Satoko

— Tiens donc, mais que vous arrive-t-il ce matin, très chère ?

Vous ne me semblez pas comme à votre habitude.

Rika

— ... Ah oui ?

J'ai l'air bizarre, peut-être ?

Satoko

— Hmmm, je ne saurais le décrire avec précision, mais...

Comment dire...

Vous me semblez un peu plus adulte.

Hanyû

— Allons, Satoko,

Rika est une grande fille,

tu sais☆?

Rika

— Hanyû, s'il te plaît, je n'ai pas les nerfs pour supporter ça aujourd'hui.

Rika

Désolée, Satoko, mais c'est valable pour toi aussi,

Rika

j'ai pas envie de faire de bêtises aujourd'hui.

Rika

... Et d'ailleurs, c'est valable pour toute la semaine.

Satoko me regarda avec un air bizarre, un peu interdite.

Elle devait sûrement se demander ce qu'il m'arrivait.

... J'avais la ferme intention de tout leur dire, aujourd'hui, mais franchement, je ne savais pas trop comment mettre le sujet sur la table.

Ils aiment tous la déconnade, donc si jamais ils s'imaginent que je leur fais une blague, je n'arriverai plus à rien avec eux.

... Je devais absolument trouver un moyen pour les pousser à m'écouter sérieusement, mais que faire ?

Satoko

— Bonjour, Maîtresse !

Tiens donc, Chef, je ne m'attendais point à votre présence !

Bien le bonjour à vous aussi !

Irie

— Bonjour, vous deux.

Hmm ? Mais que vois-je ?

Irie

Vous ne portez pas vos coiffes de soubrettes ?

C'est un grave manquement au règlement interne de cette école, vous serez donc châtiées !

Cie

— Monsieur Irie !

Je vous ai déjà demandé de cesser ces inepties lorsque vous venez chez nous !

Satoko

— Chef,

il se trouve que notre chère Rika se comporte bien bizarrement depuis ce matin, je soupçonne une baisse de forme.

Auriez-vous l'obligeance de bien vouloir l'examiner ?

Irie

— Ah bon ? Mais que t'arrive-t-il, Rika ?

Tu as pris froid ?

... Je ne sais pas comment expliquer la situation aux autres, mais Irie est de notre côté depuis toujours, j'ai nettement moins de choses à lui expliquer.

Je pourrai sûrement lui en parler sans tourner autour du pot.

De toute façon, si je commence à me creuser la tête pour savoir comment tout expliquer aux autres, j'ai pas fini avant un moment.

Je ferais mieux de commencer par lui, ça sera déjà ça de fait.

Hanyû me lança un regard approbateur qui en disait long sur ce qu'elle en pensait.

Hanyû

— Eh, eh, Satoko, Satoko, viens, viens, on va trafiquer la chaise de Keiichi avant qu'il n'arrive !

Satoko

— Oooohhohhohho !

Très chère, ne soyez pas si vulgaire, voyons !

Nous allons poser des pièges, ce n'est pas la même chose ! Venez ! Je vais vous montrer comment faire !

Hanyû

— Ouaiiiiiiiis !

Hanyû et Satoko partirent en courant vers la salle de classe, tout excitées.

J'imagine que Hanyû a fait exprès d'inviter Satoko ailleurs.

Autant en profiter.

Rika

— ... Ne restons pas dans le chemin, Irie, allons à l'infirmerie.

Irie

— Ah, oui, bien sûr, pourquoi pas ?

Allons-y.

Apparemment, Irie semblait penser que cela avait un rapport avec le syndrome de Hinamizawa. Il fut très conciliant.

En même temps, mon état de santé était un indicateur extrêmement important pour lui.

Même si ce n'était pas grand'chose, cela pouvait avoir des effets catastrophiques sur le village, aussi était-il toujours très attentif avec moi.

Irie

— Alors, que se passe-t-il ?

Vous ne vous sentez pas bien ?

Rika

— ... Irie,

je sais que ça va sembler bizarre, mais je veux que tu m'écoutes jusqu'au bout.

J'ai une question très importante à poser, et je suis extrêmement sérieuse.

Je pris mon air le plus sérieux possible, puis me mis à le dévisager tranquillement.

Irie était plutôt du genre à détendre l'atmosphère, mais il savait aussi rester sérieux lorsqu'il voyait que cela était nécessaire.

Il remarqua bien vite que j'étais beaucoup plus sérieuse qu'à l'accoutumée, et prit alors, lui aussi, un air très posé.

Bon.

Maintenant, comment faire pour amener la conversation... ... ...

Rika

— Irie,

est-ce que je suis la Reine Mère ?

Irie

— Oui.

Le parasite que contient votre corps est différent de tous les autres au village.

Rika

— ... Admettons. Si je meurs, il se passe quoi ?

Irie

— ... Il me semble en avoir déjà parlé : si vous mourez, ce sera terrible pour le village.

Irie

Enfin, non, en fait, on ne le sait pas, mais on suppose que ce sera terrible pour le village.

Irie

Nous ne pourrons jamais le savoir, puisque vous devez mourir pour nous montrer si nos théories sont justes ou fausses.

Irie

Mais nous savons que par exemple, dans d'autres communautés, lorsque la personne qui est un peu la Reine Mère de la ruche meurt, les autres gens organisent des suicides collectifs, certains deviennent fous et se comportent comme si c'était la fin du monde.

Irie

... Je dois dire que c'est plutôt Mme Takano qui est la spécialiste sur cette question.

Il vaut mieux que vous ailliez lui poser la question directement,

je ne pense pas pouvoir vous être d'un grand secours.

Donc en fait, Takano était la mieux placée pour savoir que si je mourais,

ce serait une catastrophe.

... En fait, je comprenais de moins en moins pourquoi est-ce qu'elle voudrait me tuer...

Mais je savais aussi que toute seule, j'aurais beau me creuser la tête, je ne trouverais pas la solution.

Or, j'avais justement Irie sous la main.

Lui en saura peut-être plus.

Autant lui poser la question, ça me fera perdre moins de temps.

Rika

— ... Irie,

j'aimerais obtenir une réponse franche.

À ton avis, est-ce que quelqu'un pourrait tirer profit de ma mort ?

Irie

— Quoi ?!

Comment, en vous tuant ?

Mais qui voudr--

Rika

— IRIE, J'AI DIT que j'aimerais obtenir une réponse franche, alors ne change pas de sujet et réponds-moi.

Irie

— ... Hmm, oui, bon, d'accord, c'est vrai.

... Franchement dit, non.

Je ne pense pas qu'il y ait quelqu'un qui pourrait tirer un quelconque avantage de votre mort.

Irie

Je sais que je viens de le dire, mais j'insiste : si jamais il arrivait malheur à la Reine Mère, les autres villageois feraient une crise aiguë dans les 48h et atteindraient tous le stade terminal de la maladie.

Irie

C'est surtout ça qui nous préoccupe, c'est le plus grand danger potentiel du syndrome de Hinamizawa.

Irie

Si chaque individu devient violent et paranoïaque, nous aurons des problèmes à une échelle inimaginable.

Rika

— Et personne ne pourrait trouver un intérêt à déclencher cette situation catastrophe ?

Irie

— Non, absolument personne, Rika.

Vous tuer vous revient à condamner à mort les 2000 personnes qui vivent au village.

Ce n'est pas envisageable, même pas pour une blague de mauvais goût.

Rika

— ... Si je meurs, les habitants de Hinamizawa vont se méfier les uns des autres, ils deviendront fous, ils risquent de se tuer entre eux.

Rika

... Ce serait une fin très appropriée pour un village dans lequel les gens croient qu'ils sont les descendants des démons des enfers.

... Eh mais, tout bêtement, ce ne serait pas ça, le motif de Takano ?

Tout le monde sait bien qu'elle aime les histoires sanglantes et qu'elle a un côté sadique.

Elle a épluché l'histoire sombre du village, et elle a même laissé entendre qu'elle aimerait voir les démons mangeurs d'hommes à l'œuvre.

Si elle voulait me tuer pour justement déclencher ces scènes apocalyptiques, ça ne m'étonnerait qu'à moitié...

Irie

— Bien sûr, c'est le cas de figure le plus terrible que nous avons envisagé.

C'est pourquoi nous avons dû deviser un plan B, au cas où il vous arriverait malheur.

Rika

— ... Un plan B ?

C'est bien la première fois que j'apprends ça.

Irie

— Ça ne m'étonne guère, puisque c'est la première fois que je vous en parle.

Irie

Ce n'est pas exactement le genre de choses dont on peut parler dans une banale conversation.

Irie

La mission la plus importante de l'Institut Irie est d'assurer la protection et la survie de la Reine Mère.

Irie

Si jamais il devait vous arriver malheur, nous avons un plan de secours pour parer au plus pressé.

Ce n'était pas étonnant. Si les 2000 villageois perdaient la tête tous en même temps, qui savait combien de victimes cela occasionnerait ?

Et si la situation était prévisible, autant préparer de quoi y remédier.

Irie

— Nous avons des manuels, des listes de consignes d'urgence à respecter, selon la situation.

Irie

Si le pire devait arriver -- donc, si la Reine Mère devait mourir dans un accident ou autre -- eh bien, nous devrions appliquer le manuel n°  34.

Rika

— ... Et il dit quoi, ce manuel ?

Irie

— En gros, il nous ordonne de... de disposer de tous les villageois avant qu'ils puissent atteindre le stade terminal.

Irie

L'Armée de Terre viendra d'abord placer le village en quarantaine, puis les soldats répandront du gaz mortel partout et tueront tout le monde.

Rika

— ... ... Ah ouais quand même. Ça aussi, c'est la première fois que j'en entends parler.

Irie

— Oui, je sais, et je vous demande pardon.

Mais ce n'est pas vraiment mon sujet de conversation préféré.

Jusqu'à présent, je ne m'étais jamais trop préoccupée de savoir ce qu'il se passerait après ma mort.

Après moi, les mouches.

Je ne savais pas qu'un tel désastre arrivait à chaque fois après mon décès.

Non, en fait, c'est ma mort qui déclenche cette catastrophe, c'est encore pire !

Si mes ennemis peuvent raser tout un village de la surface de la planète, j'imagine que tuer une petite fille, c'est largement dans leurs cordes.

Hanyû m'a dit de demander de l'aide, mais je me demande si ça servira à quelque chose...

Et puis surtout, à cause de ce manuel, je perds le mobile de Takano.

Je croyais qu'elle voulait recréer l'enfer sur terre, un village où des gens fous iraient s'étriper les uns les autres.

J'aurais pu, à la rigueur, tenir ça pour un mobile plausible, mais d'après ce que venait de me dire Irie, ça n'arriverait jamais.

Tout simplement parce qu'elle avait l'ordre de gazer tout le monde avant que ce fût le cas.

Alors bon, je ne suis pas dans sa tête non plus, mais à mon avis, ça ne doit trop lui plaire.

Je veux dire, si elle haïssait les habitants au point de vouloir tous les tuer et que c'était ça qui la motivait, je l'aurais déjà su. Il y a forcément autre chose.

Rika

— ... Vous croyez que Takano pourrait ordonner aux chiens de montagne de m'exécuter ?

Irie

— Ne dites pas de bêtises, voyons !

Irie

C'est impossible.

Irie

Mme Takano est celle qui prend votre protection et votre santé le plus à cœur ! D'ailleurs, l'une des missions les plus importantes des chiens de montagne est d'assurer votre protection !

Irie

Non, Rika, c'est absolument impossible.

Rika

— ... Irie,

imaginons quand même que ce soit le cas. Quel mobile pourrait-elle avoir ?

Irie

— Eh bien, je ne vois rien.

Elle sait exactement le danger que représente la perte de la Reine Mère.

... Et puis, vous devez bien avoir remarqué

sa passion extraordinaire pour cette maladie.

Irie

Ce serait complètement illogique pour elle de venir vous tuer.

Rika

— ... Ça d'accord, Irie,

Rika

mais si j'ai bien compris, les recherches sur le syndrome de Hinamizawa doivent être arrêtées d'ici trois ans, non ?

Rika

Vous devez éradiquer la maladie, donc après, elle n'existera plus. Or, Takano est réellement passionnée par ces recherches.

Rika

Tu sais ce qu'elle pense de vos directives ?

Irie

— Oh...

Eh bien...

Disons que pour ma part, j'ai toujours eu comme objectif de guérir tout le monde de cette maladie, mais c'est vrai que pour Mme Takano, cela n'est qu'un pan de la recherche.

Irie

Elle était opposée à ce plan d'arrêt, et je sais qu'elle est allée s'en plaindre au conseil d'administration, toute seule, en leur faisant une présentation à Tôkyô.

Irie

Mais à ce que je sais, cela n'a pas eu grand effet.

Rika

— ... Donc si j'ai bien compris, d'ici trois ans, Takano perdra tout ce qu'elle voulait faire ici ? Les recherches, les fonds, et la maladie ?

Irie

— ... J'imagine que c'est une façon de voir les choses.

C'était peu, mais j'avais l'impression d'être sur une piste.

L'Institut Irie n'était pas une petite entreprise.

Il y avait beaucoup de gens ici, beaucoup de matériel aussi, cela devait coûter une fortune.

Et la maladie du syndrome de Hinamizawa ne pouvait pas être étudiée sans dépenser tout cet argent.

Et donc si l'Institut Irie arrêtait tout d'ici trois ans, Takano ne pourrait même pas continuer toute seule, dans son coin. Elle devrait tout arrêter aussi.

Rika

— ... Puisque de toute façon, ces recherches seront foutues, autant finir en beauté, avec un gros feu d'artifice ? Ça vous paraît possible ?

Irie

— Non, c'est ridicule, voyons !

C'est complètement irresponsable !

Rika

— Mais pourtant, vous connaissez bien son caractère, non ?

Vous ne trouvez pas qu'elle en serait capable ? Que ça pourrait lui traverser l'esprit ?

Irie

— ... Non, non non non, Rika.

Non... .

Non, ce serait trop... Trop...

Oui, je crois que je tiens quelque chose sur son mobile, mais c'est loin d'être le tout.

Il lui reste trois ans, au moins.

Elle pourrait utiliser ces années à convaincre ses supérieurs de continuer.

Ou bien alors, elle pourrait se jeter à corps perdu dans les recherches, les deux prochaines années sont garanties !

Elle n'a aucune raison de vouloir tout foutre en l'air dès maintenant, il lui reste trois ans !

Surtout que c'est toujours pareil, je meurs à chaque fois en juin 1983.

C'est un détail important, ça. Je meurs toujours dans une fenêtre de quelques jours, mais cela reste cantonné au mois de juin 1983.

Ce qui veut dire qu'elle est fermement décidée à passer à l'action.

Si l'arrêt des recherches prenait un effet immédiat, limite, j'aurais compris, mais là, c'est même pas le cas. C'est un peu limite, comme mobile.

Il doit y avoir autre chose qui la pousse à toujours choisir le mois de juin 1983...

Bon, Irie est toujours en train de répéter en boucle que c'est pas possible ; pas la peine de le presser plus de questions, il ne me servirait à rien.

Si j'arrive à trouver le mobile de Takano, alors il pourra se ranger à mes côtés, je pense.

C'est toujours ça de pris, je pourrai aller le voir le moment venu. Je n'en tirerai pas plus pour l'instant.

... Limite, autant avoir la même discussion avec Tomitake.

Lui doit savoir bien plus de choses sur l'organisation, il y travaille.

Et qui sait, j'apprendrai peut-être des choses différentes, et ça me permettra de voir un autre aspect du problème.

Et avec un peu de chance, il me dira quelque chose qui m'aidera à découvrir son mobile, même si franchement dit, c'était clairement pas gagné...

Il était certainement déjà dans la région.

Il est très souvent avec Takano, mais le reste du temps, il se promène et photographie les oiseaux.

Je vais essayer de le choper lors de l'une de ses promenades solitaires.

... Quoique, après tout, il est amoureux d'elle.

Je ne suis pas sûre qu'il accepte de m'écouter sérieusement.

Rika

— ... Bon, et bien merci, Irie.

Je vais retourner en classe. Si tu apprends quoi que ce soit sur Takano, ce serait gentil de me le faire savoir.

Irie

— Rika,

pourquoi êtes-vous aussi persuadée que Takano en a après vous ?

Ne me dites pas que... vous êtes en train de faire une crise aiguë ?

Rika

— Si c'est ce que vous croyez, vous n'avez qu'à me faire faire un test, allez-y.

Je n'étais pas spécialement surprise de le voir aussi désemparé et de penser à ça.

Heureusement, au cours de ses années de travail sur la maladie, il avait pensé à créer un test de dépistage très simple.

Pour le convaincre de ma bonne foi, je le laissai m'injecter le produit spécial qui indiquerait l'avancement de la maladie.

Bien évidemment,

le test fut négatif.

Irie

— ... ... Mais pourquoi ferait-elle une chose pareille ?

Ça n'a pas de sens...

Ce n'est pas possible...

Tant pis. Cette discussion m'aura au moins permis de le rendre méfiant à l'égard de Takano -- c'était peut-être pas un mauvais résultat, en fait.

Je sortis sans plus attendre de l'infirmerie.

Pourvu qu'Irie se décide à vérifier deux ou trois petites choses sur elle...

Hanyû

— ... Alors, Rika ?

La moisson a été bonne ?

Rika

— Bah, c'est assez mitigé, j'ai eu des infos, mais en fait, non, pas vraiment.

Rika

Par contre, j'ai appris des trucs assez intéressants :

Rika

d'une, l'Institut Irie doit éradiquer la maladie dans les trois ans.

Rika

Et ça, ça ne plaît absolument pas à Takano.

Rika

Elle est allée s'en plaindre à ses supérieurs, à la capitale, et ils l'ont envoyée chier, apparemment.

Rika

Peut-être que c'est à cause de ça qu'elle veut tout foutre en l'air ?

Rika

Sinon, deuxième chose drôle et passionnante, ils ont des consignes d'urgence.

Rika

Si jamais je devais mourir, ils devront appliquer le manuel n°  34, et figure-toi que dans ce manuel, on leur dit de tuer au gaz tous les habitants du village. C'est formidable, hein ?

Hanyû

— Oh non, oh non, non, non, non, non…

Rika

— Si jamais je meurs, tous les habitants du coin feront une crise aiguë et atteindront le stade terminal de la maladie.

Rika

Je pensais que Takano voulait me tuer pour pouvoir observer ça, mais apparemment, à cause de ce manuel, les soldats envoyés par l'Armée nous tueront tous avant qu'elle ne puisse nous observer.

Rika

Donc à mon avis, c'est pas ça, son mobile.

Rika

Irie ne fait que répéter que c'est impossible.

D'après lui, Miyo Takano est la personne qui sait le mieux au monde que ma mort pourrait déclencher une catastrophe sans précédent.

Elle n'a donc aucun intérêt à me tuer.

Hanyû

— Oh non, oh non…

Rika

— Oui, je sais.

Mais ne t'inquiète pas, je n'ai parlé qu'à Irie.

Il reste encore des gens à qui parler, je découvrirai peut-être d'autres choses.

Hanyû

— C'est la bonne attitude.

Et puis, tant que tu n'auras pas réussi à rallier tout le monde à ta cause, il n'y aura pas de miracle.

Rika

— Et sans miracle, nous ne risquons pas de gagner, n'est-ce pas ?

Hanyû

— ... Ce sera bientôt la pause midi.

C'est l'occasion d'en parler aux autres.

Rika

— Oui, mais en même temps,

Rika

je ne sais pas trop comment leur présenter les choses pour être sûre qu'ils me prennent au sérieux.

Rika

Si je leur dis que “Tôkyô” est une organisation secrète, ils vont me rire au nez ! Ils vont me demander dans quel magazine j'ai lu ça...

Rika

Il me faut une bonne accroche...

Hanyû

— ... Au☆.

Tu sais, Rika, je crois que le mieux serait de leur en parler sans trop te poser de questions.

Rika

— Vraiment ?

Hanyû

— Oui,

je t'assure, tu devrais essayer.

Je crois que j'ai une idée pour leur présenter les choses. Avec ça, ils vont très certainement se creuser la tête pour t'aider !

Je la regardai avec un air étrange, mais elle se contenta d'éclater de rire.

Mine de rien, Hanyû avait un don pour observer le comportement des êtres humains.

Elle n'avait jamais parlé à Mion auparavant, mais elle la connaissait comme si elle l'avait faite.

Je pris mon courage à deux mains, et, pendant la pause midi, je présentai les choses aux autres, comme elle me l'avait dit...

Mion

— Ah ouais, je vois, je vois...

Ouais, c'est pas mal ça.

Et ensuite ?

Rena

— Wouah,

Rika, mais c'est très impressionnant !

Mais comment tu trouves toutes ces idées ?

Keiichi

— Je suis d'accord avec Rena,

tu as du talent, je suis scié !

Comme le dit Mion, à mon avis, si tu laisses un peu mijoter, tu devrais pouvoir dessiner un manga palpitant !

Satoko

— Très chère, je suis pour ma part bien interloquée !

Satoko

Je vous savais préoccupée depuis ce matin, mais je pensais qu'il en retournait d'autres problématiques !

Satoko

Si vous êtes simplement en panne d'idées, je vous en conjure, adressez-vous sans tarder à mon humble personne !

Hanyû

— Alors, tu vois ?

Je te l'avais dit qu'ils seraient prêts à t'aider !

Au au !!

Rika

— Oui... Oui, dans un sens, c'est pas faux.

Comme quoi, tout est une question de savoir parler aux gens...

Mion

— On croirait pas, comme ça, mais je peux te faire l'inscription, te trouver un nom de groupe, faire les crayonnés,

Mion

repasser à l'encre, appliquer les gris, placer les décors,

faire la composition, la vérification,

envoyer les fichiers à l'imprimerie,

faire et relier les exemplaires,

et te trouver des magasins sympas où tu pourras les mettre en vente.

Mion

Alors je dois avouer que t'as eu une très bonne idée de m'en parler !

Hanyû

— Oh oui, oui !!

Mais c'est génial, Mion !

À toi toute seule, tu es mangaka, rédactrice en chef, imprimeuse et libraire !

Keiichi

— Ah ouais ?

Mon père aussi, il fait ça !

C'est la mode dans les métiers du dessin, ou quoi ?

Rena

— Hauuu☆!

Je dois avouer que ce qui m'intéresse le plus, c'est de savoir quel genre d'histoires elle dessine...

Satoko

— Allons bon, très chers,

vous faites de dangereuses tangeantes, nous perdons notre temps dans des détails connexes !

Satoko

Retournons à l'essentiel, il nous faut aider Rika dans cette entreprise !

... Je leur avais expliqué la situation de Hinamizawa exactement comme elle l'était.

J'avais juste commencé en disant que je voulais dessiner un manga avec une histoire bien tarabiscotée, et que j'avais un peu de mal à organiser mes idées.

En leur disant simplement que c'était pas vrai, que c'était de la fiction, eh bien, j'avais pu tout leur dire en détails, et ils avaient écouté très attentivement.

... Hanyû, t'es super douée, en fait !

Keiichi

— Bon, le plus gros problème, en fait, c'est que si la Reine Mère meurt, alors ils mettent en place le plan de secours et tout le village est rasé.

On est d'accord ?

Satoko

— Si une telle personne existait chez nous, nous serions bien avisés de la choyer !

Satoko

Rendez-vous compte ! Le front de cette personne, s'il heurtait un bloc de tôfu traînant innocemment par terre, les habitants de notre chère bourgade en fussent assassinés !

Satoko

Je suis d'avis qu'il faudrait la ligoter et l'attacher dans une cave !

Rena

— Mais je ne comprends pas,

si les méchants savent ce qu'il risque de se passer, pourquoi tout faire pour tuer la Reine Mère ?

Rika

— ... Oui, justement.

Les méchants, dans leur laboratoire secret, ils ont fait des recherches, ils savent ce qu'il se passera s'ils me-- s'ils tuent la Reine Mère.

Mais j'arrive pas à leur trouver un bon mobile.

J'ai bien une vague idée, mais rien de concret, vraiment.

Qui sait, peut-être qu'eux trouveront quelque chose...

Mion

— Ahahahahaha !

Mais c'est pourtant pas compliqué !

Tu l'as, ton mobile, ils veulent tuer la Reine Mère pour tuer tous les habitants ! Et basta !

Mion éclata alors de rire. Quand je pense que moi, je me suis cassé la tête toute la nuit dessus...

Hanyû

— ... Mais oui, mais attends, Mion.

Les méchants, ils veulent étudier la maladie plus longtemps. Donc s'ils tuent la Reine Mère, ils ne pourront plus rien faire ! C'est pas logique !

Au au.

Mion

— Mais non, c'est pas un souci, j'te dis.

T'as juste à placer un grand méchant derrière les méchants !

Ou bien alors une organisation secrète qui essaierait de manipuler les méchants de ton histoire.

Un autre méchant, derrière Takano ?

Mion

— OK, j't'essplique.

Si la reine meurt, ça va être un beau bordel.

Des soldats seront envoyés pour tuer tout le monde et pour cacher l'incident au public.

Mion

Mais ça, c'est un peu la solution finale, c'est une mesure de dernier recours, un plan de secours nécessaire, mais surtout, c'est pas un truc que les gens veulent vraiment utiliser, tu vois ? Un peu comme un sabre japonais, tu le montres encore dans son fourreau pour faire peur à tout le monde, mais c'est mieux de pas s'en servir, si possible.

Mion

Parce que même si tuer tout le monde règle ton problème, c'est pas vraiment une solution !

Keiichi

— Hmmm,

mouais, si, elle a raison. Regarde les politiques, dès qu'il y a un scandale, tout le monde hurle jusqu'à ce que quelqu'un démissionne.

Keiichi

Si jamais l'Armée devait mener une opération pour tuer plusieurs milliers de personnes sans se faire toper, après, il y aurait une enquête interne, et crois-moi, une paire de têtes tomberaient.

Mion

— Bah, si c'est une mission secrète et que ça marche, il n'y aurait personne pour en parler dans la presse. Mais dans ton organisation secrète, là, tous les gros bonnets seraient au courant !

Mion

Donc à mon avis, ça suffit comme mobile.

Hanyû

— ... Au ?

Mais pourquoi ?

Qui pourrait profiter de la situation ?

Mion

— Bah, il y aurait bien des gens que ça arrangerait !

Mion

Tu sais,

Mion

le vent, il souffle dans une direction.

Mion

Et même si pour toi, le vent est pile de front, pour tes ennemis, c'est un vent en poupe !

Mion

Le malheur des uns fait le bonheur des autres, Hanyû.

Satoko

— ... Intéressant.

Oooohhohhohho !

Cela m'inspire des pièges d'un genre nouveau !

Mais restons sur notre affaire : si cette catastrophe se déclenche, les responsables en paieront le prix fort.

Satoko

C'est donc une perspective alléchante pour tous leurs adversaires !

Rena

— Oui, tu as raison.

Une organisation est faite de gens différents, dont les avis et les idées divergent.

Rena

Et c'est valable à plus forte raison dans une société secrète, où les gens s'allient et se divisent pour s'emparer du pouvoir.

Keiichi

— Et donc il y a forcément des gens qui veulent à tout prix gravir les échelons, quitte à éjecter les autres de l'échelle.

Keiichi

Eux ont tout intérêt à ce qu'il y ait de graves problèmes, pour que les dirigeants soient jugés responsables et soient contraints à donner leur démission.

Hanyû

— Mais, alors, Tak--

euh, le méchant n'a pas besoin d'avoir un mobile ?

Il suffit que quelqu'un dans les rangs de “Tôkyô” voie un intérêt à tuer la Reine Mère, c'est tout ?

Mion

— Héhhéhhé,

eeeeh oui, Hanyû !

Mion

Ah, voilà ce qu'on peut faire pour ton méchant dans son laboratoire secret :

lui, il a envie de continuer, mais ses supérieurs lui ont dit qu'il devait tout arrêter dans 3 ans, jusque-là, on est d'accord.

Mion

Mais du coup, ses supérieurs vont tout détruire !

Mion

Tout ce qu'il a fait pendant sa vie ! Donc forcément, il en souffre.

Mion

Et puis, y a pas que le coup au moral,

c'est surtout sa fierté qui a dû en prendre un coup.

Keiichi

— Hmmm, pas faux.

Keiichi

Il a passé sa vie à croire en l'aboutissement des recherches, et d'un seul coup, des gens viennent et lui disent que c'est de la merde, ils auraient pu lui dire que toute sa vie n'avait servi à rien, ce serait revenu au même.

Rena

— Ça doit être dur à encaisser, oui, j'imagine bien.

Travailler comme un dingue pendant toute sa vie, et tout perdre comme ça, d'un seul coup...

Hanyû

— ... Rika...

Rika

— ... Ouais.

Ouais, ouais, je sais, Hanyû.

Extraordinaire…

J'avais vraiment les meilleurs amis du monde.

Sans le savoir, ils m'avaient donné une piste très sérieuse quant au mobile de Takano...

Hanyû

— ... OK, d'accord !

Et alors maintenant, le méchant, il fait quoi ?

Mion

— Oh, ben j'imagine que d'abord, il va aller se plaindre auprès de ses supérieurs, hein !

Mion

Il va essayer de leur expliquer, de leur faire comprendre pourquoi ses recherches sont si importantes.

Mion

Pour pouvoir ensuite leur demander de retirer leurs exigences et continuer son projet.

Mion

Mais bon, si ses supérieurs lui disaient “Oui, on va même te filer encore plus de pognon”, ben, t'aurais plus d'histoire.

Mion

Héhhéhhé !

Mion

Et donc là, ce que tu fais, tu mets une scène dans laquelle les gros bonnets de “Tôkyô” se moquent de lui et lui foutent une honte phénoménale !

Mion

Avec les commentaires qui vont bien, “Vos recherches n'ont aucun intérêt, c'est ridicule, inutile ! Donner de l'argent pour ça ? Et puis quoi encore !”

Irie m'avait dit qu'elle était allée toute seule essayer de convaincre leur conseil d'administration.

Et il m'avait aussi dit qu'elle n'avait pas réussi.

Satoko

— Oooohhohho !

Sa colère doit alors être grande, très grande, incommensurable, même !

Il n'a donc plus que deux choix s'offrant à lui !

Rika

— ... S-satoko.

Lesquels ?

Keiichi

— Bah alors, Rika, c'est quand même super évident !

Soit il va se cacher et il pleure toutes les larmes de son corps, soit il se venge !

Keiichi se tourna vers Satoko et tendit la paume de sa main à la verticale ; elle alla la lui toper.

Mion

— Et comme ce serait pas très marrant d'avoir une fin bidon dans laquelle le méchant rentre chez lui et pleure dans son coin, ben, il faut prendre l'autre solution !

Mion

Et donc tu dois avoir des scènes dans lesquelles ton méchant prend sa décision. Plutôt que d'accepter que de parfaits inconnus complètement ignares détruisent l'œuvre de toute sa vie, il va préférer y mettre un terme de lui-même.

Mion

Surtout s'il est fier et vaniteux !

Satoko

— Oooohhohhohho !

Et c'est là que nos grands méchants cachés dans les rangs de “Tôkyô” nous deviennent d'une grande utilité !

Hanyû

— Et donc ce serait ça ?

On aurait simplement des gens dans l'ombre qui veulent juste faire tomber des têtes ? Et ils iraient jusqu'à faire mourir des milliers de personnes pour arriver à leurs fins ?

Satoko

— Précisément, très chère !

Satoko

Imaginez, votre chercheur maléfique rentre de son entretien, tout s'est très mal passé, il ne comprend pas, il déprime.

Satoko

Il suffit alors de le titiller un peu, et l'on peut obtenir bien des choses.

Satoko

Les froids et cyniques calculateurs de l'ombre pourraient déclencher la catastrophe sans même se salir les mains, et n'auraient qu'à attendre le retour de bâton pour voir leurs supérieurs ou leurs adversaires se faire évincer !

Satoko

Vous voyez ?

Mion

— Exactement !

Héhhéhhé !

Alors, je résume :

t'as ton méchant qui déprime, l'œuvre de sa vie vient de se prendre une déculottée.

Mion

Sur ces entrefaites, un gros poisson de “Tôkyô” débarque, ou bien il envoie un de ses sbires, et va lui monter la tête.

Rena

— Oui, après tout il vient de perdre sa raison de vivre, n'est-ce pas ?

Rena

Donc, si quelqu'un l'approche en lui remontant le moral et en lui faisant croire qu'il est là pour l'aider, je pense qu'il se laissera facilement berner.

Rena

Ça arrive particulièrement souvent aux gens très fiers.

Keiichi

— Ouais, donc en fait, t'auras simplement une ordure qui se servira de ton méchant pour accomplir ses basses besognes.

Bah, c'est assez commun dans les séries télé.

Keiichi

T'as toujours un méchant qui a toujours été super loyal envers le roi des méchants et il fait une connerie, et *pan*, il se fait éjecter. Ça me fait toujours un peu de peine pour lui...

Satoko

— Cela risque de finir bien tristement, d'ailleurs.

Les mécréants de l'ombre n'ont en effet aucun intérêt à garder le méchant en vie !

Mion

— Héhhéhhé !

Bah, oui, c'est clair.

Mion

Ton méchant, il se prend pour un génie du mal, mais en fin de compte, il va se faire doubler par plus malin que lui, et en plus, quand il aura foutu l'œuvre de sa vie en l'air, ses complices le supprimeront. Ça te fait un super personnage, en fait, les lecteurs le prendront en pitié !

Mion

Oui, je crois que c'est une bonne idée, en fait, il sera très bien comme ça, ton méchant.

Mion

Z'êtes pas d'accord ?

Hmm, je vais voir ce que je peux faire d'ici la prochaine anthologie...

Je regardai Hanyû : comme moi, elle restait bouche bée, interdite.

J'étais exactement du même avis qu'elle :

j'avais un groupe d'amis absolument extraordinaires.

Tout ce qu'ils venaient de dire pouvait s'appliquer à Takano. Rien de tout cela n'était impossible.

D'ailleurs, Irie n'avait fait que répéter que c'était impossible, encore et encore.

C'était un peu un signe qu'il pensait que justement, c'était tout à fait plausible ?

Autant leur demander.

Je suis sûre qu'ils me trouveront une explication en un rien de temps !

Hanyû

— ... Hmmm.

Mais alors, pourquoi est-ce qu'il fait ça tout de suite ? Il lui reste trois ans !

Keiichi

— Non, le temps qu'il lui reste n'a rien à voir, Hanyû.

Keiichi

Si on te dit “vous êtes condamnée à mort, vous serez exécutée dans un instant” et “vous êtes condamnée à mort, vous serez exécutée après-demain”, honnêtement, c'est la même chose.

Keiichi

Ce n'est qu'une question de temps.

Keiichi

Je pense que le méchant, lui, considère que sa vie est finie, même si ses supérieurs lui ont laissé trois ans.

Mion

— Hmmm,

Tout va dépendre des mystérieux commanditaires.

Je veux dire, ce sont eux qui manipulent le méchant, donc le massacre des villageois dépend d'eux et de leurs plans.

Mion

Et puis, c'est une opération de grande envergure.

Mion

Et surtout, ils n'ont pas le droit à l'erreur.

Mion

La clef du succès, ce n'est pas seulement l'assassinat de la Reine Mère,

Mion

il doivent tuer tout le monde, donc faire en sorte que le Premier Ministre et les autres signent le décret d'application du manuel n°  34.

Mion

Et puis, ils doivent préparer une liste de gens à qui faire porter le chapeau.

Mion

Et surtout, ils doivent faire en sorte que l'opération soit déclenchée à un moment qui leur est propice !

Mion

Donc bon, ils ont une fenêtre de trois ans, mais dès qu'ils auront une bonne occasion, ils sauteront dessus. Vous croyez pas ?

Keiichi

— En fin de compte, le méchant dans l'histoire, ce sera qu'un pauvre type trahi par tout le monde.

J'ai vraiment de la peine pour lui, pour le coup !

Hanyû

— ... Hmmm...

Oui, bien sûr,

si c'est comme ça...

Rika

— ... D'accord, alors passons au truc qui me pose le plus de problèmes.

Rika

La Reine Mère, c'est juste une petite fille. Comment pourrait-elle faire pour se défendre ?

Rika

Parce qu'en fait, je vous ai pas dit, mais c'est elle le personnage principal.

Keiichi

— Ahaaaa, ah ouais,

mais c'est pas con, comme idée !

Et donc en fait, ce sera une histoire où l'héroïne devra échapper aux méchants qui veulent la tuer ?

Mion

— Hmm, faut voir dans quel magazine tu seras publiée, aussi, Rika.

Mion

Si c'est pour un hebdomadaire qui te commande une série à rallonge, il te faudra inventer de nouveaux ennemis, pour que les lecteurs ne perdent pas l'intérêt.

Hanyû

— Ah oui mais non, ça va pas le faire. Et ça se passerait comment dans un modèle où tout serait publié dans un laps de temps très court, genre en une seule fois ?

Je pouffai de rire en entendant Hanyû formuler la question.

Keiichi

— Hmmm, du coup, il te faut battre le méchant et penser à un happy end, je pense.

Keiichi

Si tu passes l'histoire à fuir, la fin tombera comme un cheveu sur la soupe. Mais du coup, il te faut des scènes d'actions, que les personnages se battent, et tout !

Satoko

— Certes, j'entends bien, mais n'oubliez point les postulats de base : l'héroïne est une frêle et fragile enfant !

Comment ferait-elle pour se battre ?

Mion

— Héhhéhhé !

Mais aujourd'hui, dans les histoires, les petites filles sont très fortes !

Mion

Elles ont l'air mignonnes à croquer au premier abord,

Mion

mais en fait, elles cachent des supers-pouvoirs !

Mion

On pourrait dire qu'en fait, elle est la dernière descendante d'une lignée de Hunter de rang S !

Mion

Et son surnom, ce serait... “L'ange déchu aux ailes noir de jais” !

Rena

— Hauuu !

On dirait une fanfic de collégien boutonneux...

Keiichi

— Eh ben quoi, Mion,

qu'est-ce qu'il t'arrive, t'as mal au ventre ?

Mion

— Peuh ! Je sais bien que j'suis un œuf de Picky qui n'éclora jamais...

... Mion, courage, te laisse pas abattre !

Un jour, dans dix ans, tu reliras tes recueils d'histoires, et tu verras, ça te fera tout drôle...

Hanyû

— ... Au au.

Je dois avouer que j'ai pas trop compris la fin, mais je le répète, Mion, l'héroïne est une petite fille et elle n'a pas de pouvoirs magiques.

Hanyû

À la rigueur, on pourrait dire que... qu'elle est douée pour tromper son monde.

Et aussi, elle est très méchante, et très rancunière. Et qu'elle aime bien me faire souffrir en mangeant des choses épicées.

Rika

— Ouah, mais c'est une super idée pour son caractère, Hanyû,

je crois qu'on va le garder, on le mettra en place dès ce soir.

Hanyû

— Aaaah, non, non, NON, NON !

Keiichi

— Ahahaha, je vois, tu veux un héros à taille humaine, donc.

... Mais il faut aussi déjouer le complot. C'est pas facile à concilier...

Mion

— Ah ouais, non, clairement !

Il faut au moins qu'elle sache se servir de n'importe quel type d'armes, qu'elle sache manipuler une C.B. ou bien un hélico, quoi !

Mion

Ou alors, on en fait une fille qui a été en fait sauvée par la famille royale, alors qu'elle était simplement une orpheline élevée dans un camp d'entraînement russe, ou je sais pas, moi, une survivante d'un crash dans la jungle brésilienne, élevée dans un camp de guerilleros.

Mion

Elle doit être capable de poser des pièges et de survivre avec juste sa bite et son couteau ! Enfin, ouais, on se comprend, quoi !

Hanyû

— ... Alors à ce moment-là, on n'a qu'à dire que Mion et Satoko sont ses amies !

Mion

— Hein ?

Qui, moi ?

Mion

Héhhéhhé !

Mouais, si je suis dans l'histoire et que je suis de son côté, elle a une chance.

Je connais tous les styles de combat, et je suis un commandant de Rang S.

Et puis, si l'histoire se passe à Hinamizawa,

Mion

je connais le terrain comme ma poche.

Et si en plus Satoko est là pour m'épauler, alors là...

Hein, Satoko ?

Satoko

— Ni le méchant, ni les hommes de l'ombre ne vont comprendre ce qu'il va leur arriver, très chère !

Satoko

Mes pièges sauront les faire ployer !

Satoko

L'héroïne n'aura qu'à fuir avec moi jusqu'à la végétation de la montagne, plus haut. Si nous allons là-bas, ils ne nous trouveront plus !

Mion

— C'est clair.

Mion

Si nous allons toutes dans la montagne avec Satoko, les assaillants vont devoir ramener une force de frappe conséquente. Il leur faudra des chars pour pilonner la montagne, et au moins autant de bombardiers qu'à Hanoï.

Mion

Et à mon avis, même après ça, ils devront faire gaffe en venant nous chercher,

Mion

surtout si c'est moi qui commande !

Mion

Hmmm, ils vont prendre sur la gueule comme les Ricains à Iwo Jima.

Qu'est-ce que t'en penses, Satoko ?

Satoko

— Oooohhohhohho !

S'ils veulent désamorcer mes pièges en pilonnant la forêt, il leur faudra des têtes nucléaires !

Hanyû

— ... Je sais que tes pièges sont formidables, Satoko, mais

les chiens de mon--

les troupes du méchant, elles sont fortes aussi.

Ils sont entraînés au combat !

Mion

— Ah, mais tu sais, Hanyû, les pièges et les attaques surprises, ça fonctionne sur tout le monde. Bon, les gens entraînés ont plus de réflèxes, mais ça ne fait pas tout.

Regarde la guerre du Viêt Nam.

Les yankees y sont allés avec la meilleure armée et le meilleur équipement au monde, et ils ont pris une déculottée.

Mion

Les gens avaient placé des dizaines et des dizaines de pièges dans la jungle, partout. Même les vétérans se faisaient avoir.

Rika

— ... Tu veux dire que les pièges de Satoko seraient efficaces contre des soldats ?

Mion

— Oh oui, bien sûr !

Mion

D'ailleurs, les vétérans se montreront peut-être justement pas assez prudents au début, et trop prudents par la suite, après avoir subi des pertes !

Mion

Parce que bon, placer des pièges, c'est bien, mais ça ne décime pas une armée.

Mion

Par contre, tu peux faire très peur aux soldats, en leur faisant croire que tout est dangereux.

Mion

Et si leur commandant est un vétéran, il n'enverra pas ses hommes au casse-pipe.

Et donc, on pourrait gagner pas mal de temps --

plus que si nous avions des débutants en face de nous.

Keiichi

— Heh heh !

Et comme on n'est pas en guerre et que l'ennemi ne va pas ramener de chars,

on est tranquilles !

... Oui, je vois mal les chiens de montagne ramener une division de blindés.

Je sais que Mion est un stratège de premier plan.

Et si elle est persuadée que les pièges de Satoko seraient efficaces, c'est qu'ils le seront.

Mion

— Le problème des pièges, c'est qu'ils ne servent qu'à se défendre. Et puis, il faut du temps pour les poser.

Mion

Et puis aussi, ils se déclenchent sur les troupes alliées aussi, mais bon, si nous avons Satoko et que nous allons dans la haute montagne, elle saura nous guider.

Rena

— Hmmm, oui, c'est vrai.

Plus personne ne va en montagne, Satoko a déjà truffé l'endroit de pièges.

L'héroïne pourra se terrer dans la montagne presque tout de suite, sans trop de préparations, c'est très bien !

Mion

— Mais si c'est moi qui donne les ordres, on ne fera pas que se terrer.

On fera une diversion pour diviser les troupes, et on les attaquera, un à un s'il le faut.

Mion

Il faudra les amener vers nous, haut dans la montagne, pour les prendre à revers. C'est une tactique assez basique, en fait.

C'est complètement stupide et irréaliste d'essayer de bloquer l'ennemi sur la plage !

Rena

— Ouah !

Dites donc, vous deux, mais vous êtes super fortes, en fait !

Rena

C'est dommage, Keiichi et moi, on fait un peu tache, on ne sert à rien...

Hanyû

— ... Je sais ! Et si nous disions qu'en fait, nous étions les héros de l'histoire ?

On va les affronter tous ensemble.

Keiichi

— Ouais,

super idée !

Et du coup, ça ferait un peu un combat final entre les membres du club et une organisation secrète...

Mion

— Ahahahaha !

Je sais pas qui seront les méchants en face, mais les pauvres, j'ai déjà de la peine pour eux, qu'est-ce qu'ils vont prendre !

Qu'importe leur entraînement en fait… Héhéhé…

Mion

Je veux dire, en combat singulier, ou bien de front, à la loyale, nous n'aurions aucune chance, mais s'ils nous laissent l'avantage du terrain, alors là, c'est le contraire !

Mion

À moins qu'ils viennent avec des troupes du type Overlord.

Mion

Et encore, je crois que même là, nous pourrions encore les vaincre...

Héhéhéhé !!

Tous les autres acquiescèrent à qui-mieux-mieux.

Merde, c'est pas bon, ça, à ce rythme-là, je vais finir par croire que nous avons une chance de vaincre les chiens de montagne...

En même temps, Mion avait raison, de front, nous n'avions aucune chance.

Mais si nous pouvions décider du lieu et de l'endroit de l'attaque, ça changeait tout... Tout devenait possible !

Hanyû

— Alors, Rika,

je te l'avais bien dit qu'ils nous aideraient.

Rika

— ... Oui, tu avais raison.

C'est à se demander comment j'ai pu être aussi conne pour ne jamais leur en parler.

Hanyû

— Alors, tu vois ? À plusieurs, l'être humain peut faire des choses impossibles à faire tout seul.

Et donc des choses qui nécessiteraient toute une batterie de miracles si j'étais seule, ne devenaient que de simples formalités si j'avais l'aide de tous mes amis.

C'est ça, en fait, un miracle.

Je sentais bien que j'étais tout excitée.

C'était quoi, cette sensation ?

J'avais l'impression étrange de pouvoir réussir tout et n'importe quoi tant que je resterais avec eux.

Hanyû m'avait dit que dans le monde précédent -- celui dont je n'avais aucun souvenir -- ils avaient réussi à convaincre les services sociaux, et nous avaient débarrassé de Teppei.

Je ne sais pas pourquoi,

mais j'ai ressenti quelque chose.

Comme si mon âme me disait que...

que dans ce monde-ci aussi, ils étaient capables de déclencher des miracles.

Rika

— ... Bon, Mii,

les autres, écoutez-moi bien.

J'ai besoin d'encore plus d'idées.

Je veux tout savoir ! Donnez-moi des idées pour mettre en scène notre victoire !