Je n'avais pas la moindre idée de comment rebondir sur ce que venait de dire Rika…

Keiichi

— Je vais voir ce que fait Mion.

Après avoir pris congé d'eux, je quittai la salle de classe et me dirigeai vers la salle des profs, là où Mion était partie passer son appel.

… Ce n’est pas comme si je pouvais faire quoi que ce soit.

Ne rien faire et se laisser ronger par l'anxiété… C'est vraiment le pire des sentiments.

Kasai

— C'est entendu, Mademoiselle.

Je vais faire placer deux jeunes devant la clinique.

Mion

— Je n'y crois pas trop, mais bon...

Je ne sais pas jusqu'où elle est capable d'aller.

Kasai

— Est-ce que nous pouvons la maîtriser de force, si nous la voyons ? Vous êtes sûre ?

Mion

— ... En temps normal, je te l'interdirais, mais là...

Je sais pas quoi faire.

Kasai

— Lors de la réunion d'hier, nous nous sommes engagés à remettre Rena aux forces de police si nous réussissions à l'arrêter.

Donc même si nous devions la maîtriser de force et la garder quelques instants au Clan, nous remplirions notre part du marché.

Mion

— Je me moque pas mal de ça, c'est juste que ça me ferait de la peine pour elle !

Si possible, j'aimerais que tout se passe dans le calme, sans faire trop de remous...

Kasai

— Allons, elle est encore jeune.

Tant qu'elle n'a tué personne, elle n'aura qu'à s'excuser pour être pardonnée.

Mion

— Ahahahahahahahaha !

Dans ce cas-là... elle est dans la merde… Ah ha ha.

Kasai

— Ah... Euh... Mais ne vous en faites pas, tant que les corps restent cachés, tout ira bien.

Si, si, je vous assure, ça passera...

Il n'y a personne dans la région qui se fasse du mouron pour ces deux-là.

Kasai

Nous faisons passer le bruit qu'ils se sont enfui dans la nuit parce qu'ils avaient des problèmes avec d'autres gens crapuleux.

Ces gens-là vont de ville en ville pour refaire leurs mauvais coups.

Donc vraiment, tout ira bien.

Mion

— Bon, il faut savoir, mec, ça passe ou ça casse ? Bah, on le saura pas tant qu'on n'aura pas essayé, hein ?

Hahahaha !

Allez va, tant pis. Ben écoute, je compte sur toi, alors.

Kasai

— C'est bien compris.

... Donc, nous pouvons ?

Mion

— Allez-y mollo quand même, hein ?

Je compte sur vous pour la garder en un seul morceau.

Sur ces entrefaites, je mis fin à la conversation.

Après avoir reposé le combiné du téléphone sur son socle, j'eus l'impression de sentir le regard de la maîtresse sur moi.

En même temps, dans une pièce aussi exiguë, elle avait forcément dû entendre ce que j'avais dit...

Madame Cie posa sa cuiller et me demanda sur un ton un peu triste :

Cie

— Tu... étais en train de parler de Ryûgû, n'est-ce pas ?

Mion

— Euh... Oui.

Cie

— Sonozaki... Pourquoi Ryûgû a-t-elle fait cette fugue ?

Tu es au courant de quelque chose ?

À part moi et Keiichi, je suppose que personne n'imaginait l'état dans lequel elle était en ce moment...

Et donc tout le monde pensait qu'elle faisait une fugue.

Mais pour une simple fugue, la réaction de la Police était disproportionnée.

Ce connard d'Ôishi avait cru pouvoir obtenir les cahiers plus rapidement en faisant un battage monstre avec cette histoire.

Même si elles n'avaient pas roulé toutes sirènes hurlantes, il avait envoyé plusieurs voitures de police patrouiller dans le village. Il avait même réquisitionné la liste des numéros de téléphone.

C'est pourquoi les gens pensaient que Rena fuyait la Police, car elle aurait fait quelque chose de mal.

Pour moi, le plus difficile allait être de pondre une histoire pour la couvrir, une fois que Rena serait entre les mains de la Police...

Pendant qu'elle se promenait, elle est tombée, elle s'est cogné la tête contre un morceau de tôfu qui traînait justement dans les parages, et elle est devenue amnésique.

Mais l'inspecteur a cru que c'était plus grave, alors il l'a fait rechercher en urgence, et du coup, elle avait eu l'air d'une dangereuse criminelle...

Mouais, c'est un peu fastoche.

Au moins, la réunion a prouvé que c'était la faute à Ôishi.

Je dois absolument tout lui mettre sur le dos pendant qu'il est encore sous le choc...

Mais le plus important, c'est de réfléchir à l'après.

Il va falloir faire en sorte que Rena puisse tout oublier, si possible rapidement, et si possible sans faire trop de vagues. Mais ça va pas être facile à mettre en place.

Mion

— Allons, Madame, c'est pas si grave, ne vous en faites pas.

Rena est... un peu malade, c'est tout.

Mais le gros plein de soupe du commissariat est un peu stupide et il s'imagine des choses, et il en parle partout, c'est tout.

Mion

Vous ne pensez tout de même pas qu'elle a vraiment commis un crime et qu'elle est en cavale, tout de même ?

Cie

— ... Eh bien... Non, bien sûr que non,

mais... tu sais, faire une fugue, ce n'est pas rien, pense un peu à sa famille.

... Oui, elle a fait une fugue après s'être pris la tête avec son père.

On placera ça sur le compte de sa jeunesse et les gens n'en parleront plus...

Cie

— Je me demande ce qui la tracassait...

Je ne suis pas vraiment une bonne enseignante. Je n'ai rien vu venir.

J'aurais dû lui parler...

Mion

— Ahahahaha, allons, vous êtes trop pessimiste !

Ne psychotez pas, voyons, faut péter un coup, ça ira mieux !

Une fugue de temps en temps, c'est pas non plus si rare que ça !

Cie

— Aaaah ! Mais si Ryûgû devient une délinquante, maintenant ? Si elle fait une grosse bêtise ? Mais qu'est-ce que je vais faire ?

Au au auuuu !

Ryûgû devient déliquante

↓\nElle fait une bêtise et se fait arrêter

↓\nCe sera ma faute

↓\nJe passerai devant le conseil de discipline

↓\nJe ne pourrai plus manger de curry

↓\nJE VAIS MOURIR !

Cie

— Oh non... Non... Non...

La maîtresse semblait perdue dans je-ne-savais-quelle rêverie.

Enfin, si ça l'amuse, laissons-la tranquille.

Je sortis de la salle des professeurs et me dirigeai à nouveau vers la classe.

À peine étais-je sortie que le téléphone se mit à sonner.

Cie

— Oui, allô ?

Ici l'école de Hinamizawa.

Ah, oui, le Directeur n'était pas là aujourd'hui. La maîtresse devait s'occuper de tout, ça ne devait pas être facile.

Sans trop y réfléchir, je marchai dans le couloir.

Et là, j'entendis la voix de la maîtresse changer du tout au tout.

Cie

— Quoi ?

Mais... Où es-tu en ce moment ?

Je me retournai immédiatement.

C'était sûrement Rena.

C'était elle qui téléphonait à l'école !

Je voulus entrer à nouveau dans la pièce pour écouter la conversation, mais la maîtresse, tenant le téléphone d'une seule main, me fit signe de ne pas entrer de l'autre.

Après avoir dit oui plusieurs fois, la maîtresse regarda l'horloge dans la salle.

Cie

— Très bien, d'accord.

J'arrive tout de suite, ne bouge pas !

Eh, tu m'as promis, hein ? Ne t'en fais pas, je serai bientôt là. Courage.

Elle raccrocha immédiatement, ouvrit son casier et prit son sac à main.

Cie

— Déléguée,

j'ai une affaire urgente à régler.

Je sors pour un instant, dites aux élèves de rester en classe et de faire leurs devoirs.

Elle ouvrit son sac à main et en sortit ses clefs de voiture.

Il paraissait évident que Rena lui avait donné rendez-vous quelque part.

Mion

— Madame, c'était Rena au téléphone ?

Cie

— Ce sera tout pour vous, Déléguée.

Allez vous occuper de la classe.

Ignorant superbement mes questions, la maîtresse s'en alla au pas de course.

Elle passa l'entrée du bâtiment, traversa la cour, puis monta dans sa voiture.

Mion

— P'tit gars !

Keiichi

— Qu'est ce qui se passe ?

Où est-ce qu’elle va pour que ça soit aussi urgent ?

Mion

— Rena a appelé !

Keiichi

— Hein ?! Et qu'est ce qu'elle a dit ?!

N'ayant aucune réponse de ma part Kei se mit à me suivre.

Je la vis démarrer et partir.

Je courus alors moi aussi dans la cour.

Je m'approchai en toute hâte de la voiture laquée noire arrêtée près des grilles de l'école et frappai au carreau.

Gangster des Sonozaki

— Ah, bonjour Madame.

Pour l'instant, rien à signaler.

Mion

— Non, c'est pas pour ça !

Vous avez vu la voiture qui vient de partir ? Suivez-la !

Elle va aller retrouver Rena !

Keiichi

— Quoi ?!

Je manquais de temps pour lui expliquer la situation.

Mion

— Rena se méfie de tout le monde, alors restez sur vos gardes.

Attrapez-la, contente ou pas, et ramenez-la au Clan. De là, vous faites ce que Kasai vous dira de faire, c'est compris ?

Et une dernière chose, n'oubliez pas que c'est ma meilleure amie.

Si vous lui faites du mal, je vous jure que vous le regretterez, capice ?

... Rena a sûrement demandé à la maîtresse de venir seule, pour lui parler en privé.

Sinon, elle n'aurait pas ignoré mes questions.

Ça me faisait chier de ne pas respecter leurs arrangements,

mais je voulais absolument arrêter Rena avant qu'elle ne fît une grosse connerie.

Si j'arrivais à l'avoir maintenant, tant qu'elle n'avait rien fait, alors je pourrais toujours dire qu'elle s'était engueulée avec son père et qu'elle avait fait sa crise d'ado. Les gens ne comprendraient pas tous, mais ce serait gérable.

... Si je faisais ça trop tard et qu'elle avait déjà mis le feu à la clinique, les gens lui en voudraient toute sa vie.

Keiichi

— Mion, je viens aussi !

Mion

— Kei ?...

Keiichi

— Si la maîtresse va vraiment voir Rena, mieux vaut que je sois là !

Je t'en prie !

Mion

— …

Ouais, c'est pas faux.

Ok, monte vite !

Keiichi

— Compris !

Kei s’empressa de prendre place sur le siège passager.

Pendant ce temps, la voiture de la maîtresse se faisait de plus en plus petite…

Si jamais on en venait à perdre sa trace…

Mion

— P'tit gars, je compte sur toi !

Keiichi

— T'inquiètes, je gère !

La voiture noire démarra, les pneus crissant sur les gravillons. Elle fit un virage brusque et repartit en trombe pour rattraper la maîtresse.

Je restai là, à les regarder disparaître au loin. Je ne pouvais faire qu'une chose : prier pour une issue paisible à toute cette histoire.

Finalement, ce ne fut pas long avant de rattraper la voiture de la maîtresse.

Heureusement, elle était le genre de personne à respecter les limitations de vitesse.

Après être passé devant les marches du sanctuaire Furude, nous avons quitté la route pavée à mi-chemin pour atterrir dans un sentier de montagne.

Cette direction… ce n'est pas du tout vers le site de construction du barrage, là où on retrouve les montagnes de trésors de Rena.

On se dirigeait vers une zone inconnue pour moi. Après tout je ne connaissais pas encore bien la région.

Keiichi

— Ce chemin, où est-ce qu’il mène ?

Gangster des Sonozaki

— Surement dans les montagnes.

Si on continue dans cette direction, on va arriver sur une route qui mène de l'autre côté de la vallée.

Comme pour acquiescer les propos du conducteur, la végétation diminua nous permettant d’apercevoir des montagnes et une vallée au loin.

Droit devant, on distinguait un courant d'eau traversé par un pont suspendu.

D’après le conducteur, il y avait certainement un poste de secours dans le voisinage, installé à des fins d'urgence.

Est-ce que Rena aurait menacé de se jeter du pont ?... En tout cas, cela expliquerait la panique de la maîtresse.

Admettons… Mais pourquoi ?!

.........

.........

C'est vrai ça…

Pourquoi diable faire venir la maîtresse jusqu'au pont suspendu ?...

Cette soudaine question a declenché une anxiété généralisée dans toute ma poitrine.

… D'ailleurs, pourquoi Rena la fait venir elle en particulier ?

Je veux dire, elles s'entendent bien c'est vrai… Rena est une bonne élève, donc rien de très étonnant.

Mais ça s'arrête là. Rien ne justifie que Rena lui accorde sa confiance sur cette histoire.

Et puis… pourquoi ce pont ?

Si elle avait vraiment eu l'intention de se tuer en sautant d'un endroit surélevé, le sanctuaire Furude faisait parfaitement l'affaire…

Pas besoin de la faire venir aussi loin…

.........

Keiichi

— Argh, merde !!!

Je venais de réaliser ce que Rena avait derrière la tête…

Keiichi

— Il faut l'arrêter !

Gangster des Sonozaki

— He-Hein ?!

Keiichi

— VITE !!!

.........

Après un concert de klaxons, la voiture de la maîtresse finit par se stopper net. Elle descendit, l'air stupéfaite.

Alors que, m’ayant reconnu, elle s'apprêtait à me crier dessus, je la pris de vitesse : “On a un gros problème !”.

Cie

— Qu-quoi ?

Keiichi

— Maîtresse, on s'est fait avoir !

Rena n'est pas là !

Cie

— Hein ?...

Au vu de son expression confuse, elle ne comprenait visiblement pas de quoi je parlais.

Mais je n'avais pas le temps de lui expliquer. Je me ruai vers la cabine téléphonique près de nous, j'y introduisis une pièce de 10 yens puis je composai le numéro de la salle des professeurs dont j'avais le vague souvenir.

.........

......

Faites que quelqu'un réponde !...

Mion, Satoko, Rika… N'importe qui en fait !

Il fallait absolument que je prévienne tout le monde à l'école !

Magnez vous bordel !!

Décrochez ce putain de téléphone !

............

......

Et soudain, après la dixième sonnerie, alors que j'étais sur le point d'abandonner…

Quelqu'un décrocha.

Keiichi

— … Allo ?

???

— …

Keiichi

— Excusez-moi, Maebara à l'appareil !

Passez-moi Mion Sonozaki s'il vous plaît, c'est très urgent !

???

— …

Keiichi

— Allo ?

Vous m'entendez, allo ?!

Je ne savais pas si c'était à cause de l'âge du téléphone, ou bien de la qualité de la ligne, mais je n'entendais strictement rien dans le combiné.

Et puis…

???

— …

Qu'est-ce qu'il se passe, Keiichi ?

Je me demande pourquoi tu as besoin de voir Mii… Pourquoi ?

Keiichi

— !!

… J'avais vu juste.

À vrai dire, c'était même encore pire que prévu.

Keiichi

— … Rena.

Tu es à l'école en ce moment, n'est-ce pas ?

Rena

— Et oui.

J'y suis.

Avec Mii et les autres.

Ahahahahaha !

Keiichi

— …

Rena

— D'ailleurs, pour être honnête ton absence ne m'arrange pas du tout, Keiichi.

C'est pas facile, toute seule.

C'est qu'ils font du bruit à crier et pleurer sans arrêt, ça me donne mal à la tête. Du coup, j'ai fini par les frapper plusieurs fois.

Ahahahahahaha !

Keiichi

— Qu-Qu'est-ce que tu es en train de faire ?!?!

B-Bon Rena !!

Ecoute, la maîtresse est avec moi.

Alors calme toi et écoute ce que je vais te di-

Rena

— Ah, tu es parti là-bas toi aussi, hein ?

Et bien dans ce cas, j'écouterai ce que tu as à me dire à l'école, d'accord ?

Dépêche-toi, je t'attends.

Keiichi

— A-Attends, Rena !

Arrête, raccroche pas !

Autant parler à un sourd…

Comme si de rien n'était, Rena mit fin à la conversation.

Commissariat d'Okinomiya

— Ici le Commissariat Central d'Okinomiya, à toutes les voitures,

je répète, le Commissariat Central à toutes les voitures !

Prise d'otage dans le bâtiment des Eaux et Forêts de Hinamizawa.

Ils sont nombreux.

Commissariat d'Okinomiya

Ordre à toutes les voitures disponibles de s'y rendre immédiatement.

Ôishi

— Nounours !

Désolé d'être en retard !

Quelle est la situation ?!

Kumadani

— Merci d'être venu, Chef !

Aujourd'hui à 13h, quelqu'un a pris les enfants de la classe d'école installée dans le bâtiment des Eaux et Forêts de Hinamizawa en otage.

Kumadani

Le preneur d'otage a tout d'abord exigé que personne n'entre dans l'enceinte du bâtiment, puis une ligne directe sur l'extérieur.

Ôishi

— ... OK, donc en fait, depuis le départ, il a l'intention de trouver un arrangement avec la Police ?

Mais qu'est-ce qu'il peut bien vouloir de nous ?

Kumadani

— ... Il a aussi spécifiquement demandé à vous parler à vous, Chef. Nommément.

C'est Rena Ryûgû qui a pris l'école en otage.

Ôishi

— Quoi ?!

Ôishi

... OK, je vois.

D'accord, de toute façon, au point où j'en suis, je peux lui accorder cette faveur.

Il faut boire le vin jusqu'à la lie !

L'inspecteur Ôishi eut un rire amer en disant cela.

Kumadani

— Pour l'instant, nous ne savons pas si elle a un complice.

Les rideaux sont fermés, donc aucune reconnaissance visuelle n'est possible.

Ôishi

— Et la personne qui nous a prévenus, elle n'a pas une petite idée ?

Kumadani

— Non, en fait, c'est Rena Ryûgû qui nous a appelés.

C'est pourquoi nous n'avons aucune information extérieure.

Kumadani

Tout ce que l'on sait, c'est qu'elle a appelé la maîtresse d'école pour l'éloigner. Elle a profité de son absence pour passer à l'action.

Ôishi

— ... Je vois, donc c'était prémédité.

Aucun otage parmi les gens des Eaux et Forêts ?

Kumadani

— Non, il n'y avait personne aujourd'hui.

Les seuls otages sont les 24 élèves de l'école.

En tous cas, ceux qui ont répondu à l'appel aujourd'hui.

Ôishi

— D'accord, donc eux et le preneur d'otage, c'est tout ?

Vous avez vu quelqu'un d'autre de louche ?

Kumadani

— Non, il y a eu plusieurs fois du mouvement près des rideaux, mais à chaque fois, c'était Rena Ryûgû qui regardait dehors.

... En se basant sur le terrain qu'elle doit surveiller, il est fort probable qu'elle se fasse aider par une, voire deux autres personnes.

Cie

— Rena est une fille si gentille et si sérieuse !

Je n'arrive pas à y croire... C'est un mauvais rêve, je vais me réveiller... Ce n'est pas possible...

Oooh !

Ôishi

— Oh, est-ce-que vous allez bien, vous êtes sûre ?

L'inspecteur se mit à courir pour rattraper la pauvre femme qui, éplorée, semblait sur le point de s'évanouir.

La maîtresse ne semblait plus en état de suivre la conversation.

Principal

— Monsieur l'inspecteur Ôishi, je compte sur vous...

Si jamais cela était possible, j'aimerais prendre la place des otages.

Laissez-moi y aller !

Cie

— Non, Monsieur le Directeur, c'est à moi de le faire,

c'est de ma faute, tout est de ma fauuuuute...

Ôishi

— Allons, allons, vous n'y êtes pour rien, vraiment.

Par contre, vous pouvez m'aider, en me parlant de l'école et de la disposition des lieux par exemple. Je vais avoir besoin de vous !

Ôishi

Eh, Bonchi !

Demande-leur tout ce qu'il nous faut pour la carte.

Kumadani

— Excusez-moi, Chef !

Monsieur Takasugi veut vous parler, il est à la CB, dans la voiture 1 !

Ôishi

— Oui, allô, ici Ôishi.

Takasugi

— Ah, Ôishi, merci d'être sur place !

Kumadani m'a donné un rapide résumé de la situation.

Le preneur d'otage est mineur, donc ?

Fais attention à bien museler les journalistes !

Ôishi

— Oui, je sais.

Par contre, une question : elle a demandé à ce que ce soit moi qui fasse les négociations avec elle. Je peux ?

Takasugi

— D'après ce qu'il se passe, je pense qu'elle doit te considérer comme étant le seul policier de son côté.

Je compte sur toi !

Kumadani

— Chef !

Elle vous demande au téléphone, dans la voiture ! C'est le preneur d'otage, Rena Ryûgû !

Ôishi

— Bon, ben Chef, je vous laisse, elle me demande au téléphone,

alors j'y vais.

Ôishi

... Merci.

Oui allô ? Ici l'inspecteur Ôishi.

Keiichi

— Ugh...!!

Je serrai les dents, et les poings, de frustration.

Un mur écrasant d'officiers de police me bloquait le chemin. Je me retrouvais spectateur de la situation, voyant les professeurs et les policiers au loin. Je ne pus m’empêcher de me sentir pathétique…

Je sus d'un seul coup pourquoi elle avait appelé la maîtresse au téléphone.

C'était parce que la maîtresse aurait été la plus à-même de lui mettre des bâtons dans les roues.

C'était une femme avec un grand sens de la justice.

Même si Rena s'était pointée avec une arme à feu, la maîtresse n'aurait pas eu peur.

Elle aurait protégé les élèves, même de son corps. Elle avait donc été le plus grand obstacle dans le plan de Rena.

Je suis sûr qu'elle a pensé à l'attaquer par derrière,

mais elle a dû se dire que le risque était grand quand même, et que sa simple présence serait trop dangereuse.

... Et donc, la conclusion fut logique : il lui suffisait de l'appeler ailleurs.

Elle lui a probablement dit qu'elle avait besoin de lui parler à elle et à elle seule, dans un endroit secret.

La plupart des gens croyaient que Rena avait simplement fait une fugue, de toute manière.

Donc la maîtresse ne se douterait pas que ça pourrait être une ruse.

Il était donc facile de la duper.

Mais alors, la question est : d'où est-ce qu'elle a passé son coup de fil ?

Depuis l'intérieur de l'école ?

Hmmm, oui et non, en fait.

Elle a appelé depuis le premier étage du bâtiment... Depuis le bureau des Eaux et Forêts.

Ce n'était pas un poste occupé en continu, ici.

Certains jours, il n'y avait personne.

Rena le savait. Elle est restée cachée ici, à l'étage.

Et elle a appelé depuis en haut jusqu'au téléphone en bas. Et elle a envoyé Madame Cie à perpet' la galette.

Et je pense que c'est pas un hasard si cela arrive exactement le jour où le Directeur n'est pas là.

Rena est probablement là depuis hier soir.

Elle aura eu tout le loisir de lire les emplois du temps, de rechercher les différents téléphones, et de préparer sa prise d'otage.

... Putain, y a pas à dire, elle est douée, merde...

... Mais bon, quelque part, je comprends comment elle fonctionne.

Elle est devenue complètement folle, mais à l'intérieur de sa tête, elle est devenue extrêmement froide et calculatrice.

Elle reste analytique et précise, même envers l'histoire délirante qui lui retourne le cerveau.

C'est pourquoi son intellect carbure à toute vitesse. Bien plus vite que d'habitude.

Il m'est arrivé la même chose dans le passé. C'est pour ça que je le sais.

Par contre, là où nous n'avons vraiment pas eu de bol, c'est quand Mion a envoyé ses gardes du corps à la poursuite de la maîtresse.

Du coup, il n'y avait plus personne ici.

... Putain de sa race, on est bien dans la merde, là...

Ôishi

— ... Eh bien, la brigade anti-terrorisme est en ce moment en train de préparer ses hommes.

Ôishi

Vous savez, c'est pas une opération de petite envergure, alors, ça leur prend un peu de temps.

Rena

— On n'a PAS le temps !

Je croyais pourtant que vous aviez compris l'urgence de la situation ? Apparemment ce n'est pas le cas !

Vous savez dans quel merdier se trouve Shishibone, en ce moment ? On n'a pas le temps d'attendre !

... Inspecteur, vous êtes sûr que vous jouez le jeu ? Vous croyez en mon histoire, n'est-ce pas ?

Vous êtes bien de mon côté, non ?!

Rena

Non ?

RÉPONDEZ-MOI !

Ôishi

— Mais oui, bien sûr !

Mais vous savez, ce n'est pas aussi simple que ça !

Je vous assure que je fais tout ce qui est en mon possible pour faire accélérer les choses !

Mais bon...

C'est vraiment une opération de grande envergure, nous ne pouvons...

Les négociations ne passaient pas bien.

On sentait que la patience de Rena se faisait de plus en plus ténue…

Rena

— Bon, passez-moi Keiichi.

Ôishi

— Pardon ?

Vous pouvez répéter ?

Rena

— Keiichi est avec vous, non ?

Je voudrais lui parler, alors appelez-le, et tout de suite.

Ôishi

— … J-Je vois.

Ôishi demanda à l'un de ses subordonnés de convoquer le garçon qui se tenait au devant de la foule rassemblée devant le bâtiment.

Ôishi

— Je suppose que vous êtes Keiichi Maebara ?

Keiichi

— Euh oui…

Ôishi

— Rena Ryûgû voudrait vous parler.

Pouvez-vous prendre l'appel, s'il vous plaît ?

Keiichi

— … Compris.

L'inspecteur Ôishi tendit le combiné à Keiichi, puis remarqua qu'il y avait de l'agitation dehors et quitta la voiture.

Keiichi

— Allo ?

Rena

— Ah, c'est toi Keiichi ?

C'est cool que tu sois revenu.

Keiichi

— Rena…

Rena

— La police ne croit pas ce que je leur dit.

Dis, tu peux leur dire que tout ce que je raconte est vrai, et que je suis très sérieuse concernant ce que je m’apprête à faire… Dis ?

Keiichi

— …

Qu'est-ce que tu veux dire par… « ce que je m’apprête à faire. » ?

Rena

— Je viens de finir de verser de l'essence partout dans la classe.

Donc, si je me sers du briquet que j'ai en main, tous les otages mourront.

… Tu peux prévenir Ôishi s'il te plaît ?

Keiichi

— Quoi ?!

Kumadani

— Eh, mais qui êtes vous, vous ?

Ôdaka

— Retirez-vous immédiatement.

Qui est le responsable ici ?

Des plusieurs voitures arrivées en grande pompe, plusieurs hommes qui n'étaient pas d'Okinomiya descendirent.

Un homme dans un costume impeccable malgré la chaleur écrasante se rendit prestement vers l'école. Poussant facilement l'inspecteur Kumadani sur le côté, il se dirigea d'un pas ferme vers l'inspecteur Ôishi.

Ôishi

— ... Tiens donc, Ôdaka ?

T'es passé au Commissariat Central, hein ? Ça fait un bail, grand !

Ôdaka

— Tu vas me parler sur un autre ton, Ôishi.

Nous ne sommes plus du même grade, alors pour toi, ce sera Monsieur Ôdaka.

Ôishi

— Ouais, ouais, je suis content de te voir aussi, Ôdaka.

Écoute, j'ai pas trop le temps de discuter, là, j'ai du travail sérieux qui m'attend et c'est assez urgent.

Ou bien quoi, le Commissariat Central vient prendre les choses en mains ?

Et qui t'as donné l'autorisation de venir ici, déjà ?

Chef de la Police

— C'est moi qui l'y ai autorisé, Ôishi !

Ôishi

— Ah tiens, Grand Chef ?

Chef de la Police

— Takasugi m'a expliqué la situation.

Je sais aussi que c'est toi qui as amené à cette situation.

Alors maintenant, laisse faire la brigade anti-terrorisme !

Ôishi

— La QUOI ? Ôdaka, me dis pas que tu veux y aller en force ?!

Ôdaka

— Je sais très bien que c'est dangereux,

mais nous n'avons plus que quelques minutes avant l'explosion.

Tu as perdu trop de temps à parlementer,

alors maintenant, c'est moi qui dois venir torcher ta merde.

Retire tes hommes et laisse-nous faire.

Placé au pied du mur, en présence de ses chefs, Ôishi n'avait théoriquement qu'une seule solution : obéir.

Kumadani

— Chef, c'est qui, lui ?

Ôishi

— Ôdaka ?

Oh, un jeune connard qui se prenait pour un caïd au mah jong, alors je lui ai rabattu son caquet.

Ôishi

Mais il m'en veut peut-être plus à cause de la compétition officielle de Kendô. Je lui avais mis un coup tellement fort au masque qu'il s'était évanoui devant les juges.

Il apparaissait évident que les deux se connaissaient depuis longtemps, et qu'ils n'étaient vraiment pas en bons termes.

Ôdaka

— Ôishi, explique-moi la situation.

Ôishi

— T'as vraiment l'intention d'envoyer une escouade ?

Ôdaka

— Les experts de nos forces spéciales s'occuperont de ça.

Reste en retrait, au cas où.

Ôishi

— ... Chef.

Chef de la Police

— Ôishi.

Les forces spéciales du Commissariat Central ne sont pas n'importe qui.

Si je te parle de la deuxième unité anti-terroriste, ça doit bien te parler, à toi ?

Kumadani

— ... C'est qui, ces gens, Chef ?

Elle est célèbre, cette unité ?

Ôishi

— C'était il y a quoi, cinq ans maintenant.

Tu te souviens de la prise d'otage à Dacca, organisée par l'Armée Rouge Japonaise ?

Depuis cet incident, on raconte qu'il y aurait une unité secrète qui serait entraînée pour parer aux prises d'otages dans les avions.

Ôishi

Mais je pensais pas qu'elle existait vraiment...

Kumadani

— Mais pourquoi une unité pareille se trouvait par chez nous ?

Le commissaire divisionnaire eut un large sourire arrogant.

Ôdaka

— Ils étaient justement en train d'entraîner nos hommes quand nous avons entendu pour ton affaire,

alors ils ont gentiment proposé leur aide.

Ôishi

— Éhhéhhéhhé... Aaah, t'as pas changé, hein ?

Ôishi

Toujours à rechercher le sensationnel.

Des hommes lourdement armés, résolument très différents des policiers japonais habituels, sortirent des voitures et des camions et se placèrent en position.

Ils n'avaient franchement rien de comparable avec les forces habituelles de police.

Ôishi

— Ôdaka,

mais tu vas quand même pas sérieusement envoyer des gens armés avec des Hôwa dans une école primaire, mais t'es pas bien dans ta tête ?

Ôdaka

— Pour ça, pas de souci.

Ce ne sont pas des armes à feu,

elles tirent des gaz paralysants.

Il y a aussi du gaz narcotique mélangé dedans.

Tout ira bien.

Ôishi

— ... Ah ouais, tu vas y aller avec des pistolets à eau ?

Mais c'est très pratique, dis-moi. Et ils peuvent tirer d'ici jusque dans la salle de classe, à travers les murs ?

Ôdaka

— Ce n'est pas à toi de te préoccuper de ce problème.

Nous nous chargeons du reste.

Suivant les ordres d'Ôdaka, les forces spéciales prirent position dans un angle mort de la fenêtre de la salle de classe, prêtes à s'infiltrer.

L'expression du visage d'Ôishi ne laissait aucun doute sur le fait que l'arrogance et les méthodes d'Ôdaka le répugnaient. Quand bien même, il ne pouvait pas discuter les ordres. Se souvenant qu'il avait laissé Keiichi et Rena au téléphone, il tourna les talons en direction de la voiture.

Quand soudain…

Keiichi

— Inspecteur, on a une urgence !!

Keiichi venait de sortir en trombe de la voiture.

Ôishi

— Un problème, Maebara ?

Keiichi

— Rena vient de me dire qu'elle a aspergé la classe avec de l'essence !!!

Ôishi

— QUOII ?!

De l'essence ?! Où est-ce qu'elle a trouvé ça ?! Mais dans l'immédiat, on a plus urgent !

Ôdaka

— En joue…

Ôishi

— Attendez !!

STOP, NE TIREZ PAS !!

Ôdaka

— FEU !

圭一

— Uwaaaahhhh !!

............

......

Nos corps, balayés par le souffle de l’explosion, s'écrasèrent une dizaine de mètres plus loin. Il nous fallut un peu de temps avant de réaliser ce qu'il venait de se passer.

Keiichi

— …

…gh…?

Un son aigu provoqué par un acouphène résonnait contre toutes les parois de mon crâne. Je sentais ma conscience disparaître lentement, laissant les vertiges prendre le dessus.

L'air brûlant ainsi que la poussière soulevée, qui restait en suspension, irritaient mes voies respiratoires.

Keiichi

— ..gh

Crachant les débris qui avaient atterri dans ma bouche, je me hissai difficilement sur mes deux jambes.

Keiichi

— ............

.........

...Ah.........?

De nombreux policiers étaient éparpillés sur le sol, gémissants.

… Un râle d'agonie parvint à mes oreilles. En me retournant, je m’aperçus que c'était le policier à qui j'avais parlé tout à l'heure.

Keiichi

— Ugh... ...!!

Son corps était couvert de poussière et de débris. De plus, il saignait de la tête.

Alors que je commençais à m'asseoir près de lui, l'image de Rena et de Mion me vint en tête.

C'est à ce moment que je me suis retourné vers l'école.

Je…

ne pouvais pas croire…

ce que j'étais en train de voir.

Keiichi

— …

Devant moi, un immense conglomérat de bois, de briques et d'autres matériaux déformés… Cela ressemblait grossièrement à un énorme feu de camp.

Les flammes qui s'en élevaient semblaient atteindre le ciel.

Malgré la distance, je pouvais percevoir la chaleur et l'odeur caractéristique de brûlé.

Keiichi

— …

Non.

Non, c'est forcément un rêve.

Ça ne peut pas être notre école.

Non, ce n'était même pas une école d'ailleurs…

Keiichi

— …

Je chancelai.

Malgré mes jambes devenues inutiles, je marchai en direction de ce qui n'était plus qu'un tas de décombres difformes.

Et puis devant moi, au milieu des restes de bois émietté, je reconnu un visage que je connaissais bien. Après avoir lâché un soupir de soulagement, je me précipitai vers ce dernier.

Keiichi

— Mion !..

Les yeux de Mion étaient grands ouverts dans ma direction, elle levait son bras droit.

Sa bouche était légèrement ouverte... elle ne pouvait probablement pas parler.

Keiichi

— Dieu merci… Mion !..

Il faut que la ramène par ici !

C'est dans cette optique que je lui attrapai fermement le bras droit.

Keiichi

— …

C'était léger, il n'y avait aucune résistance.

C'est à ce moment que depuis les décombres,

il en sorti.

Keiichi

— … Ah…

Et alors, une petite masse roula jusqu’à moi

et s'arrêta à mes pieds.

La

tête

de

Mion

s'était

détachée

de son

corps

.

.

.

Keiichi

— U-Uwaaaaaaaaaaaahhhhhhhhh !!

Aaaaahhhhhhhhh !!!!