Teppei pensait que sa nièce aurait de l'argent.
Sauf qu'en fait, ben non, elle avait pas un rond.
Lorsqu'il lui demanda comment elle avait vécu jusqu'à maintenant,
elle lui apprit qu'elle avait vécu avec une amie et que c'était elle qui avait payé pour tout.
Teppei avait quelques économies, glanées au fil de ses arnaques.
Il avait de quoi voir venir sans trop s'inquiéter, mais cet argent était censé lui servir à armer ses troupes et à décompresser.
C'était une honte sans nom que de devoir utiliser son argent pour des motifs honnêtes.
Et puis d'abord, la gamine devait forcément avoir des sous.
Il en était persuadé.
Sa femme lui avait dit qu'elle avait subtilisé aux enfants un livret de compte et le sceau familial qui allait avec. Il y avait une sacrée somme d'argent sur le compte.
Sauf que sa femme était morte l'année dernière, et que son neveu, Satoshi, avait disparu.
La seule qui pouvait encore avoir ce livret, c'était Satoko.
Sauf qu'il avait beau la menacer, Satoko soutenait mordicus qu'elle ne savait pas de quoi il parlait.
Il savait qu'elle lui cachait quelque chose, alors il se mit en tête de lui faire cracher le morceau.
Mais s'il y avait la moindre trace sur la gamine, sa salope de maîtresse irait en parler aux flics.
Donc, il ne pouvait pas frapper directement Satoko.
Il ne pouvait que taper dans les meubles, lui faire peur, ou l'insulter.
Heureusement pour lui, ces trois activités-là étaient parmi ses domaines de prédilection.
Sauf que malgré tous ses efforts, la gamine ne sut que lui répéter qu'elle ne savait rien, jusqu'à le lui crier comme une folle.
Lorsqu'elle ne fut plus qu'une masse tremblante de peur et sanglotante au milieu du salon, Teppei décida qu'elle disait probablement la vérité.
Mais alors du coup, où pouvait être ce livret ?
Teppei avait deux possibilités.
La première, c'est que sa femme l'avait caché ici, et qu'il traînait encore quelque part dans la maison.
La seconde, c'est que Satoshi l'avait récupéré. Ce qui revenait au même, le livret était forcément caché dans la maison.
Et donc, il n'avait qu'à chercher ici, il finirait bien par trouver.
Il ordonna à Satoko de ranger le salon, puis monta à l'étage et se mit à fouiller les larges pièces, un peu au hasard.
Pour être franc, il ne savait plus trop quoi faire avec la gamine.
La rumeur disait que ses parents avaient empoché un gros pactole.
Et il savait que sa femme leur avait tout pris.
Sauf qu'elle était avare comme tout. Elle avait sûrement pris le livret et l'avait caché comme un chien cache ses os. Elle n'avait pas touché aux économies qu'il y avait dessus.
Il commençait à se dire que ce serait sympa de s'acheter une baraque ailleurs, dans une autre préfecture, pourquoi pas.
Ou alors, limite, à Gogura. Il avait pas mal de contacts là-bas.
Il y avait aussi là-bas d'anciens collègues à lui.
Ces gens-là lui devaient quelques faveurs.
Il aurait sûrement une planque et une femme à l'œil.
Satoko était bien pour le ménage et la popote, mais elle faisait porter les regards de l'école et des gens de la protection de l'enfance sur lui, c'était chiant.
Il savait qu'il était un concentré de violence, et il savait qu'il risquait de s'énerver et de tabasser la gamine, surveillé ou pas.
Et plus il pensait à sa nièce qui ne se défendait jamais, plus il lui prenait l'envie de lui mettre une dérouillée dont elle se souviendrait longtemps...
Il s'amusait d'habitude en frappant des durs à cuire, pour voir quand est-ce qu'ils craqueraient.
Pour lui, frapper une gamine qui ne se défendait pas, c'était une activité nouvelle. Ce serait peut-être amusant ?
Sa décision fut soudain prise ;
avant de partir d'ici, il lui ferait payer très cher l'insolence de la maîtresse d'école...