Takano n'avait pas l'endurance nécessaire pour marcher aussi longtemps en montagne ; pourtant, bien qu'à bout de souffle, elle continuait de hurler des ordres aux chiens de montagne par transmission radio. Elle n'avait pas de micro, comme les autres soldats.
Elle devait parler dans un poste, que l'un des soldats portait sur le dos.
Lui entendait absolument tout depuis tout à l'heure, et il commençait à en avoir sérieusement marre.
— ... C'est pas possible,
tous plus incapables les uns que les autres !
Et vous osez prétendre être une unité spéciale ?
Il vous arrive quoi, aujourd'hui ?!
Énervée, elle se mordait la lèvre inférieure et serrait si fort sur ses bras qu'elle s'en laissait des traces d'ongles partout.
D'ailleurs, elle avait vraiment des traces partout sur les bras.
Dans la main gauche, elle tenait l'un des cahiers de notes de recherches de son grand-père.
Elle aurait été incapable de dire depuis quand elle l'avait pris en mains.
Peut-être avait-elle simplement voulu, inconsciemment, retrouver sa présence et sa protection.
Les chiens de montagne avaient déjà subi des pertes immenses.
Promenés par leurs cibles,
tournant en rond dans des zones piégées, subissant piège après piège,
ils commençaient vraiment à se fatiguer et à perdre leur motivation -- même eux.
— ... C'est pas vrai...
le commandant...
ne connaît qu'un seul mot, on dirait...
Hah,
hah...!!
— Bouscarle Chanteuse 1 à Bouscarle Chanteuse 13,
restez sur vos gardes, j'entends plus personne à votre gauche.
Il y a fort à parier que vous allez vous faire attaquer !
— Putain, merde, déconne pas !
Pourquoi moi, hein ? Pourquoi MOI ?
Il n'était pas étonnant outre mesure de le voir aussi nerveux que ça.
Il n'était pas le premier.
Depuis tout à l'heure, ce genre de mises en garde revenait encore et encore, et à chaque fois, les chiens de montagne perdaient un agent...
Et lui serait maintenant le prochain sur la liste !
Alors quoi, ils vont venir sur mes 9h ?
Non, ce serait trop simple, ils ne fonctionnent pas comme ça !
De tout manière, dans ces montagnes, regarder à 360º ne suffit même pas !
Il faut regarder ses pieds, sa tête, le ciel, partout ! Et même là, c'est pas encore assez !
D'où est-ce qu'ils viendront, ces salopards ?
Allez, amenez-vous, qu'on en finisse une fois pour toutes !
L'agent sortit son taser et se retourna dans tous les sens, terrorisé.
Cette arme était très puissante et très pratique, dans des conditions habituelles.
Mais là, il n'était pas dans un couloir ou dans une pièce.
Il était dans une végétation touffue, et l'arme était très difficile à utiliser de manière efficace.
Derrière lui, les buissons se mirent à bouger.
Il se retrouna et tira immédiatement en direction de la silhouette qu'il crut apercevoir.
L'aiguille partit à toute vitesse s'enfoncer dans la végétation, et frappa dans le vide.
Avait-il rêvé cette silhouette ?
Le taser eut soudain un problème.
Le cordon s'était sûrement enroulé quelque part, et il n'arrivait plus à récupérer son aiguille pour réamorcer l'arme !
Il n'avait désormais plus rien pour se protéger !
Soudain, il y eut un nouveau bruit derrière lui,
et cette fois-ci,
une ombre sortit de la végétation en hurlant !
— Ouuuh ! OuuuuuUUUUUH !
— AAAAAAH !
Rah, tu vas voir, espèce de...
C'était ridicule, et pourtant, ça lui avait fait peur.
Il avait tellement peur de tout qu'il ne réfléchissait plus,
et pendant qu'il faisait une fixation sur Hanyû, Satoko passa à l'action !
Elle se trouvait dans l'arbre, au-dessus de lui. Elle laissa tomber un seau en plastique dur.
Celui-ci se retourna en l'air et atteint précisément le crâne de l'agent, s'enfonçant sur sa tête pour lui couper la vue, avec une précision à faire rager de jalousie un tireur d'élite !
— Mais AÏEEUuuh ! Mais c'est quoi, ça !?
Le seau en plastique devait servir à ranger des jouets, car il y avait un dessin bizarre dessus.
C'était un personnage un peu étrange,
comme un animal imaginaire.
Le genre de mascotte que l'on retrouve souvent dans les émissions pour enfants, qui accompagne toujours la présentatrice !
— OOOOooooh mais il est TEEEELLEMENT CHOU !
Je veux le même à la maison !
Rena sortit d'une autre coin de la végétation, pour lui planter son poing dans la figure !
Mais attention, quand je dis “planter”, c'est planter, hein,
carrément à travers le seau !
L'homme tituba en arrière,
et soudain, derrière lui, Keiichi.
Il se tenait...
Hmmm, un peu comme...
Oui, voilà !
Comme un joueur de base-ball qui attend la balle !
Il avait pris la pose, tel un champion !
En se tenant sur une seule jambe !
Un coup frappé très fort n'est pas toujours suffisant pour se débarrasser d'un ennemi.
Mais deux coups portés dans des directions opposées font rapidement des ravages !
Et avec d'un côté le coup de Rena et de l'autre la frappe de Keiichi, la force destructive générée atteignait 11 sur une échelle de 1 à 10 !
— Et un tour de circuit, un !
Le bruit de la batte sur le plastique résonna haut et fort, et l'agent repartit dans l'autre sens, propulsé par la force du coup.
Il tomba en avant et roula plusieurs fois sur lui-même, avant de finir sa course la tête la première sur le sol, un peu plus loin, juste devant Rika.
Celle-ci s'était placée ici depuis tout à l'heure, comme si elle avait su pertinemment que l'agent finirait ici, dans cette position.
— Oooh, le pauvre petit.
Va, va, ça fait plus mal, miaou, miaou☆!
Même à travers le seau, on devinait une énorme bosse que Rika, toute contente, s'efforçait de caresser.
L'agent se demanda pendant un court instant pourquoi elle le traitait si gentiment.
Alors Mion arriva avec l'aiguille du taser, et la lui enfonça dans la cuisse. L'agent eut un sursaut, puis il se ramassa mollement au sol.
— Éhhéhhé !
Et encore un de moins ! Allez, il faut l'attacher, lui aussi !
Aussitôt dit, aussitôt fait : Keiichi et Rena bondirent sur lui, comme s'ils avaient attendu cet ordre depuis le début, et lui attachèrent les bras dans le dos avec du gros fil de fer.
— Ouaiiis !
Ce fut une action collective magnifique, et couronnée de succès !
— Oooohhohhohho !
Oui, tout se déroula à la perfection !
Fort bien, pour le prochain, nous passerons en formation n° 7 !
— Oh oui, oh oui, oh oui !
Et ensuite, on pourra refaire une n° 5 ? Hein ? Hein ?
— Tiens donc, très chère, vous savez apprécier les bonnes choses, à ce que je constate ! Hanyû, je sens que vous avez un don pour les pièges !
Hanyû et Satoko se topèrent dans les mains.
Pendant que Keiichi et Rena faisaient leur office, Rika cherchait.
Elle regardait dans tous les sens en essayant de trouver leur prochaine victime.
— ... Miaou, miaou, mia-miaou, mia-mia-mia-mia-miaou...
Miiip.
Je sens une présence qui se rapproche, depuis cette direction !
Miaou... Miaou ? Miaou !
Ils sont deux !
Et ils ont l'air d'avoir très, très peur ! Nipah☆!
En fait, elle servait de radar à Mion !
Mion, d'ailleurs, ne regardait déjà même plus l'agent qu'ils venaient de vaincre.
Elle regardait la carte des pièges que Satoko lui avait donnée.
Elle était déjà en train de préparer leur prochaine attaque.
Tous les autres se mirent à attendre les ordres avec impatience et excitation.
— Éhhéhhé !
Eh ben alors les enfants, c'est quoi ce regard, là ?
Vous n'en avez pas encore eu assez ?
Hmmm,
bah, faut dire que pour notre club, c'était juste l'échauffement.
Qu'est-ce que vous en dites, on y va pour de vrai ?
On se les fait tous !
« OUAIIIIS ! »
Mion avait des qualités indéniables pour être chef, elle savait commander des troupes, élaborer des stratégies aussi, mais surtout, surtout, elle savait motiver ses troupes comme personne.
À général vaillant, pas de soldats poltrons.
Et les vaillants combattants aux ordres de Mion devenaient des héros de légende, aussi efficaces que toute une armée !
Qui pouvait donc être en mesure de les arrêter ? Personne !
Okonogi ne l'avait pas prise à la légère, mais ses estimations étaient loin du compte.
Il était d'ailleurs en train de s'en rendre compte.
Au début des opérations, il avait calculé le rapport de forces en les considérant chacun comme aussi efficace qu'un peloton entier,
mais il devait revoir ce calcul à la hausse.
À eux tous, ils étaient aussi performants qu'une division de blindés.
Et ce n'était pas avec des fantassins qu'il allait mettre les blindés en déroute.
Surtout que nous, nous ne sommes qu'une compagnie !
Où est le support aérien ? Les canons d'une armada feraient l'affaire, au pire, l'artillerie !
Pilonnez-moi cette montagne jusqu'à en faire du gruyère !
Et si vous ne pouvez pas, demandez à un sous-marin d'envoyer un missile nucléaire à faible charge !
Et si vraiment vous n'avez rien, laissez-nous battre en retraite, merde !
Pour Okonogi, une chose ne faisait aucun doute :
en face, leur commandant était un génie.
Et bien sûr, sous les ordres d'un commandant de cette trempe, chaque soldat devenait un danger !
Il devait savoir qui c'était, obtenir son nom, voir son visage !
Il avait ri en apprenant que Hinamizawa était le village où vivaient les démons...
Mais aujourd'hui, il le regrettait !
Car en face de lui, c'était un démon qui lui tenait tête !
— Bouscarle Chanteuse 13 ne répond plus !
— Phénix 4 ne répond plus !
— Ici Alouette des champs 10 !
J'entends des rires d'enfants, ils viennent de partout !
J-je suis encerclé !
SORTEZ-MOI DE LÀ !
— Alouette des champs 10, repliez-vous immédiatement ! Revenez en arrière !
— Mais c'est OÙ, l'arrière ?!
AAAaaaaaaaah !
— Ici Phénix 9 !
J'ai aperçu R, je la suis ! Envoyez des renforts !
— Phénix 9, où êtes-vous ? On ne vous voit pas !
Décrivez-nous l'endroit !
— ... Il y a du brouillard…
ouh, il fait froid tout d'un coup...
Il y a une rivière pas loin ?
— Phénix 9, d'après la carte, c'est impossible ! Calmez-vous et observez les environs, dites-nous ce que vous voyez !
— C'est pas possible...
de l'autre côté de la rivière, c'est ma sœur... Mais elle est morte il y a des années !
Eh !
— Phénix 9, répondez ! Phénix 9 !
Répondez immédiatement !
... Phénix 9 ne répond plus !
— On n'y arrivera jamais ! Moi je sais ce qu'il se passe, on est en train de s'faire enlever par les démons,
c'est de ça que les gens du coin parlent tout le temps à voix basse !
On va tous se faire bouffer !
— Arrêtez de raconter des conneries !
Que chaque chef d'équipe fasse l'appel et veille à surveiller le moral des troupes !
Ce ne sont pas des démons !!
Je vous rappelle que nous sommes menés en bourriques par des salopards de mioches !
Vous n'avez pas à avoir peur ! Montrez-leur ce que c'est qu'un vrai combattant !
— Ahahaha, hahahahaha, HAHAHAHAHahahaha....
— Eh, vous entendez ça ? C'est qui ?!
C'est pas moi ! C'est pas moi !
— Oh putain, un ours !
Au secouuuuurs !
— Ici Phénix 3,
il y a des ours sauvages par ici ?
Eh, c'était pas dans l'ordre de mission, ça !
Phénix 1, nous devons nous retirer pour prendre un équipement adéquat !
— Mais vous êtes tous stupides ou quoi ?! Je sais que Yago'uchi, c'est l'arrière-pays, mais il n'y a plus d'ours dans la région depuis un moment !
Ce sont des conneries, tout ça, ne vous faites pas avoir !
— ... Misérables mortels !
Êtes-vous donc des créatures si ignorantes que vous ne savez plus quelle est votre place ? Alors sachez que vous commettez le crime de pénétrer en des terres sacrées, sur lesquelles votre simple présence est une intolérable souillure.
Montrez-vous reconnaissant de l'occasion que je vous accorde de vous repentir et de faire amende honorable.
Hmpfhfhfhfhfh...
ahahaha, ahahahahaha...
— Saloperie de merde, ils nous ont piqué un micro !
C'est une manœuvre pour nous déstabiliser, ne les écoutez pas !
— ... Pauvres de vous, simples d'esprits qui ne connaissez pas la peur.
Soit. Puisque seul le châtiment corporel pourra vous servir de leçon, je vais vous apporter le savoir…
— Ici Bouscarle Chanteuse 1 !
Le soldat derrière moi ne me suit plus !
Eh, abruti, où est-ce que t'es, réponds-moi !
— Hmpfhfhfhfh...
Malheur à la bouscarle esseulée, qui, errante, a pénétré dans les terres sacrées.
La curiosité est-elle donc si forte ?
Veut-elle tant connaître le monde des démons ?
Alors fais désormais tes adieux au monde des humains.
Et regrette ton jugement aveuglé qui te poussa à ignorer mes mises en garde...
— ...
Grl... eeeEEEH !
GrKl !
— C'était qui, ça ?! Qui a crié ?!
Bouscarle Chanteuse, faites l'appel !
— ... Grlll...
Grlkk…
grlkaah !!
— On en a encore perdu un !
C'était qui, cette fois ?!
Quartier Général, rassurez-moi, je suis pas tout seul, ici, quand même, hein ?
Y a encore quelqu'un à ma gauche ? Eh, déconnez pas ! Répondez !
— Hmpfhfhfhfh... Veux-tu donc entendre un nouveau cri de souffrance ?
— Kwek ?!
*tschhhhhh*...
— Eh, c'était quoi, ce bruit ?!
Qu'est-ce qui fait un bruit comme ça ?!
— Quand j'étais gamin, j'ai vu un type se jeter sous un train, une fois...
Eh ben ça a fait ce bruit là !
C'est le bruit de tous les os du corps qui craquent !
— Non mais ça va pas, non ?
Je me casse ! J'ai pas envie de crever, moi !
Eh, je sais pas qui vous êtes, mais je vous en supplie, arrêtez !
Je suis pas là parce que j'en ai envie ! J'ai des ordres !
— Bouscarle Chanteuse appelle le Quartier Général,
la situation est intenable !
Les hommes sont à bout et refusent de se battre, risque de mutinerie confirmé !
Nous ne pourrons pas continuer !
Nous perdrons trop d'hommes !
— Bon sang, Bouscarle Chanteuse, calmez-vous !
Vous devriez pourtant savoir que le reste des hommes n'a presqu'aucune expérience du terrain !
Mais toi, agent 1, tu as vécu l'enfer, et tu en es revenu !
Tu dois tenir bon et montrer l'exemple aux autres,
alors ne commence pas à paniquer !
— Quartier Général, Bouscarle Chanteuse 1 ne répond plus !
C'est pas vrai, ils l'ont eu lui aussi ?
Mais on n'y arrivera jamais !
— Rah, saloperie !
Et maintenant, ils viennent nous attaquer psychologiquement !
Ces sales garnements se battent comme de vrais guerilleros ! Ils font même du travail de sape !
Les transmissions radio facilitaient grandement les communications entre chaque unité et permettaient une coordination efficace ; c'était d'habitude une arme très utile, décisive !
Mais c'était justement ce qui allait perdre les chiens de montagne.
En prenant un micro à l'un des agents éliminés, Mion et les autres pouvaient communiquer de fausses informations, ou saper complètement le moral des troupes !
Bien sûr, si l'on prenait la peine de réfléchir un peu, la méthode était un peu ridicule. Mais les hommes se trouvaient en terrain ennemi, ils venaient de traverser des étendues piégées, ils avaient perdu beaucoup des leurs et étaient à bout de nerfs. Alors forcément, c'était très efficace.
Le plus facile pour arrêter cela serait de couper tous les micros, mais cela permettait alors à l'ennemi d'attaquer le restant des troupes un par un sans risque de se faire découvrir !
Okonogi ne put s'empêcher d'avoir des sueurs dans le dos...
Takano, elle, semblait ne rien comprendre à ce qu'il se passait. Elle ne faisait que hurler des ordres, poussant les hommes à avancer sans réfléchir.
C'était ridicule à regarder. Elle faisait partie de ces gros bras qui menaient sans sourciller leurs troupes à l'abattoir...
Et pourtant, ironie suprême, sa stratégie inexistante qui consistait à foncer dans le tas sans réfléchir portait ses fruits.
L'ennemi leur infligeait des pertes phénoménales, mais il reculait, et il serait bientôt coincé et entouré de toutes parts...
L'ennemi les menait de terrain piégé en terrain piégé, depuis tout à l'heure.
Il devait donc obligatoirement abandonner du terrain pour infliger des pertes.
Cela avait bien marché jusqu'à présent -- les chiens de montagne étaient à deux doigts de la débandade -- mais le terrain commençait à manquer !
Et d'ailleurs, le fait de passer à des attaques plus psychologiques était un signe qui ne trompait pas : l'ennemi voyait bien qu'il ne pourrait plus continuer ce petit jeu bien longtemps, et désirait en finir au plus vite.
Si les chiens de montagne se retiraient maintenant, ils auraient subi toutes ces pertes en vain.
C'était rageant, mais il allait devoir faire ce que leur petite princesse leur ordonnait.
Et comme ça, ils pourraient enfin leur mettre le grappin dessus !
Hanyû et Keiichi se passaient le micro et faisaient les idiots devant, à tour de rôle.
— Ouah, Hanyû, tu fais super bien la déesse !
— C'est clair, bien joué Hanyû !
Et puis honnêtement, c'est pas donné à tout le monde de prendre un ton menaçant comme ça !
— En même temps, C'EST une déesse, alors hein...
Nipah☆!
— Mais chuuuuut !
*Ahem*, mais, euh, Keiichi aussi était impressionnant, hein !
Comment tu fais pour imiter le cri de la poule qui se fait étrangler ?
— Oooohhohhohho !
Voyons, très chère, tout cela est enfantin pour lui !
Nous autres avons pour coutume de le surnommer “le tombeur aux lèvres magiques”, c'est dire !
— Eeeeh ouais !
Tant que mon adversaire a des oreilles,
il ne peut pas y échapper !
— Tu devrais devenir un comédien de doublage plus tard, Keiichi.
Je suis sûre que tu obtiendras des rôles dans des séries très connues !
Nipah~☆.
— Vous m'entendez ?
Ici Takano, le Commandant Takano !
Je suis la plus haut gradée parmi vous !
Écoutez-moi bien, il n'y a ici ni démons, ni dieux !
Et si jamais vous deviez en voir sur votre chemin, tuez-les !
Les dieux ne sont pas invincibles, faites-les donc revenir les pieds sur terre !
Alouette des champs et Bouscarle Chanteuse, rejoignez-vous et réorganisez vos troupes.
Phénix, allez retrouver les derniers membres d'Aigrette en état de se battre !
L'ennemi semble avoir établi ses quartiers dans un baraquement des Eaux et Forêts, près du sommet !
Ils sont en hauteur, donc forcément, ils voient nos déplacements !
Ils vont bien sûr tenter d'autres attaques surprises, mais peu importe, rendez-leur coup pour coup !
— Mon Commandant, il nous faut retourner prendre des armes !
Nos tasers ne nous serviront à rien !
— VOUS N'AUREZ PAS cette autorisation, mettez-vous ça dans le crâne !
Nous sommes à deux doigts de les coincer,
si nous nous retirons, ils pourront s'enfuir !
Nous leur avons mis la main dessus, nos doigts sont presque sur leur cou ! Nous n'aurons bientôt plus qu'à serrer !
Laissant Takano hurler dans le poste de transmission, Okonogi fit quelques pas en arrière.
Il avait vu un signal, une ligne allumée, sur une fréquence jamais utilisée d'habitude. Quelqu'un voulait lui dire quelque chose en privé.
Il s'éloigna encore de quelques pas et répondit à voix basse à l'agent du standard.
— Phénix 1 ? Ici le véhicule des communications.
Nous avons une urgence.
On dirait bien que l'étage au sous-sol de la clinique a été attaqué.
L'alarme anti-intrus s'est déclenchée, mais elle a été arrêtée manuellement.
Les procédures en cas de fausse alerte n'ont pas été respectées.
J'essaie de joindre le centre depuis tout à l'heure, mais personne ne répond.
Ni les gardes du rez-de-chaussée, ni les gardes de la salle de sécurité.
— ... ... ...
Oh putain...
ahahaha, ahahahahahaha !
Okonogi comprit enfin quelle était la situation.
Ils s'étaient fait berner comme des débutants.
Bien sûr, il avait envisagé la possibilité d'une manœuvre de diversion.
Mais il avait laissé ses meilleurs hommes, les plus armés, à la clinique. Il n'aurait jamais cru une petite unité capable de les prendre d'assaut par surprise avec succès !
S'il avait eu des hommes en treillis en face de lui, il aurait tout deviné en quelques minutes.
Mais il savait qu'il recherchait un groupe de mouftons. Il ne les avait pas pris au sérieux...
Maintenant qu'il savait cela, une chose lui apparut clairement.
Il se rendit compte que depuis le début, il n'avait pas vu un seul adulte dans la montagne. Et désormais, il savait pourquoi.
— ... D'accord, j'ai compris.
Vous l'avez signalé à Coucou Gris à Tôkyô ?
— Non, pas encore.
Vous voulez que je le fasse ?
— ... Ouais.
Dis-lui que l'ennemi nous a repris Tomitake et a pris la fuite.
Nous avons placé des gars en bordure du village pour barrer les routes... mais je ne pense pas qu'ils les arrêteront.
Si ces gens ont pu prendre d'assaut nos troupes lourdement armées, ce sera dur de les arrêter avec juste un RPG...
— Vous pensez envoyer des renforts aux équipes qui font barrage ?
— Ne raconte pas de bêtises, on n'a plus personne, notre princesse a embarqué tout le monde !
Les seuls qui ont les mains libres, ce sont vous, aux transmissions.
Prends contact avec les barrages routiers,
dis-leur de se tenir prêts.
— Bien reçu.
— D'accord, on va redoubler de vigilance.
Bon, les gars, écoutez-moi tous ! La clinique a été attaquée, et on nous a repris notre otage.
L'ennemi va probablement tenter de passer en force dans un quelconque véhicule motorisé.
Préparez le RPG, on va en avoir besoin.
Les autres, prenez vos armes et préparez-vous à les cribler de pruneaux.
Nous avons l'autorisation de tuer !
L'un des agents alla chercher une valise dans un véhicule arrêté sur le bas-côté.
L'ouvrant, il en sortit une arme de guerre, un lance-grenade anti-char portatif... Un RPG-7.
On dit souvent que cette arme a changé la face du monde.
Elle a une portée de quelques centaines de mètres, et peut occasionner des dégâts irréparables à n'importe quel blindé.
Grâce à l'apparition de cette arme, un fantassin devenait aussi puissant et destructeur qu'un véhicule blindé.
Et ça,
c'était une petite révolution dans le monde répétitif de la guerre...
Les quatre autres agents prirent en mains leur MP5 -- la même arme que celle qui avait détruit les pneus de la voiture du docteur Irie en une seule rafale.
Ils avaient donc une puissance de feu indéniable, largement de quoi stopper n'importe quel véhicule privé.
Ils restaient cachés dans la camionnette, prêts à bondir si une voiture suspecte devait passer.
À l'évidence, ils comptaient détruire leur cible avec toute cette puissance de feu.
Très prudents, ils scrutaient depuis l'arrière de leur camionnette si un véhicule ne venait pas depuis Hinamizawa.
Il n'y avait qu'une seule route qui reliait Hinamizawa à Okinomiya.
Enfin, une seule route rapide : on pouvait passer par d'autres petits villages de montagne, mais cela revenait à faire un détour de plusieurs heures.
Et sur cette route unique, il y avait un endroit que les gens appelaient “la frontière” : l'endroit où le chemin de gravillons devenait une vraie route avec du bitume. C'était le dernier endroit où il était possible d'arrêter quiconque tenterait de quitter le village.
Hinamizawa étant situé un peu plus en hauteur, l'ennemi venait à eux en descendant la côte.
De plus, il devait bien se douter qu'il y aurait une sorte de barrage et que les chiens de montagne seraient lourdement armés.
L'ennemi était donc plus ou moins obligé de passer en force.
L'autre solution serait d'engager le combat armé, ce qui pouvait provoquer des morts et faire perdre beaucoup de temps.
Et comme l'ennemi était pressé de rejoindre Okinomiya, le moyen à employer semblait évident.
Il y eut une longue plainte sourde.
L'estomac de quelqu'un venait de réclamer pitance, mais aucun des agents ne se moqua.
D'une, c'était naturel d'avoir faim, et de deux, l'urgence de la situation ne prêtait pas à en rire.
La montre indiquait quasiment midi.
Pas étonnant d'avoir faim, à une heure pareille...
Soudain, le vrombissement d'un gros moteur se fit entendre depuis la direction de Hinamizawa.
C'était un véhicule assez gros, et il était lancé à toute allure, ça ne faisait pas l'ombre d'un doute.
— Ils arrivent !
Le conducteur passa la première et sortit du bas-côté pour se garer à la perpendiculaire, en plein sur la route.
Les soldats sortirent du véhicule et allèrent se cacher soit derrière, en coin, soit dans la végétation au bord de la route, suivant de la pointe du canon de leurs armes le nuage de poussière déclenché par la course folle de la voiture qui s'approchait.
Oui, elle allait vraiment très vite.
Mais ici, la route était en ligne droite, et elle était bien dégagée.
Même lancée à pleine vitesse, ils n'auraient aucun mal à la viser !
La voiture qui arrivait était celle de Kasai.
C'est une belle berline noire, luxueuse, à la carosserie impeccable, et le ronronnement du moteur en disait long sur ses qualités.
— Laissez approcher au maximum !
On ne pourra tirer qu'une seule fois,
alors il faut être sûr de les toucher !
Le RPG-7 est une arme qui tire des missiles sans tête chercheuse.
Il est normalement très difficile d'atteindre une cible en mouvement, surtout si celle-ci est très véloce.
Mais ici, rapide ou pas, l'ennemi se trouvait pile en face.
Si le conducteur mettait un coup de volant brusque pour éviter le tir, il ferait des embardées.
Donc en fait, les chiens de montagne n'avaient même pas besoin d'atteindre leur cible...
De plus, si la puissance du missile était telle que Kasai l'avait décrite, alors même si l'explosion avait lieu juste à côté ou juste devant la voiture, celle-ci serait projetée et retournée dans les airs.
Donc même s'ils n'avaient qu'une seule chance, le fait d'être les premiers à attaquer leur donnait un avantage immense.
— M. Tomitake, un véhicule suspect bloque la route au loin.
Couchez-vous !
— Faites attention, et souvenez-vous !
Il faut viser l'avant du véhicule et lui rentrer dedans !
— Oui, je sais,
j'ai déjà vécu ce genre de situations !
Les hommes pointèrent tous leurs viseurs sur la voiture qui leur fonçait droit dessus...
— Attendez encore !
Jusqu'à 100m, et ensuite seulement !
— Je sais !
Regardez bien dans les jumelles et surveillez la distance !
L'homme armé du RPG se plaça de façon à être très près du sol, pas vraiment rampant, mais presque. C'était la position la plus stable pour tirer.
Au bout de son arme, la roquette rouge brillait d'une lueur dérangeante, comme la langue d'un animal excité de voir une proie unique en son genre...
— 200m...
150...
Préparez-vous à tirer !
L'agent plaça son doigt sur la gachette du RPG...
— Alllleeeeeeez !
— Attention, Akasaka, préparez-vous au choc !
— Plus que 100m !
TIRE !
...
... ?
Pas de tir.
Un problème mécanique ?
L'agent retira ses jumelles et regarda celui qui devait tirer. Aussitôt, la panique le saisit !
Le RPG était laissé de côté, l'homme se tenant l'épaule avec des spasmes de douleur !
— Ils ont un tireur d'élite !
Il n'y a pas eu de bruit de balle, ils sont à plus de 400m !
— C'est pas la question, tirez, tirez, TIREZ !
Ils devaient l'arrêter avec leurs pistolets mitrailleurs !
Tous les soldats tirèrent à l'unisson sur leur cible, l'arrosant de balles !
Mais très vite, ils se rendirent compte que quelque chose clochait.
À cette distance, un tel tir groupé devrait percer n'importe quel véhicule et provoquer un incendie de moteur.
Mais cette bagnole n'avait rien !
Pourquoi ?!
— Les pauvres... Ben oui, les enfants,
c'est la limousine blindée des grands pontes Sonozaki, forcément que vos balles ne-
Kasai !
Un autre a ramassé le RPG,
ne le laisse pas tirer !
— Allons,
Mademoiselle, vous ne croyez quand même pas que je vais le rater à cette distance ?
Shion et Kasai étaient positionnés très loin, sur le toit d'une voiture abandonnée.
De par la configuration du terrain, les hommes des chiens de montagne, placés en contrebas, ne voyaient qu'une colline.
Shion était sur ses coudes, observant la situation avec des jumelles militaires de haute précision.
Kasai, quant à lui, était couché de tout son long sur le toit, tenant une arme avec une lunette de visée très reconnaissable : un fusil de précision !
Shion connaissant bien la région, elle avait deviné que le meilleur endroit pour barrer la route était quelque part sur cette longue ligne droite, et que s'ils voulaient neutraliser le barrage, ils devraient l'attaquer de très loin.
Or, Kasai et elle avaient été formés en Amérique, pendant la guerre du barrage, et leur entraînement, ce n'était pas du flan !
Dans la ligne de mire de Kasai, un homme s'affairait à ramasser le RPG pour pouvoir tirer à son tour !
— Allez, tire, vite ! Explose-moi cette bagnole !
Quoi ?!
Encore une fois, le RPG tomba à terre et roula dans l'herbe. Le deuxième agent qui avait voulu tirer se tenait lui aussi l'épaule en se tordant de douleur !
... À chaque fois, une blessure à l'épaule.
Bien sûr, c'était grave, mais a priori pas mortel. Juste suffisamment grave pour rendre l'agent inopérant !
La voiture était désormais tout près !
Les hommes plongèrent sur le côté, pour ne pas se faire écraser !
Akasaka était vraiment rôdé à ce genre de manœuvres dangereuses.
Heurtant de plein fouet l'avant de la camionnette, il la délogea sans merci et passa le barrage sans encombre !
Celle-ci fit presque tout un cercle sur elle-même sous la force du choc.
— Continuez à tirer !
On y va !
Les agents tentèrent de regagner leurs véhicules, mais ils essuyèrent des tirs de Kasai !
— Le bruit du tir nous parvient bien après l'impact de la balle, ils nous canardent depuis très loin !
C'est un tireur d'élite avec un sacré entraînement derrière lui !
— Il doit avoir un excellent partenaire pour observer nos positions !
Les tirs sont trop précis,
ils peuvent certainement observer tous nos mouvements !
La lunette de visée d'un fusil de précision est en fait tellement précise qu'elle ne permet de voir qu'une toute petite portion du terrain. Il est donc très difficile de pouvoir réagir en cas d'urgence.
C'est pourquoi les tireurs d'élite étaient toujours accompagnés par un autre soldat qui observait tout l'horizon.
Celui-ci pouvait analyser la situation et donner des ordres précis aux tireurs.
C'était la raison pour laquelle un tireur d'élite ne devait jamais agir seul.
Ce n'était qu'avec un partenaire approprié qu'il pouvait faire la démonstration éclatante de tout son talent !
À chaque fois qu'un soldat tentait de rejoindre le véhicule,
une balle supersonique venait s'écraser tout près.
Le bruit très particulier de ces balles est bien différent des autres.
Une balle supersonique va, comme son nom l'indique, plus vite que le son. Elle déchire l'air autour d'elle, comme la faux de la Mort en personne !
Et le pire, c'est que généralement, le tireur d'élite vous voit parfaitement alors que vous, vous ne pouvez pas savoir où il se trouve !
La peur que cela inspire doit être vécue pour être comprise, mais elle est proprement terrifiante !
— On peut pas se rapprocher !
Tant pis, allez-y sans nous, les laissez pas filer !
— OK, on ira à deux !
Il n'y avait que le conducteur et un seul tireur, c'était bien peu !
Mais s'ils ne se lançaient pas maintenant à leur poursuite, ils laisseraient filer Akasaka et Tomitake !
Le conducteur prit immédiatement les devants et démarra.
— Alors, ils nous suivent ou pas ?
— ... Oui,
ils nous suivent.
Rah, leur conducteur est vraiment doué. Il arrive à nous reprendre du terrain, même avec sa camionnette !
— Ahahahaha, ah, ben là, c'est la honte pour moi, mais il faut savoir s'avouer vaincu.
Je compte sur vous pour les contrer !
— Pas de problème, laissez-moi faire.
Tomitake ouvrit la fenêtre à côté de lui, au niveau de la banquette arrière, puis hissa son corps dehors.
La chaleur de midi s'engouffra immédiatement dans l'habitacle.
Malgré les nids de poules et le tangage, Tomitake examina soigneusement son arme, comme si de rien n'était.
Il la manipulait sans se presser, tout naturellement.
Il n'avait pas l'air spécialement intéressé ou excité par cette vérification -- comme s'il ne faisait rien d'autre que vérifier son appareil photo.
L'arme qu'il avait dans les mains, il l'avait volée à l'institut, avant de fuir.
Dans le véhicule à leurs trousses, l'agent qui ne conduisait pas avait la même arme, et se tenait prêt à tirer.
Ils étaient donc parfaitement à égalité !
La longue ligne droite prit fin, et la route se mit à faire des lacets.
À cause des virages très serrés et des pentes parfois abruptes, tous les petits objets à l'intérieur des véhicules valdinguaient dans tous les sens.
Il était franchement très difficile d'attaquer dans des conditions pareilles.
Tomitake savait que tirer sans réfléchir allait lui faire gaspiller ses munitions. Il jaugeait la distance, encore et encore, mais sans tirer.
Mais son comportement fit croire à ses poursuivants qu'ils n'étaient pas encore à portée, et ils cherchèrent à se rapprocher.
Les chiens de montagne, eux, justement, semblaient avoir cédé à la pression et à la nervosité.
Ils tiraient, encore et encore, alors que la route bougeait dans tous les sens et que l'on voyait bien que les balles passaient complètement à côté.
Parfois, presque par hasard, une balle touchait la carosserie et déclenchait un son métallique très sinistre.
— Tomitake, ne restez pas dehors, c'est dangereux !
— Ne vous en faites pas,
ils ne savent pas viser.
S'ils étaient sous mes ordres, je les enverrai au camp pour réapprendre à tirer.
Il faut savoir lire le mouvement de la cible.
Regarder la route, prévoir la position du véhicule, et tirer en conséquence, toujours un peu en avant des positions.
Il ne faut pas tirer là où se trouve la cible, justement parce qu'elle se déplace.
Il faut tirer de façon à ce que la cible avance d'elle-même dans les balles.
Comme ça !
Tomitake pointa son arme, attendit un peu, puis pressa la détente.
Il avait une forme, une pose, une méthode vraiment très orthodoxe. Au premier regard, ceux qui savaient tirer ne pouvaient que lui faire des compliments.
Il se tenait très bien, et arrivait à stabiliser son arme même pendant les virages serrés.
Il ne tirait pas trop, se laissait le temps de reviser sa cible.
Même dans sa position étrange, le corps à moitié en dehors de l'habitacle,
Tomitake sut tirer son épingle du jeu, et réussir à faire preuve d'une précision vraiment surprenante !
C'était tout le contraire de son adversaire, il ne tirait pas dans le tas en espérant qu'une balle où l'autre irait se perdre là où il fallait.
Il tirait là où il voulait atteindre sa cible, et il réussissait.
Comme si lui avait eu une arme bien meilleure dans les mains !
Le bruit effroyable des balles ricochant sur la tôle de la camionnette en disait long sur l'adresse de Tomitake.
— Put-- Rah, c'est pas vrai, mais il tire comme un pro, c'est pas possible !
Je croyais que c'était un gratte-papier ?
— ... J'en sais trop rien,
mais une fois, je sais plus qui m'a raconté que le Lieutenant Tomitake était passé dans l'administration à cause d'un accident sur le terrain. Avant, il était instructeur militaire dans un camp d'entraînement des forces spéciales…
— Quoi ?
Mais alors, c'est lui qui formait les autres au tir ? Eeeeeh !
Tomitake tirait de plus en plus près du siège du conducteur, comme pour les pousser à abandonner.
Les deux hommes se regardèrent. Ils savaient qu'ils n'avaient pas l'avantage.
Tomitake réussissait à garder une précision diabolique, malgré les virages et les mouvements de son véhicule.
En plus, il était dans une limousine blindée,
alors qu'eux étaient dans une bête camionnette.
Et en plus, comme ils étaient derrière, Tomitake pouvait directement tirer sur le conducteur.
Surtout qu'il n'avait pas tiré pour tuer, selon toute vraisemblance, mais juste pour leur faire peur.
S'ils continuaient à ce rythme-là, ça pouvait très mal se finir... pour eux !
Ils n'avaient aucune chance de gagner !
— ... Phénix 1 au véhicule en chasse.
Si l'ennemi a dépassé le barrage, tant pis,
ne les suivez pas.
Tomitake est un tireur hors pair !
Vous avez toutes les chances de vous faire tuer !
— ... On
fait quoi ?
On le laisse filer, ou pas ?
— …
Pas le choix... Bien reçu, Phénix 1.
Abandonnons la poursuite. Nous rentrons au nid !
— Ahahahaha !
Eh bien, on dirait qu'ils ont compris.
Ils ont arrêté d'accélérer. Ils abandonnent.
— Pouh...
Et vous, dites donc, vous êtes bien calme malgré tout ce qu'il vient de nous arriver.
Vous en avez vu tellement d'autres que ça ?
— Ahahahahahaha !
Mais non, j'ai juste beaucoup d'entraînement, c'est tout !
Tomitake se remit assis correctement sur la banquette arrière, faisant une petite pose victorieuse dans le rétroviseur.
Il avait l'air imperturbable, même après s'être fait tellement canarder !
Akasaka découvrait là un homme décidément bien étrange...
— Lieutenant Tomitake !
Vous êtes sain et sauf ? Nous n'arrivions pas à vous joindre, nous nous sommes fait du souci !
Tomitake se trouvait aux abords d'Okinomiya, dans une cabine téléphonique.
Elle fonctionnait, ce qui signifiait qu'elle ne faisait pas partie du réseau trafiqué par les chiens de montagne.
Il avait immédiatement appelé Tôkyô.
Tomitake se mit à tout raconter à ses hommes. Comment il avait été retrouvé, à cause de l'espion à Tôkyô.
Comment il avait été fait prisonnier, comment il avait été libéré.
Il expliqua aussi où était le reste des troupes d'Okonogi, à pourchasser un groupe qui faisait diversion dans la montagne.
Il raconta aussi tout ce que le commandant Takano lui avait dit, à propos de Mme Nomura et des gens qui tiraient les ficelles.
Puis il donna son analyse et ses conclusions.
— Il nous faut impérativement arrêter l'Institut Irie, par la force, et immédiatement.
Les hommes de l'institut ont déjà tiré à plusieurs reprises, en plein air. Les villageois finiront par se poser des questions, c'est inévitable.
Je demande avec insistance l'envoi des troupes des chiens de garde !
— Oui, allô ? Ici le colonel Oka !
Je suis content de vous savoir en vie, Tomitake !
En fait, nous avons déjà envoyé les chiens de garde, ils sont stationnés environ 30km au sud des terres de Hinamizawa. Ils attendent les ordres !
Nos supérieurs aussi ont demandé l'envoi immédiat des troupes, mais apparemment, il y a eu pas mal de gens pour essayer de calmer le jeu et de faire comme si rien ne s'était passé !
Heureusement que tu es vivant, ça va nous faciliter la tâche !
J'ai fait transmettre tout ce que tu as dit aux grands patrons.
J'imagine que l'ordre sera donné dans la foulée,
donc attends-toi à les voir débarquer d'ici une vingtaine de minutes !
Ah, je viens de voir qu'un mandat d'arrêt venait d'être lancé contre le lieutenant Okonogi et le commandant Takano !
Et ça y est ! Ordre a été donné de maîtriser les troupes de l'institut, et de les désarmer !
Haha, bien joué, Tomitake !
Tomitake raccrocha, puis sortit de la cabine téléphonique.
— Alors ? Ça y est, c'est réglé ?
— Oui.
Les chiens de garde ont eu l'ordre de venir maîtriser les troupes de l'institut.
Il paraît qu'ils sont déjà héliportés, ils attendent au sud, pas très loin. Ils passeront à l'attaque d'ici une vingtaine de minutes.
— Et... ils sont forts, ces soldats ?
Je veux dire, vraiment forts ?
— Les chiens de montagne sont une équipe de techniciens, entraînés à tout faire pour maintenir le secret sur les recherches. Les chiens de garde sont des troupes entraînées uniquement au combat.
Elles ont un armement sans commune mesure avec le reste des troupes.
Je pense que tout sera fini en quelques secondes.
Akasaka regarda sa montre.
Il allait bientôt être midi trente.
Et les chiens de garde seraient là dans vingt minutes, peut-être moins.
Il se souvint qu'il avait faim.
Oui, c'était l'heure, d'habitude.
Il pourrait trouver un restaurant...
Et le temps de terminer ses nouilles sômen, bien froides, tout serait déjà terminé.
C'était bien peu de temps par rapport aux heures que les chiens de montagne avaient passé à leur courir après et à se battre.
Il n'y avait que peu d'habitations ici, espacées par des champs entiers de dents-de-lion. C'était la frontière entre la ville et le village.
Il avait fait très chaud jusqu'à présent, mais de minces nuages argentés avaient fait leur apparition et apportaient un vent frais.
... Il allait pleuvoir. Pas beaucoup, mais une petite averse.
Ni Akasaka, ni Tomitake n'avait vraiment compté combien de fois ils avaient évité la mort de peu depuis ce matin.
D'un seul coup, c'était très tentant de simplement rester là et d'attendre la pluie...
Pendant quelques secondes, le silence s'installa, chacun regardant paisiblement la nature.
Puis Akasaka posa la question.
— Alors, vous faites quoi, maintenant ?
— Pardon ?
Vous faites quoi, quoi ?
— Eh bien... En fait, je comptais repartir pour Hinamizawa.
Après tout, les enfants sont encore en train de se battre, eux.
— ... Oui, c'est vrai.
Mais, vous êtes sûr que c'est ce que vous voulez faire ?
Ce serait bête d'y retourner et de vous faire tuer !
— Oui, mais je sais que Rika m'attend et qu'elle compte sur moi.
Je n'ai pas encore tenu ma promesse.
— ... ... D'accord, en ce cas, allons-y.
De toute façon, moi aussi, j'ai des choses importantes à faire là-bas.
Je voulais justement y retourner.
Dites, vous avez déjà pris l'hélicoptère ?
Les chiens de garde passent me prendre, en fait...
Après avoir regardé le vent jouer dans les herbes et les faire bouger comme la houle sur la mer, les deux hommes remontèrent dans la limousine éraflée.
Elle démarra en trombe et repartit dans la direction opposée.
Il n'était qu'à peine un peu plus que midi.
Il restait encore de nombreuses heures avant le début de la fête de la purification du coton...