Cette année, j'avais pu avoir suffisamment d'hommes prêts à agir sur le terrain.

C'est pourquoi nous pûmes immédiatement sécuriser le périmètre et commencer l'enquête.

La victime était la femme du frère Hôjô.

C'était la victime toute désignée pour cette quatrième malédiction.

Elle était détestée dans tout le quartier.

Maintenant qu'elle était morte, tout le monde se murmurait que c'était normal et que la déesse avait fait un choix évident.

Quant au coupable, j'avais ma petite idée.

C'était probablement son neveu, Satoshi Hôjô.

Il avait l'air un peu lent à la détente.

Il avait un mobile.

Le macchabée maltraitait sa petite sœur tous les jours.

C'était certainement une sorte de revanche et de punition.

De plus, je l'avais vu sur les lieux du crime, pour lui parler. Il avait été à la fois extrêmement nerveux, et aussi parfaitement détaché. Même quelqu'un de parfaitement étranger aux faits aurait montré plus d'intérêt que ça.

Et mon flair de policier me disait que c'était lui, et qu'il n'y avait pas de doute à avoir dessus.

Je n'avais aucune preuve décisive, mais je savais que si je l'invitais au poste et que je le secouais un peu, il passerait à table.

Kumadani

— Vu comment le macchabée a été frappé, le coupable a dû être éclaboussé de sang.

Si nous pouvions trouver les vêtements, ce serait parfait pour nous.

Ôishi

— À moins qu'il soit complètement con, il s'en est déjà débarrassé.

Si nous pouvons lui faire cracher où il a jeté ses vêtements après lui avoir fait avouer le meurtre, le juge aura de quoi monter le dossier.

En tant qu'affaire, c'était plutôt facile à résoudre, presque trop.

Si le jeune passe à table, ce sera terminé.

Je pense que tout le monde pensait cela, tout le monde sauf moi.

Je savais que ça faisait partie des meurtres en série, et je savais que ça ne s'arrêterait pas là.

Derrière cette affaire, il y a les trois clans ancestraux du village,

et surtout les Sonozaki.

Si ce sont eux qui ont tiré les ficelles, ils lui refileront tout sur le dos.

Mais si c'est le cas, alors le gamin en sait trop.

Ce sont eux qui règnent en maître sur cette affaire.

Et le gamin pourrait les lier au meurtre. Le laisseront-ils dans la nature ?

Ils se sont servis de sa dévotion envers sa sœur pour le pousser à tuer sa tante.

Ensuite, ils n'avaient plus qu'à le faire disparaître, logiquement.

... J'étais sûr que Satoshi Hôjô n'avait pas agi seul, comme ça.

Il était peut-être aussi un leurre, un faux coupable...

Et quelques jours après, mes prédictions s'avérèrent exactes.

Le meurtrier disparut sans laisser de traces.

Sa disparition n'était pas piquée des hannetons.

Il n'avait pas fui par simple peur de se faire arrêter.

En fait, un autre coupable apparut dans cette affaire.

C'était un toxico qui avait été arrêté pour des faits complètement différents, et qui venait de mourir en taule.

Il avait donné des éléments de l'enquête que seul le coupable pouvait savoir.

Donc par défaut, c'était lui le meurtrier.

Et comme il était déjà mort, l'enquête était terminée.

Satoshi Hôjô, quant à lui, s'évapora dans la nature quelques jours après la fête de Hinamizawa.

Il paraissait plutôt évident que quelqu'un avait créé un faux coupable de toutes pièces, pour écarter Satoshi de la liste des suspects.

Mes supérieurs me mirent la pression pour arrêter mes recherches.

La disparition de Satoshi Hôjô fut séparée du meurtre de sa tante, et un autre commissariat fut chargé de l'enquête.

Cette méthode ressemblait fort à ce qu'il s'était passé il y a deux ans,

lors de la chute mortelle à Shirakawa.

Les experts avaient conclu à un accident, mais ça m'avait paru vraiment très, très louche.

Il était impossible de ne pas y voir l'œuvre de gens capables de mettre la pression sur des gens haut placés parmi mes supérieurs.

Et comme par hasard, les seuls capables de telles prouesses dans la région étaient les Sonozaki.

Ils croyaient avoir assuré leurs arrières, mais ces pressions étaient la preuve irréfutable qu'ils étaient dans le coup...

Un de mes informateurs me fit savoir plus tard qu'Oryô Sonozaki avait parlé de la quatrième malédiction lors d'une réunion de clan, et qu'elle avait eu des propos qui faisaient croire qu'elle avait tout organisé.

Alors bien sûr, cela ne pouvait pas servir de preuve, mais en tout cas, je pouvais être sûr que tout en haut de la chaîne de commande, il y avait Oryô Sonozaki...

Je savais qui étaient les meurtriers du vieux, mais je n'avais aucune preuve !

Le dernier coupable était probablement caché par les Sonozaki, c'était pour ça qu'on ne le trouvait pas.

Je devais lui mettre la main dessus et récupérer le bras droit.

Et alors, je le lui rendrai. Et le mec qui a planifié tout ça devra se mettre à genoux devant la tombe du vieux...

... En même temps, ce meurtrier-là avait peut-être été buté par les Sonozaki, tout comme Satoshi.

Il était peut-être carrément mort depuis tout ce temps, enterré dans un coin paumé.

Limite, ça, ça me dérangeait moins.

Restait plus qu'à traîner la vieille peau à coups de pompes dans le cul pour lui faire schrouper le sol devant la tombe du vieux.

Elle me le paiera... Elle me le paiera !

Peu après la quatrième malédiction, les rumeurs se mirent à aller bon train sur la prochaine.

Je m'étais préparé pour cette fois, mais ça ne m'avait servi à rien.

Je le savais, si le meurtre avait lieu, alors c'était trop tard.

Je devais faire traîner mes yeux et mes oreilles dans les coins les plus sombres du village avant le prochain meurtre...

Et surtout, je devais impérativement trouver le meurtrier l'année prochaine.

Parce que l'année prochaine, c'était ma retraite.

J'ai déjà promis à ma mère de l'emmener vivre à Hokkaidô, dans le nord, là où elle était née.

Et comme c'est probablement la dernière chose que je pourrai faire pour elle, j'avais déjà pris des dispositions ; nous déménagerions juste après mon dernier jour au poste.

C'est pourquoi l'année prochaine, ce sera ma toute dernière chance de venger la mémoire du vieux.

Il ne faut pas se leurrer, si ça a marché comme sur des roulettes quatre années de suite,

il y aura forcément une cinquième fois.

Grâce à cette série de meurtres, le village est soudé comme jamais, encore plus que lors de la guerre du barrage.

Et les éventuels traîtres savent que la malédiction leur fera payer leur acte, que le système était en place et qu'il était opérationnel.

Et puis, ceux qui tirent les ficelles du système ont des raisons de s'en servir.

On raconte que la tante Hôjô avait été maudite à cause de son manque de piété. Elle ne respectait pas assez la déesse Yashiro, et n'était jamais venue à la purification du coton.

Certains se racontaient déjà que quiconque n'irait pas à la fête l'année prochaine risquait fort d'y passer.

Ce qui signifiait que l'année prochaine, il y aurait un peuple fou à la fête...

Je sais qu'il y aura une prochaine fois.

Il y aura une cinquième malédiction de la déesse Yashiro,

un cinquième meurtre pour prolonger la série.

... Et cette fois-ci, je coincerai les salopards qui font ça,

et je vengerai le vieux...