Irie

— Ah tiens ? Bonjour ! C'est bien rare de te voir ici à part les dimanches, Rika.

Rika

— ... J'aimerais parler à Takano.

Est-ce qu'elle est en service, aujourd'hui ?

Irie

— Non, pas encore.

Elle doit être avec Risa, à prendre du bon temps.

Aaah, je les envie...

Rika

— ... Qui est donc Risa ?

Je n'ai jamais entendu ce nom.

Irie

— Hahahahahaha ! Eh bien, demandez-lui pourquoi !

C'est à cause de notre première rencontre, nous n'avions pas les yeux en face des trous.

Et la réaction de l'intéressé a été très amusante.

Ça ne m'avançait guère.

Bah, après tout, ce n'est qu'un surnom.

Irie

— Mais de quoi veux-tu lui parler ?

Je peux lui laisser un message, si tu veux. Je la verrai ce soir, nous avons une réunion de prévue.

Rika

— Merci beaucoup,

mais je préfèrerais le lui dire en personne.

Irie

— Ah... Eh bien, soit.

Si ça ne te dérange pas, j'aimerais retourner à mes papiers.

Rika

— ... Vous ne faites pas de consultations aujourd'hui ?

Irie

— Non, j'ai beaucoup de matériel à préparer pour la réunion de ce soir.

Irie

Je prépare des choses un peu tous les jours, mais d'habitude, les patients m'occupent une grande partie de la journée, alors ça n'avance pas.

Irie

Mais si je donne ça comme excuse pour le manque de préparation, je me ferai tirer les oreilles...

Rika

— ... Et en plus, vous vous occupez de l'équipe de base-ball. Vous avez la forme, en tout cas.

Irie

— Ahahahahahaha ! Je suis très occupé, c'est vrai.

Je recherche une ou plusieurs jolies soubrettes pour faire le ménage ou faire du secrétariat, mais pour l'instant, je n'ai reçu aucune candidature pour le poste.

Toujours en riant, il regarda sa montre de manière ostentatoire.

Il essayait de me faire comprendre qu'il n'avait pas trop le temps.

Rika

— ... Vous n'avez pas une idée de là où elle pourrait être allée ?

Irie

— Oh, j'imagine qu'ils vont visiter le village.

Ah, par contre, je sais qu'ils se donnent toujours rendez-vous au sanctuaire.

Elle est partie vers midi et demie, ils y sont peut-être encore.

Surprise, je regardai la pendule.

J'avais dû la rater sur le chemin.

Il valait mieux m'en aller tout de suite si je voulais la rattraper.

Rika

— ... Eh bien, merci beaucoup.

Je vais retourner chez moi, alors.

Irie

— Ils ne se voient que quatre fois l'an, Rika, alors ce ne serait pas très gentil de les déranger. D'accord ?

Irie me fit un sourire complice, puis m'invita à vite aller les trouver.

Enfin, je fus de retour au sanctuaire.

Je descendis de vélo et me dirigeai vers le parking à vélo situé à la base des escaliers menant à la place principale du sanctuaire.

D'habitude, il n'y a que mon vélo et celui de Satoko, mais aujourd'hui, il y avait bien une dizaine d'emplacements occupés.

Je suppose qu'il doit y avoir une réunion dans la salle commune.

Elles sont très nombreuses lors des derniers jours avant la purification du coton, et chaque année, à cette période, les vélos fleurissent sur le parking.

C'est d'ailleurs très agréable de les voir ; ils annoncent l'arrivée imminente de l'été.

Les vélos des villageois d'ici sont des antiquités grinçantes et brinqueballantes,

mais parmi elles, il y avait deux vélos flambant neufs.

Ces deux vélos étaient du même modèle sportif, pliables, et se distinguaient entre eux uniquement de par la couleur de leurs roues.

C'étaient sans aucun doute possible les vélos de Tomitake et de Takano.

Je gravis les escaliers et les cherchai du regard, sans succès.

Qu'y a-t-il d'autre d'intéressant à photographier, par ici ?

Tomitake cherche sûrement des oiseaux sauvages, mais... Je ne sais pas ce qu'il recherche au juste.

Et Takano, que pourrait-elle vouloir photographier ?

Ooh, bien sûr. Oui, elle est sûrement là-bas.

Takano

— Alors, qu'en penses-tu ?

Jirô ?

Tomitake

— Hmmm,

ça m'a l'air d'être un modèle très simple.

Avec des outils, je peux m'en débarrasser en moins d'une minute.

Takano

— Chapeau, l'artiste.

Je savais que tu étais doué pour ouvrir les ceintures de chasteté, mais apparemment, pas que.

Ahahahaha...

Rika

— ... Jeeeee vouuuuus mauuuuudiiiiiis...

Je les pris par surprise, faisant irruption depuis l'arrière du temple des reliques sacrées.

Takano

— Tiens, bonjour, Rika.

Dis-moi, ce n'est pas gentil de surprendre les gens comme ça.

Rika

— ... Et projeter de crocheter la serrure d'un temple interdit, c'est gentil, peut-être ?

Tomitake

— Ahahahahaha, euh, ahem. Tu vois, Miyo, je te l'avais bien dit.

Il ne faut pas faire ce genre de choses...

Tomitake avait l'air d'être mis à mal par sa bonne conscience. Il ne mit que quelques secondes à reconnaître son crime, mais Takano n'avait pas l'air décidée à en faire autant.

Elle se mit à me sortir une excuse bidon après l'autre.

Je savais depuis un moment qu'elle portait un intérêt tout particulier pour ce bâtiment.

C'est pourquoi je ne pus qu'écouter avec admiration l'ingéniosité des bobards qu'elle me servit. Quelle imagination ! Quelle mauvaise foi !

À l'intérieur du temple des reliques sacrées, nous avions rangé les signes des heures sombres de l'histoire du village, du temps où il s'appelait encore Onigafuchi, “les abysses des démons”.

En gros, c'est là que se trouvaient tous les instruments de torture, sanglants, horribles, justement ceux que Takano voulait voir.

Normalement, après toutes les recherches qu'elle a déjà fait, elle doit bien se douter qu'ils sont là-dedans.

C'est bien pour ça que je vois clair dans son jeu ; elle a beau dire que le temple est un monument historique d'une grande valeur culturelle pour la région, elle n'en pense pas un mot.

Tomitake aussi observait Takano. Il lui découvrait une nouvelle facette, apparemment, et il avait l'air fasciné.

La raison pour laquelle j'avais toujours fait en sorte de lui interdire l'accès au temple était...

qu'elle s'intéressait à cet endroit à cause d'histoires sordides, et qu'elle ne s'en cachait pas. Or, pour nous, cet endroit était sacré.

En tant qu'héritière du clan des Furude, et en tant que responsable du village,

je ne pouvais pas approuver son comportement.

Et puis, si je devais laisser Takano rendre compte de l'histoire d'Onigafuchi, ses explications rendraient Hanyû furieuse.

Et puis enfin, il se trouvait que cet endroit était très spécial aux yeux de Hanyû.

Au début, je ne voyais pas trop ce qu'elle lui trouvait, à ce temple,

mais elle disait que c'était le dernier lieu où elle pouvait respirer l'air du temps passé. Elle s'y sentait vraiment très bien.

C'est pourquoi le temple des reliques sacrées servait aussi de cabane secrète à Hanyû.

Les rares fois où je ne la vois pas, elle y est, pour se reposer.

Je ne voudrais pas entendre Takano souiller ce lieu avec ses histoires sanguinolantes.

C'est pourquoi j'ai toujours refusé de la laisser rentrer.

Mais pourquoi suis-je aussi catégorique avec elle ?

Parce que je ne l'aime pas vraiment non plus.

Mais il faut que j'arrête avec ça.

Je dois tisser des liens étroits avec elle et Tomitake.

Ce n'est pas parce que ça n'a jamais marché jusqu'à présent que je peux me permettre de faire l'impasse dessus.

Je dois essayer, au moins encore une fois.

Cette fois-ci, je suis dans un monde où j'ai beaucoup de chance.

Je réussirai peut-être à changer leur Destin. Et ce changement pourra peut-être avoir une influence sur le mien...

Rika

— Hanyû, je...

Je compte montrer l'intérieur du temple des reliques sacrées à Takano.

Hanyû

— ... Je suis pas d'accord.

Hanyû ne chercha même pas à cacher son ressentiment.

Je suis sûre que Takano sera folle de joie à l'idée de pouvoir entrer.

Et je parie qu'elle se mettra à nous raconter toutes les histoires écœurantes qu'elle a pu entendre sur la région, en y rajoutant une tonne.

Clairement pas la meilleure conversation à suivre pour Hanyû.

Rika

— ... Je ne cherche pas à l'amadouer par tous les moyens.

Rika

Mais je veux qu'elle ait une dette envers moi, pour la forcer à écouter ce que j'ai à lui dire.

Rika

Elle est du genre rancunière, tu sais. Si je la chasse d'ici aujourd'hui, elle ne nous tendra plus jamais l'oreille.

Hanyû

— Mais oui, mais...

Je comprenais bien sa position, elle ne voulait pas faire entrer une hérétique pareille dans un endroit aussi important.

Mais Hanyû savait aussi bien que moi qu'à part me faire une scène, elle ne pourrait pas m'empêcher d'ouvrir les portes du temple.

C'était moi qui devais prendre une décision.

Alors je lui promis des tas de choses sucrées en échange. Elle finit par accepter.

Rika

— ... Takano.

Si vous me promettez de tenir une promesse, alors je veux bien vous faire entrer.

Takano

— Quoi, QUOI ? Vraiment ?

À l'intérieur du temple des reliques sacrées ?

Ne viens pas me dire après que tu voulais me faire entrer dans ta cabane secrète !

Rika

— ... Vraiment.

À l'intérieur du temple des reliques sacrées, pour de vrai.

Takano

— Non mais, dans ce bâtiment ici, là,

celui qui est juste devant nous ? Vraiment ? Tu es sûre ?

Rika

— ... Je n'ai aucune raison de vous rouler dans la farine.

Je vous ferai entrer jusque tout au fond.

Nipah☆!

Takano

— N…

Nipah――(>▽<)ノ―― !!

C'était bien la première fois que je voyais Takano avec un visage aussi radieux et souriant. On dirait une petite fille qui vient de recevoir le plus beau cadeau d'anniversaire de sa vie.

... Non, vraiment, j'ai beau chercher, je crois que ce sourire, il est collector. Il est au moins du même niveau que le Keiichi de l'autre monde...

Vous imaginez bien que si moi, ce sourire me mettait dans tous mes états, l'effet était décuplé pour Tomitake.

J'entendais presque l'image qu'il avait d'elle, d'une femme sérieuse et intelligente, se briser en mille morceaux dans sa tête.

... Même si au final, j'avais plus l'impression qu'il craquait complètement pour elle...

Hanyû

— ... Je dois t'avouer que je ne m'attendais pas à ça...

Rika

— Comme quoi, c'est important de parler aux gens.

Parce que sans ça, on ne les connaît jamais vraiment.

Pendant quelques instants, nous restâmes à la regarder tournoyer sur elle-même, comme une toupie, projetant des pétales de roses partout, un sourire presque idiot sur les lèvres.

Rika

— ... Je vous ferai entrer en secret, alors faites bien attention à ne pas vous faire voir.

Tomitake

— Ah, euh, oui, c'est préférable, en effet.

Ne bouge pas, je vais essayer de la faire redevenir normale...

Rika

— ... Oui. Je vais aller chercher la clef, alors.

Lorsque je revins avec la clef, Takano était redevenue la femme calme et sérieuse que je connaissais.

Mais par intermittence, elle perdait toute composition et se mettait à ricaner toute seule.

Elle est peut-être beaucoup plus une gamine dans sa tête que ne le laisse supposer son apparence habituelle.

Et ce serait cette différence qui déclencherait cette fameuse PASSION dont Keiichi parle sans cesse ?

Il y a des jours où je me demande vraiment où est-ce qu'il entend toutes ces expressions bizarres...

Rika

— ... Bon, eh bien alors, vous deux, écoutez-moi.

Avant d'entrer, je veux que vous promettiez quelques petites choses.

Et si vous ne me jurez pas de le faire, vous n'entrez pas.

Takano

— Tout ce que tu voudras.

Quand je pense que le chef de clan des Furude nous fait l'honneur de briser la loi rien que pour nous...

Tu peux compter sur nous.

... Héhéhé, héhéhéhé, héhéhé...

Tomitake

— Allons, Miyo, reste un peu sérieuse !

Takano

— Oh, j't'en prie, mauvaise langue, je suis tout à fait sérieuse !

Héhéhéhé, ahahahahaha...

Hanyû

— Tu ne peux pas savoir comme la vision de Takano me fait bizarre.

Rika

— Pareil pour moi.

Sa cote est en train de chuter si fort qu'elle provoque un mini crack boursier dans ma tête...

C'est Rena qui a dit ça hier, non ?

Ça ne sert à rien de se casser la tête tout seul sur ses problèmes.

Je croyais qu'elle était simplement bizarre dans sa tête et qu'elle aimait les choses gores, qu'elle serait froide et distante.

Je n'aurais jamais cru à cette personnalité si on me l'avait dit.

On dirait un peu Rena quand elle passe en mode “je te ramène à la maison”.

Si j'avais su, j'aurais pu essayer de la connaître plus rapidement, ça m'aurait évité de développer du mépris et de la méfiance envers elle.

... Comme quoi, c'est important de parler aux gens...

Rika

— ... Pour commencer, cette visite du bâtiment doit rester absolument secrète.

Ne le dites à absolument personne.

Takano

— Bien sûr, tu as ma parole.

Je ne lui avais rien demandé, mais elle mit une main sur le cœur et une main en l'air avant de jurer.

Elle se tourna et demanda à Tomitake d'en faire de même.

Il le fit, un peu en retard -- on voyait bien qu'il avait du mal à la suivre, mais c'était rigolo...

Rika

— C'est vraiment un endroit très important, alors ne le salissez pas, et ne cassez rien.

Takano

— Bien sûr, cela tombe sous le sens, voyons.

Mais, je peux prendre des photos, quand même ? Hein ?! Dis ?!

Rika

— ... Miaou.

Vous pouvez, mais c'est 100Y la photo.

Takano

— Quoiiii ?

Takano

Jirô, t'as combien sur toi ?!

Rika

— ... Si vous donnez un billet de 10 000Y en avance, vous pourrez prendre autant de photos que vous voudrez.

Takano

— C'est donné !

J'achète, je paye, OK !

Jirô !

Elle a vraiment payé d'avance...

Même Hanyû, qui était tout sauf vénale, avait compris que cet argent pouvait se transformer en une montagne de desserts. Elle en avait déjà les yeux qui brillaient.

Hanyû

— Ooooh, oooh, oooooooooh☆!

Mais en fait, elle est super gentille !

Rika

— ... Comme quoi, tout a un prix...

Bon, eh bien puisque le propriétaire du temple a dit oui,

j'imagine que nous pouvons y aller...

Le temple des reliques sacrées est situé derrière la salle commune.

Comme c'est un bâtiment non-fumeur, les gens sont souvent dehors, pour prendre des pauses cigarette.

Il faut donc vérifier d'abord qu'il n'y a personne.

Tomitake

— ... ... C'est bon,

je ne vois personne dans les parages.

Tomitake nous fit signe.

J'acquiesçai, puis ouvris rapidement le cadenas pour enlever les chaînes.

Je poussai les lourdes portes battantes juste un chouia, à peine de quoi me faufiler à l'intérieur, et je les invitai à me suivre.

Rika

— ... Tomitake, si vous restez dehors à faire le guet, les gens vont se poser des questions.

Tomitake

— Quoi ?

Moi aussi, je dois rentrer ?

Il avait déjà sorti ses cigarettes ; il n'avait clairement pas prévu de venir avec nous, et la perspective ne lui disait rien de bon.

... Je savais qu'il n'avait pas les même centres d'intérêts qu'elle.

Donc en fait, sa réaction était plutôt normale...

Takano

— Jirô,

Rika t'appelle, voyons !

Allez, entre, viens !

Tomitake

— Oui, oui, j'ai compris, j'arrive...

Takano fit les gros yeux et ordonna à son homme de la rejoindre.

J'allumai la lumière, puis fermai la porte.

Pour finir, je mis en place la lourde poutre qui retenait les battants des portes fermées de l'intérieur.

Takano

— Tu es bien prudente, dis-moi.

Rika

— Je ne veux pas que de méchants chats remarquent que le cadenas n'est plus là et tentent de rentrer ici.

Takano

— Ahahaha, désolée de ne pas être une chatte toute sage.

Rika

— ... Takano, une chatte doit faire des miaou, miaou, sinon, ce n'est pas une chatte.

Nipah☆!

Takano

— Qu'est-ce que tu veux dire par là ?

Rika

— Si tu n'es pas une chatte, alors je ne peux pas te montrer l'intérieur.

J'ai ramené un collier avec une clochette et un serre-tête avec des oreilles de chat, pour toi.

Rika

Si tu ne les portes pas et que tu ne te mets pas à quatre pattes en miaulant, je n'ouvrirai pas les portes intérieures.

Le temple des reliques sacrées est construit de façon à ne pas laisser les gens voir à l'intérieur depuis l'extérieur. Il y a d'abord de lourdes portes, puis un long verstibule, puis d'autres portes encore.

Et nous étions pour l'instant dans le vestibule.

Le temple à proprement parler commençait seulement après les prochains lourds battants.

Tomitake

— De, hein, comment ?

Tomitake

Allons, enfin, Rika, ce n'est pas sérieux ?

Tu exagères...

Takano

— Eh bien...

ce n'est pas un problème !

Si c'est une épreuve nécessaire, soit !

Takano

Si c'est pour tester ma volonté et voir jusqu'où je suis prête à aller pour satisfaire ma curiosité scientifique, je veux bien le faire !

Takano

Si tu veux, je peux aussi mettre une queue de chat en accessoire !

Je peux aussi me prosterner à quatre pattes devant une écuelle vide !

Maître, j'ai si soif, donnez-moi votre bon lait chaud !

Hanyû

— ... En fait, si Takano avait le même âge que les autres, elle ferait un membre de choix pour le club.

Rika

— Oui...

En tout cas, elle retombe bien bas dans mon estime.

Mais vraiment très, très bas...

Takano

— Allez, Rika, donne-moi tout ça, je vais le faire, je vais te montrer !

Le serre-tête et le collier, c'est tout ?

Tomitake

— Euh... Miyo ?

Regarde la porte, elle n'est même pas verrouillée…

Il suffit de la pousser pour l'ouvrir, elle n'a pas de serrure...

Takano

— Ah-ah bon ?!

Ahahaha, oh, je suis confuse, je... Ahem.

Ahahahahaha…

Rika

— ... Mince, raté.

Raaah, Tomitake, t'as tout fait foirer !

Tu n'as pas idée à quel point la déesse t'a pris en grippe !

Rika

— ... Non, je plaisantais. Regardez, il suffit de pousser les portes.

Nipah☆!

Nous étions tout près de l'intérieur du temple, désormais.

Comme il n'y a ni fenêtre, ni vitrail, l'intérieur est toujours tout noir, même en plein jour.

Il y a bien quelques ampoules qui éclairent la pièce, mais elles sont faibles et mettent presque en valeur les ténèbres environnantes.

Dans la pénombre de la pièce, on pouvait distinguer, au milieu, la grande statue et l'autel de la déesse Yashiro.

À ses côtés, une montagne d'appareils de torture d'un autre âge menaçaient de s'écrouler sur eux, tellement ils étaient nombreux.

Il y en avait partout, sur tous les murs, pendus au toit, bloquant presque tout passage.

Plus qu'une remise où l'on aurait caché ces appareils, on avait l'impression d'entrer dans une véritable salle de torture.

Tomitake

— ... Ouah...

la vache...

ouh putain ! Ouah !

Même Tomitake ne trouvait rien d'intelligent à dire en voyant tout cela.

On ne parle pas de répliques ou d'appareils pour films d'horreur.

Les instruments de torture confinés ici sont des vrais de vrais.

Je n'aime pas trop y penser, mais ils ont certainement servi.

Ce qui leur donnait une aura vraiment intimidante.

Mais malheureusement, le seul à se rendre compte de cela était le seul à être normal dans sa tête.

Takano, quant à elle, faisait des photos dans tous les sens, en miaulant, les yeux pleins d'étoiles.

Pour moi, cet endroit n'a aucune signification particulière.

Oh, bien sûr, je comprenais qu'il était sacré et qu'il fallait le protéger et en prendre soin.

Mais comme j'y entre souvent depuis que je suis toute petite, il ne m'impressionne plus guère.

Limite, pour moi, ce n'est qu'une remise mise sous scellés dans laquelle on laisse pourrir des meubles dont on ne peut plus se servir.

Hanyû, quant à elle, le considère comme un lieu très agréable, le seul dans lequel elle peut retrouver un peu l'atmosphère des temps anciens.

C'est pourquoi quand elle vient ici, elle retrouve le sourire, et moi, ça me met de bonne humeur.

C'est un endroit assez sympa, en fait.

Mais c'est justement en voyant la réaction d'une personne normale dans sa tête que l'on se rend compte à quel point nous sommes blasées.

Et là, limite, c'est un peu plus agréable de voir quelqu'un comme Takano, dont la réaction était moins problématique.

Hanyû aussi avait l'air de prendre ombrage de la réaction de Tomitake. Elle baissait légèrement la tête.

... Ce n'était peut-être pas une bonne idée de lui demander de venir.

Mais bon, je ne peux pas le jeter dehors maintenant.

Hanyû et moi nous installâmes sur des coussins de cérémonie disposés près de l'autel, et pendant un long moment, nous observâmes nos deux visiteurs -- Takano prenant des photos, complètement survoltée, et Tomitake, les larmes aux yeux, qui faisait tout pour ne pas craquer.

Tomitake

— ... Je me demande bien pourquoi ils ont construit autant d'instruments de torture.

Je veux dire, ils servent à asservir l'ennemi, non ?

Alors pourquoi en avoir autant ?

Takano

— Jirô...

Les instruments de torture sont généralement utilisés de deux manières bien distinctes.

La première, c'est de les utiliser sur quelqu'un pour lui faire mal.

Takano

La deuxième, c'est simplement d'intimider en disant “si j'utilise ça, mon grand, tu vas souffrir”.

Takano

C'est pour ça qu'il faut tellement d'objets, pour pouvoir faire peur à tout le monde, en menaçant les gens avec un peu tout et n'importe quoi.

Tomitake

— Hmmm, tu n'as pas tort.

Et puis, il me semble avoir lu que torturer quelqu'un était quelque chose qui demandait beaucoup de tact. Il fallait faire très mal, sans pour autant tuer.

Tomitake faisait son possible pour assurer la conversation, mais je sentais bien qu'il était très intimidé.

Takano

— Les appareils de torture des occidentaux étaient très jolis, avec des dorures et tout, mais lors de leur utilisation, ils avaient une fâcheuse propension à tuer la victime d'un seul coup. Ils n'étaient donc pas très performants en termes de torture à proprement parler.

Takano

En même temps, les gens ne font pas trop la différence entre les appareils censés briser la volonté de la victime et ceux qui servaient à offrir du spectacle.

Takano

C'est tellement dommage, toute cette culture gâchée par les ignares.

Ahahahaha...

Tomitake

— Mais alors, on en revient au départ.

À quoi pouvaient servir tous ces objets ? Pour quelle raison maltraiter les autres habitants du village ?

Tomitake se tourna d'abord vers Takano, puis, sans la laisser répondre, vers moi. Il avait dû comprendre qu'il n'obtiendrait aucune réponse rassurante avec elle.

... En tout cas, il manque de tact, cet homme. Il croit que j'ai quel âge ? Me poser une question pareille, à moi ?

Takano

— Je pense que c'était pour faire respecter les lois un peu particulières du village d'Onigafuchi.

C'est ma théorie…

...

...

J'ai juste ?

Rika

— ... Oui, tout juste, bravo.

Ces objets de cultes n'ont pas été créés pour être utilisés sur les gens, mais pour être exposés et faire peur à ceux qui les verraient.

Rika

C'est pourquoi, si d'aventure il fallait les utiliser, on se rendait compte qu'ils étaient trop grands ou trop petits. Parfois même, il manquait un mécanisme pour les bouger, ils ne fonctionnaient donc même pas. En tout cas, de nombreux cas sont consignés dans lesquels ils n'ont pas pu être utilisés avec toute l'efficacité voulue.

Tomitake

— Mais alors, ils les ont vraiment utilisés ?

Eh ben, ça fait froid dans le dos...

Rika

— Quand vous vous contentez de dire que “si tu ne respectes pas les règles, la déesse viendra te maudire”, eh bien, certains préfèrent tenter leur chance et disent “chiche”.

Takano

— Dis-moi, Rika.

Takano

Ça voudrait dire que tous les instruments ici présents servaient juste à intimider ?

Takano

Certains pensent plutôt que lors de la purification du coton, ils servaient à cuisiner ou à disséquer la victime. Qu'en penses-tu ?

Hanyû était depuis tout à l'heure au bord des larmes.

Les heures sombres d'Onigafuchi ne faisaient pas partie de ses meilleurs souvenirs...

Ils l'ont appelée la déesse Yashiro et lui ont voué un culte. Puis, en son nom, ils ont commis les pires atrocités lors de tortures publiques.

Elle avait beau leur dire d'arrêter et protester, personne ne la voyait, personne ne l'entendait, et personne ne lui obéissait...

Rika

— ... Pas de commentaire. Nipah☆!

Tomitake

— Miyo m'en a déjà parlé.

Lorsque la prêtresse du temple avait une vision, les habitants du village allaient au pied de la montagne enlever quelqu'un pour le manger, c'est bien ça ?

Mais pourquoi faire une chose pareille ?

Tomitake

Pour intimider les gens des autres villages, peut-être ?

Takano

— Pour ma part, je vois plus cela comme une cérémonie pour se prouver qu'ils étaient supérieurs aux humains, parce qu'ils étaient plus haut dans la chaîne alimentaire. Les raisons les plus souvent évoquées pour justifier la séparation totale d'Onigafuchi avec les autres -- puisque tout contact avec l'extérieur était prohibé -- étaient que les habitants étaient des surhommes, des sages des montagnes, et que le village était une terre sacrée.

Takano

Parler ou converser avec les êtres humains, les accepter,

revenait à apporter la souillure et le déshonneur au village.

Takano

Donc forcément, régulièrement, ils devaient enseigner aux nouvelles générations quel était l'ordre des choses selon leur vision du monde, et prouver qu'ils étaient supérieurs aux autres humains.

Tomitake

— ... Dans le reste du Japon, on sait que certains seigneurs plaçaient les têtes de leurs ennemis sur des lances un peu partout sur leurs territoires.

Tomitake

C'est une pratique particulièrement odieuse et inhumaine, mais c'était très efficace pour tuer toute rébellion dans l'œuf...

Takano

— Les victimes d'ici étaient torturées en grande pompe, puis mangées vivantes.

À mon avis, les gens qui étaient forcés à regarder des scènes pareilles

n'avaient vraiment pas envie de subir le même sort.

Takano

Et puis, au Japon, il n'y avait pas que les décapitations, il y avait aussi des crucifixions.

On cloutait des gens sur de hautes croix sur la place publique, et on les transperçait de coups de lances.

Takano

... Je suppose que toi, Jirô, tu es au courant, mais ce n'est pas avec une ou deux blessures à la lance que vous pouvez tuer quelqu'un.

Takano

Si vous transpercez complètement l'abdomen ou le torse, là, à la rigueur, mais même en faisant cela, ça n'a rien à voir avec la guillotine, la victime ne meurt pas sans douleur. Les condamnés à mort étaient appelés des suppliciés, ce n'est pas pour rien.

Takano

Le sang leur remontait dans la gorge et les étouffait, les intestins pendouillaient depuis l'ouverture du ventre. Si les poumons étaient percés, le sang allait dedans et les asphyxiait.

Takano

Il ne faut pas croire, la guillotine était presque une mise à mort humaine et décente, en comparaison.

Takano

Tiens, d'ailleurs, est-ce que vous le saviez, ça ?

Takano

La guillotine, elle a été inventée pour tuer les nobles.

Takano

Vous comprenez, la fusillade et la pendaison, ce n'était pas assez bien.

Après tout, ils étaient déjà traités mieux que les autres toute leur vie, alors forcément, une mise à mort rapide et décente leur était due ! C'est pourquoi cet instrument de mise à mort a été développé, rien que pour eux.

Takano

Il y a ce film en noir et blanc qui raconte une histoire d'amour tragique se passant à la fin de la révolution française, je ne sais plus le titre, mais la scène finale de la guillotine est absolument stupéfiante.

Takano

Les nobles sont enchaînés les uns aux autres, on les fait défiler jusqu'à l'échafaud, et la foule les insulte et leur crache dessus. Puis la mise à mort commence, et ils y passent tous, l'un après l'autre.

Takano

Tchac !

Takano

Suivant !

Tchac !

Au suivant !

Tchac !

Takano

Avec ça, les morts défilent comme des pièces sur une chaîne de montage.

Takano

Il n'y a pas de chichi, d'absolutions ou de derniers sacrements de l'Église.

Takano

Tchac !

Au suivant !

Tchac !

Takano

Donc forcément, la mort en soi perd grandement son côté spectacle.

Takano

Plus personne ne s'émeut de la mort d'un seul homme.

La foule ne vient plus voir une exécution, mais toute une série, comme un poireau qui passe sur la râpe.

Takano

Comparé à ça, c'est quand même faire preuve de plus de considération pour l'être humain que de passer des heures et des jours à le torturer en le gardant en vie, non ?

Hahahahaha...

Takano

Et pour magnifier encore plus les actes barbares menant à la mort, l'homme créa la déesse Yashiro !

Avec de grands gestes dramatiques, Takano montra la statue de la déesse.

Takano

— Au bout du compte, la déesse Yashiro n'est qu'une idôle née de l'imagination des humains.

Elle fut célébrée et vénérée dans la peur, pour sanctifier les tortures.

Takano

Avec leurs règles et leurs lois, les hommes ont bâti des murs, qu'ils ont fortifié non pas avec du mortier, mais des menaces, des insultes, des malédictions, des miracles et surtout, de la peur.

Takano

Et lorsque les murs atteignirent des hauteurs jamais rêvées, sur ces hauteurs furent placés les dieux.

Les dieux ne sont que des choses créées par les actes et les désirs des hommes.

Takano

Elle cristallise le sang et la peur nés dans la torture, la jouissance de l'être humain à dominer son égal dans la terreur et la souffrance !

La déesse Yashiro n'est pas une exception !

Takano

Elle est la preuve que la voie qui mène l'homme au royaume des dieux n'est pas créée par les dieux eux-mêmes, à leur seule discrétion, mais par les humains, et son culte nous m-

Les explications fiévreuses de Takano furent accompagnées de formidables bruits de planches.

Je finis par me retourner et pus voir Hanyû sautant à pieds joints sur le plancher de bois. Elle fermait les yeux de toutes ses forces, mais cela ne suffisait pas à retenir les larmes impuissantes qui dévalaient sur ses joues...

Elle sauta encore,

encore,

et encore.

Elle savait que sa voix ne serait pas entendue, c'est pourquoi elle frappait le sol de toutes ses forces pour faire comprendre son désaccord.

... Elle oubliait apparemment que le bruit de ses sauts seraient eux aussi inaudibles aux oreilles des êtres humains normaux.

Hanyû était incapable de communiquer avec eux.

Hanyû

— C'est pas vrai...

c'est pas vrai...

Je ne suis pas méchante !

Rika

— ... Hanyû ?

Hanyû

— Je n'aime pas voir les gens mourir, et encore moins souffrir !

Hanyû

Je veux que les gens vivent ensemble en paix !

Hanyû

Je ne dis pas que je suis innocente et que je n'ai jamais rien fait de mal,

Hanyû

mais je n'ai jamais voulu ça, jamais !

Rika

— ... Hanyû.

Tu es toi et personne d'autre.

Tu n'es pas la déesse Yashiro. Elle n'a rien à voir avec toi…

Hanyû

— Si, Rika ! Non, tu ne comprends pas ! Ce n'est pas vrai, ce qu'elle raconte ! Ce n'est pas vrai !

Hanyû

Mééé euh, mééé euh, méééé euh !

Hanyû

Je la déteste, je la déteste !

Hanyû

Elle fait rien qu'à se moquer de moi, à dire des méchancetés sur moi ! Tout le temps, tout le temps, tout le temps !

... Je n'aurais pas dû la ramener ici.

J'aurais pourtant dû savoir que Takano allait commencer avec ses histoires.

Par chance, ce furent quand même ses sauts furieux qui firent taire Takano -- même si cela fut un résultat indirect.

Pour une raison qui m'échappait, Tomitake avait entendu le raffut qu'elle faisait.

Il plaça aussitôt son index devant ses lèvres et nous intima le silence.

Takano

— ... Qu'y a-t-il ?

Tomitake

— Chut...

J'ai entendu des bruits, comme un enfant qui ferait de la corde à sauter.

... Il y a peut-être des enfants qui s'amusent près d'ici.

Takano

— ... ... Vraiment ?

Je ne ressens aucune présence dans les environs, pour ma part...

Tomitake

— Non, je t'assure que je l'ai entendu.

Miyo, nous sommes ici incognito, et il faut le rester.

Pense aussi un peu à la position dans laquelle nous mettons Rika ; soyons plus discrets.

Takano fit grise mine, apparemment peu contente d'être stoppée en pleine tirade, mais elle savait qu'il avait raison. Elle renâcla, mais finit par se taire.

Rika

— ... Tomitake,

il n'y a personne autour du temple.

Tomitake

— Comment ?

Tu n'as rien entendu, Rika ?

J'ai vraiment entendu un son, comme si un enfant sautait un peu partout...

Rika

— Oh, ça, le bruit, oui, je l'ai entendu.

Rika

Mais il ne venait pas de l'extérieur, il venait de juste derrière moi.

Rika

Vous dites l'avoir entendu au loin, mais pour moi, c'était tout près, c'était d'ailleurs plutôt désagréable.

Derrière moi se trouvaient l'autel de la déesse, et donc, la statue de la déesse.

En réalisant cela, Tomitake eut l'air de vraiment se sentir mal.

Il riait, mais il riait jaune, et il pâlissait à vue d'œil.

Mais malheureusement, la personne qui aurait dû avoir peur n'eut pas l'air de comprendre l'allusion.

Rika

— ... Takano,

il est interdit d'insulter la déesse Yashiro à l'intérieur du temple.

Elle est très en colère après toi.

Tu n'entends pas sa voix ?

En fait, c'était très bien comme ça.

Hanyû ne disait plus que des “mééé euh” et des murmures boudeurs -- on avait connu plus effrayant.

Et puis de toute façon, c'est le rôle de la prêtresse d'informer les êtres humains de la colère de la déesse.

De par ma naissance, mon rôle était de transmettre la parole de Hanyû.

Je ne sais pas si Takano avait decelé le sérieux de ma requête ou non, mais...

... toujours est-il qu'elle fut bien prompte à se répandre en excuses. Je ne m'attendais vraiment pas à cela.

Takano

— Je te demande pardon, Rika.

Takano

Je crois que je me suis un peu laissée emporter.

Takano

Ô déesse Yashiro, je vous demande pardon, à vous aussi.

Takano

Puisque les humains vous vouent un culte, vous êtes sacrée,

Takano

et quand bien même je ne serais pas l'une de vos fidèles, il n'est pas ma place de vous insulter.

Takano

C'est pourtant ce que je viens de faire, sans trop y réfléchir, et je tiens à m'en excuser.

Rika

— ... La déesse Yashiro adore les sucreries.

Elle acceptera tes offrandes à travers moi. Si tu ne le fais pas, tu seras maudite.

Tomitake se mit à sourire.

Takano aussi sembla prête à rire, mais elle se retint. Après avoir baissé la tête, elle se reprit et annonça vouloir déposer un chou à la crème, plus tard dans la semaine.

Bon, au moins, elle avait cessé ses commérages, et elle avait aussi compris la leçon.

Elle avait même promis une offrande.

Hanyû avait encore les larmes aux yeux, mais elle ne faisait plus de cirque.

Je la vis lancer à Takano un regard noir, puis elle me regarda et tendit le bras, levant trois doigts.

Je dois aussi lui dire ça ?

Je vous jure, être la réincarnation d'une déesse, c'est pas un métier facile tous les jours...

Rika

— La déesse Yashiro te fait savoir que tu devras en offrir au moins trois si tu cherches réellement à obtenir son pardon.

Rika

... Qu'il n'y ait pas de malentendu entre nous : je tiens à préciser que je ne dis pas ça parce que j'ai envie de les manger.

富竹

— *kprrm* AHAHAhahahahahahahahahahaha !

Ils partirent tous les deux dans de grands éclats de rire.

Je suppose qu'ils croient que je fais de l'humour pour détendre l'atmosphère...

Hanyû les regarda, indignée, incapable de comprendre ce qu'ils trouvaient de si drôle.

Pour ma part, je me contentai de me tenir debout, rouge de honte, essayant de maintenir ma contenance.

Takano

— C'est d'accord.

J'achèterai trois choux à la crème pour la déesse Yashiro.

Tu veux que je vous en achète à toi et à Satoko aussi ?

Rika

— Non, je te remercie, ce ne sera pas nécessaire.

... Par contre, en échange, j'aimerais te dire quelque chose. Et j'espère bien que tu m'écouteras.

Takano

— De quoi s'agit-il donc ?

Tu as écouté mon caprice, alors j'en ferai de même, ne t'inquiète pas.

Rika

— ... Je veux que tu croies ce que je vais te dire, sans rien remettre en question.

Rika

Je ne veux pas de “Mais enfin, c'est ridicule” ou de “Pourquoi”.

Rika

Tu dois absolument me croire, pour pouvoir déjouer les plans du Destin. Je veux que tu me sauves.

Tomitake et Takano eurent l'air visiblement très surpris. C'était probablement la première fois qu'ils me voyaient aussi solennelle.

Mais ils ne sont pas encore au bout de leurs surprises.

Je compte bien leur donner une idée précise de la façon dont ils vont mourir.

Ils refuseront certainement d'y croire.

Mais j'ai un avantage, je sais plutôt bien comment ils seront assassinés.

Je pourrai leur donner moult détails. Ils ne riront pas bien longtemps.

... Oh, bien sûr, je l'avais déjà fait par le passé.

Je leur avais déjà annoncé leur mort prochaine. Mais ils ne m'avaient pas crue.

Je me doute bien que la probabilité qu'ils me croient est infime.

Mais pas encore assez pour crier au miracle si cela devait être le cas.

Il me fallait tomber sur la bonne combinaison de dés. C'était prévu dans les règles du jeu.

Jusqu'à présent, tous mes amis ont vaincu leurs démons. J'ai obtenu beaucoup de 6.

Si cela suffit à passer pour un miracle, alors...

... alors je vous en supplie, dieux et déesses, accordez-moi un autre 6.

Laissez-moi leur faire comprendre que la Faucheuse s'apprête à les emporter...