Le sens de la purification du coton

La purification du coton était un festin cannibale pendant lequel on mangeait une victime que les villageois avaient chassée tous ensemble.

C'était un acte en soi inhabituel, mais je pensais pouvoir y déceler un caractère ludique, une sorte de passe-temps très particulier.

(En effet, en se forçant à se divertir d'un spectacle “inhumain”, les spectateurs essayaient de se convaincre qu'ils dépassaient leur condition de simple être humain.)

Or, j'ai découvert des écrits qui viennent infirmer cette théorie.

Il s'agit de la transcription d'une tradition orale qui me laisse dubitative.

D'après celle-ci, les habitants d'Onigafuchi craignaient la purification du coton.

En particulier les enfants, mais aussi certains adultes, étaient apeurés, tremblants, vomissaient parfois pendant la cérémonie, mais ils étaient contraints par la force de la regarder -- c'est-à-dire de voir la victime se faire disséquer et découper vivante.

C'est un concept très intéressant.

J'avais pensé jusqu'à présent que les exactions commises pendant la purification du coton provoquaient une certaine forme d'extase décadente.

En éviscérant un “misérable humain” comme s'il ce fût agi d'un vulgaire poisson,

les gens qui en mangeaient la chair se rapprochaient des dieux.

Mais si la cérémonie n'apportait pas l'extase, mais la peur, alors le sens de cette cérémonie change du tout au tout.

Elle devenait une sorte d'exécution publique, qui servait à prouver que ceux qui avaient le pouvoir dans le village avaient encore le droit de vie ou de mort sur quiconque oserait les défier.

Les dirigeants du village étaient les membres des trois clans fondateurs.

Il me faut absolument les étudier en détail si je veux découvrir la vérité sur le village d'Onigafuchi.