des plus fervents partisans du barrage est mort !
Les ennemis du village sont morts les uns après les autres, dans des circonstances plus ou moins louches.
Les faits sont là !
C'était une théorie sans preuves, et complètement injuste.
... Sauf que. En même temps, on ne pouvait pas simplement en rire.
— Et le prêtre alors ? Et sa femme ?
Ils n'étaient pas nuisibles au village, que je sache ?
— Non, mais le prêtre avait beaucoup baissé dans l'estime des fidèles. Il avait toujours refusé de jouer un rôle actif dans le conflit, alors que c'était quelque chose que les gens attendaient de lui. Les fidèles n'ont pas apprecié.
— Mais oui, mais enfin, quand même, il n'avait rien fait de mal !
Et la femme, l'année d'après ?
C'est la sœur de l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours... enfin, vous comprenez ce que je veux dire ? Elle n'avait aucun rapport direct, c'est quand même mince comme raison pour tuer quelqu'un !
Et Tomitake, parlons-en de Tomitake !
Il n'était même pas là quand tout ce bordel avec le barrage a commencé ! Alors quoi, on l'a tué par ce qu'il n'habitait pas au village ?
Au début, les victimes avaient un rapport avec le barrage, mais chaque année, le rapport avec le village est de plus en plus mince et flou.
— Et c'est exactement ce qui me fait peur,
figurez-vous.
— Comment ça ?
— Eh bien, la victime n'a plus besoin d'avoir fait quelque chose contre le village. Il lui suffit de ne pas être impliquée dans la vie du village pour devenir la prochaine cible.
— Ah ouais, alors l'année prochaine, c'est un touriste qui va y passer ?
— Ou bien quelqu'un qui vient d'emménager, par exemple.
— Ha ! La bonne blague, vous pensez à qu-...
J'avais la gorge très sèche, d'un seul coup.
Içi, à Hinamizawa, ceux qu'on considère comme les plus "externes" au village c'est...
...ma famille.
Il suffit de regarder comment je me débrouille moi.
Je ne connais même pas la plupart des gens que je croise dans la rue...
Mais alors... Il se pourrait que l'année prochaine...?
...
— Mais où est le rapport avec Mion ?
— Je n'ai pas le droit de vous donner de détails précis, mais sachez que les Sonozaki étaient le fer de lance du mouvement anti-barrage.
Et ils étaient plutot zélés.
D'ailleurs, mademoiselle Mion Sonozaki a déjà été placée plusieurs fois en garde à vue pour obstruction aux forces de l'Ordre et dégradation de biens publics.
Elle a aussi été arrêtée pour d'autres délits mineurs. Son casier judiciaire est loin d'être vierge.
Mion m'avait raconté qu'elle avait “combattu”.
Mais elle ne m'avait pas dit que sa famille avait mené les hostilités.
... Mais alors... ça veut dire quoi ?
— Vous pensez que la famille de Mion... est plus ou moins impliquée dans cette série de meurtres ?
— Je ne peux rien affirmer.
Mais si le village est impliqué de près ou de loin, il y a de fortes chances pour que ce soit le cas.
C'est pas très compréhensible comme explication.
J'ai l'impression qu'il évite le nœud du problème depuis tout à l'heure...
— Je ne sais pas exactement qui est impliqué, ni à quel degré.
C'est pour cela que je veux absolument ne pas en parler aux villageois.
Je ne répondis pas, mais ma grise mine en disait long.
Il avait l'air de comprendre ce que je voulais lui dire.
— Écoutez, pensez-y différemment.
Dites-vous que vous ne voulez pas effrayer les villageois qui croient dur comme fer à la malédiction.
C'est mieux comme ça ?
Je ne voyais pas ce que ça changeait.
Je compris que ce n'était pas un sujet de conversation facile avec les villageois... et que donc il valait mieux se taire.
Le meurtrier court toujours.
Cela n'a rien à voir avec la malédiction.
Et la police finira par l'arrêter et le punir comme il se doit.
... Les autres n'ont rien à voir avec ça.
Elles sont sûrement très nerveuses à cause de cette histoire de malédiction. Il vaut mieux les ménager. Pas la peine de les inquiéter avec ça encore en plus...
— Les autres ne m'ont rien dit jusqu'à maintenant, pour pas que j'aie peur.
C'est à mon tour de me taire pour ne pas les effrayer. C'est normal, après tout...
Je marmonnais tout seul dans ma barbe.
Pour moi, ce meurtre était le premier, mais il devait avoir une signification toute particulière pour les autres, car elles en subissent tous les ans...
Je n'ai pas envie de leur mettre encore plus de pression...
Finalement, il allait falloir que je fisse ce que cet homme m'avait dit de faire. Ça ne me plaisait pas, mais je n'avais pas le choix...
— Mouais, ça va, j'ai compris. Cela restera secret.
Ça vous va, monsieur... euh...
— Je suis Ôishi, du commissariat d'Okinomiya.
Mais vous pouvez m'appeler Choupinet si vous voulez ?
— Euh... Non merci, Ôishi ça sonne mieux...
Il est très poli mais il a l'air très salace. On dirait un vieux pervers...
Je ne connais aucune série télé avec un commissaire pareil...
— Je crois que je vous ai retenu suffisamment longtemps.
Vos amis vous attendent, n'est-ce pas ?
Vous devriez y aller.
J'ouvris la portière et fut assailli par un souffle d'air brûlant.
Il faisait extrêmement chaud dehors. Je n'avais pas remarqué la temperature avant...
Le contraste entre la fraîcheur de la climatisation et la chaleur naturelle environnante était très désarmant.
J'avais la triste impression que la nature de Hinamizawa ne m'aimait plus...
— Je ne vous demande pas de soupçonner vos amis !
Ne vous méprenez pas sur mes intentions.
C'est facile de dire ça !
— Si vous ne trouvez rien ou si vous n'entendez rien, ce n'est pas grave, au contraire !
Cela prouvera que le village n'a rien à voir dans cette affaire.
— Je vous préviendrai si je trouve quelque chose,
mais ne vous faites pas trop d'espoirs, d'accord ?
Je ne suis pas détective, moi...
— Pas de problèmes, ne vous en faites pas !
Je ne vous demande pas de devenir détective privé non plus...
Comportez-vous comme d'habitude.
Laissez seulement un peu vos yeux et vos oreilles se balader !
Je lui fis mes respects, puis partis en courant vers l'école.
— À une prochaine fois, M. Maebara !
Je ne daignai plus me retourner.
Je ne savais pas combien de temps j'avais passé dehors.
J'étais d'un côté désolé de les avoir fait attendre aussi longtemps, mais de l'autre j'avais franchement autre chose en tête...
... C'était déjà dur d'apprendre la mort de Tomitake... mais savoir en plus que le village était impliqué ? Que Mion pourrait être impliquée ?
C'est n'importe quoi...
Comment pourrait-on soupçonner Mion, Satoko, Rena ou Rika ?
C'est impensable...
Ils étaient plusieurs pour agresser Tomitake ?
Je me demande bien qui ça peut être.
Est-ce qu'ils sont encore cachés quelque part dans Hinamizawa ?
... Dur à dire.
La seule chose que je sache, c'est que Mion n'était pas la coupable.
— Mii !
C'est toi qui l'a tué !
Hein, quoi ?
En entendant Rena, j'ai eu peur d'un seul coup.
— L'arme c'est “la corde”,
dans... euh...
“le salon” !!!
— AAAhahahahahahahah !
Perdu !
— NNOOOoooooooooooonnnnnnnn !!
Rena se prit la tête entre les mains tout en tournant sur soi-même.
Elle était complètement à côté de la plaque, apparemment.
— AAAaaah !
Eh bien alors, mon cher, ce n'est pas trop tôt !
Votre retard me met très en colère !
— Ah... ouais... euh, désolé, je...
La maîtresse m'a convoqué et j'ai dû aller dans son bureau, et...
— Elle n'a pas apprécié votre façon de vous comporter ?
Pauvre petit...
— Bah, on était bien pris dans le jeu, donc ce n'est pas grave.
Mais il se fait tard tout doucement, alors la prochaine partie sera la dernière !
— Mais alors moi, j'ai 0 points, c'est ça ?
Je suis sûr d'être dernier, non ?
— Non, ne t'en fais pas, Keiichi...
Moi, j'ai -1...
Hauu...
Ah, oui, carrément...
Je suis plus haut qu'elle au classement, sans avoir joué !
— Le dernier match décidera de qui aura le gage ! Soit Rena toute seule, soit Rena et Keiichi !
— Cours toujours, ma grande.
Le gage, elle peut se le garder !
— ... Keiichiii... Tu avais promis que l'on gagnerait ensemble !
...
Je t'ai attendu, moi, tu sais ? Tu sais ?
— Euh... oui... Désolé...
Nous mîmes notre plan en pratique. Je décidai d'attendre que Rena trouvât la réponse, et feignis de ne rien savoir.
— Cette fois je l'ai !
Le meurtrier, c'est “moi” !
L'arme du crime, c'est “le poison”, et le meurtre a eu lieu dans “le hall d'entrée” !
Alors ? Alors ? J'ai juste ?
— Dis-donc Rena, c'était rapide cette fois !
Je parie que tu as répondu un peu au hasard ! Voyons cela...
...Oh.
— Tout juste !
— Oooohhohohohoho !
Bien, cela veut dire que nous avons deux perdants !
— Ouaiiis !
Allez Keiichi, on y croit !
— Ouais, c'est cool... Super...
En même temps, c'est ma faute...
— Et c'est la fin de la partie !
Score final : grand vainqueur, Mion Sonozaki !
Grands perdants : Keiichi Maebara et Rena Ryûgû !
Les applaudissements fusèrent.
... Restait le gage...
— Bon ! Eh bien, je vais essayer de vous trouver de quoi aller acheter, vous deux !
— ... Je me demande ce que ça va être... Qu'est ce que ca va être ?
— Je propose de déclarer la pharmacie hors-jeu. Je te vois venir, Mion !
— Hein ?
La pharmacie ? Rien à foutre de la pharmacie !
Je vais vous donner une liste. Tenez, amusez-vous bien !
— Ouah, mais il y en a une floppée !
Une floppée ???
Mais qu'est-ce qui lui prend ??
— Alors, alors : deux blocs de tofu,
du shampooing et de l'après-shampooing,
de la panure, de la sauce à friture...
C'est quoi, tout ca ?
— J'ai plus l'impression que c'est une liste de commissions plutôt qu'un véritable gage...
— Ça explique pourquoi elle avait tellement envie de gagner.
— Article 7 du règlement !
On ne discute pas le contenu du gage !
Tenez, voilà de quoi payer pour les achats. Ah, et le shampooing, c'est du mix de fruits.
Allez, hop hop hop !
— Mais... Mais ! On est pas là pour faire tes courses !!!
Je me jurai de lui faire acheter de la crème contre les hémorroïdes la prochaine fois que je gagnerais...