La voiture s'arrêta.
Il ne put en déduire plus que cela.
Il était dans le coffre de la voiture, et il avait les yeux bandés.
Il n'avait jamais imaginé qu'un humain privé de sa vision pouvait être si faible et si vulnérable.
Jusqu'à ce que cela lui arrive.
Il avait tout de suite compris qu'il était inutile d'essayer de délier ses entraves.
Puis l'espace restreint du coffre lui avait donné des vertiges, et il avait eu du mal à rester conscient.
C'est pourquoi, lorsque la voiture s'arrêta et qu'il ne sentit plus les vibrations qui le gênaient,
il se sentit très rassuré, comme délivré, presque -- alors que pourtant, sa situation ne s'était pas améliorée d'un iota.
Bien sûr, il s'en rendit très vite compte.
Et il ne put s'empêcher de se raidir en entendant la voix de l'homme qui l'avait enlevé et celle d'un autre, qu'il ne connaissait pas...
— ... Salut.
Le poussin est dans le coffre.
Il s'est pas mal débattu au début, et il a l'air un peu faible, mais comme vous me l'aviez ordonné, je ne l'ai pas touché, il n'est pas blessé.
— Oué, super, super.
Le coffre s'ouvrit, et de l'air frais s'y engouffra.
Jusque là, il avait toujours voulu sortir de coffre, mais maintenant qu'il était ouvert, il avait peur du dehors.
Tellement d'ailleurs qu'il se mit à souhaiter être à nouveau enfermé dedans, bien proprement.
Soudain, quelqu'un lui caressa la tête.
Évidemment, comme il avait un bandeau sur les yeux, il ne savait pas si cette main voulait le caresser pour le rassurer, ou pour palper son crâne avant de le scalper.
Et comme il ne le savait pas, il s'imagina le pire des deux cas de figure, et il se raidit de peur.
— ... Rah, pauv' petiot.
Y tremble.
Allez, reste calme...
L'homme âgé lui caressa gentiment la tête, lui parlant doucement.
— Oh, j'pensions bien qu'c'est pas facile...
Mais ton papé, il est gentil.
Il va venir pour te sortir d'là, tu verras.
Pour lui qui n'avait jamais entendu que du japonais standard, le dialecte de cet homme âgé fit une très grande impression.
Sauf qu'il n'y comprenait rien.
Il lui fallut un bon moment pour comprendre que le papé, c'était probablement son grand-père...
Puis la main cessa de lui caresser la tête et toucha son bandeau.
— Ah, le bandeau, c'est pas une bonne idée.
S'il connaît nos visages, on est mal barrés.
— Hmmm, oué, oué, t'as raison.
M'au moins, on peut l'enlever l'muzel, non ?
Y peut pas respirer sinon !
— C'est vrai, mais s'il se met à crier, on fait quoi ?
Naaan, laissez-nous nous occuper de lui, on sait comment ça marche...
— Rah, mais vous savez pas y faire !
Vous devriez savoir que le clan principal tolèrera pas les coups.
Vous feriez bien de vous en souvenir.
— Oui, on sait.
On lui fera pas de mal.
Enfin, tant qu'il se tiendra tranquille.
Une main lui donna de petites tapes sur la tête.
Ce n'était pas la même main que celle qui l'avait caressé. C'était une main rugueuse et musclée.
Tant qu'il se tiendrait à carreaux, tout irait bien.
Mais s'il faisait du grabuge, il ne savait pas ce qu'il lui arriverait.
C'était simple comme moyen de pression, mais c'était efficace...