Bonjour à tous, ici Ryûkishi07.
Merci d'avoir lu Les réjouissances, ou plutôt, non...
Merci d'avoir lu jusqu'au bout la saga du sanglot des cigales.
Ce huitième tome, donc, est un peu, en quelque sorte,
la solution du problème posé dans la deuxième moitié du tome 7, La solution finale :
comment vaincre Miyo Takano ?
Comment faire en sorte de déjouer son complot ?
Comment faire pour atteindre une issue idéale dans ce conflit ?
Avec ce tome, j'apporte une solution personnelle, que vous pouvez comparer avec la vôtre, si vous le voulez, un peu comme un duel.
Et si vous pensez que votre solution est meilleure que la mienne -- si le monde que vous avez imaginé est plus passionnant que celui du tome 8 -- alors je m'avoue volontiers vaincu. Libre à vous de considérer que vous m'avez battu en combat singulier.
Quant à la solution que j'ai tenté d'apporter, elle comporte principalement deux points.
Le premier concerne la façon de combattre Takano.
Commençons par l'indice donné dans La solution finale.
Elle avait fomenté tout un complot, qui commençait par l'application du manuel des consignes d'urgence n° 34.
Mais il y avait aussi un autre indice, dans La purification du coton et La détective.
Dans ces mondes-là, Rika meurt avant la fin de l'histoire, mais rien de particulier ne se passe 48h après sa mort. Le village n'en souffre pas.
En combinant ces deux indices, on comprend donc que la théorie de Hifumi Takano -- celle qui sert de base à l'existence-même du manuel des consignes d'urgence -- est complètement dans l'erreur.
Il suffisait donc de réussir à prouver que 48h s'étaient déjà écoulées depuis la mort de Rika Furude
pour que l'opération finale perde toute crédibilité et soit annulée par les supérieurs de Takano.
Au cours de ce huitième tome, j'ai tenté de décrire toutes les manigances et les coups fourrés entre les deux camps, pour que l'histoire reste un tant soit peu intéressante.
J'aurais tout aussi bien pu décrire l'inspecteur Ôishi faire sa fausse déclaration et m'arrêter là -- après tout, dès le moment où Tôkyô avait appris la nouvelle, Takano avait perdu.
Je pense que beaucoup parmi les lecteurs ont trouvé cette partie de la résolution.
Le deuxième point de ma version de la résolution concerne la meilleure fin possible pour ce monde.
Pour y répondre, il me faudrait tout d'abord vous expliquer mon point de vue sur tous les autres mondes de cet univers.
J'ai placé de nombreux indices un peu partout à travers les tomes, mais je pense que Malédiction meurtrière et La solution finale sont les plus parlants.
À chaque fois que l'oncle de Satoko revient, celle-ci en souffre terriblement.
Comment faire pour l'en délivrer ?
Si cette série était un simple divertissement un peu gore, la bonne solution serait celle du tome 3.
Keiichi se débrouillerait pour tuer Teppei sans se faire voir, enterrer son corps, et tout est bien qui finit bien.
Mais je ne ne suis pas d'accord avec ça, et c'est pour ça que j'ai donné à ce tome l'une des fins les plus atroces.
La solution qui, pour moi, correspond le mieux à l'univers du
sanglot des cigales, est celle du tome 7 ; tous les protagonistes s'associent pour trouver une résolution pacifique au conflit.
Je l'écris plus en détails dans les tomes des énigmes,
mais la paranoïa d'un personnage, qui le pousse à s'isoler et à tenter de résoudre seul ses problèmes, est un facteur qui aide la tragédie à se déclencher.
Je pense qu'en particulier, La détective illustre bien ce processus.
À l'inverse, dans Le purgatoire et La solution finale, on se rend compte que dès que les personnages parlent de leurs problèmes entre eux, ils peuvent trouver très facilement la solution à presque tous leurs problèmes.
J'ai donc voulu que dans l'univers du sanglot des cigales, les personnages soient capables de vaincre l'adversité en restant soudés et en s'avouant tous leurs problèmes.
Alors bien sûr, malheureusement, le monde réel ne fonctionne pas aussi bien que cela.
Il existe même bien des situations dans lesquelles il vaut mieux s'atteler seul à un problème si l'on veut aboutir un jour à un quelconque résultat.
Mais pour ma part, j'aimerais beaucoup voir les gens s'asseoir plus souvent autour d'une table et se parler pour résoudre leurs différends.
Je suppose qu'à cause de cet élément, on peut considérer la saga comme étant une œuvre de fantasy.
Quoique.
Après tout, il y a encore une loi dans ce monde qui fait un peu office de pouvoir magique.
Lorsqu'un personnage demande de l'aide à tout le monde, et que tout le monde l'aide, alors, il peut franchir n'importe quel obstacle.
Cela déclenche un miracle.
Si l'on considère cela comme une règle absolue dans cet univers, cela revient à dire que c'est un pouvoir magique.
Une sorte de “système de déclenchement de miracle automatique”.
Je ne vais pas m'étendre dessus, Hanyû et d'autres en parlent suffisamment dans les tomes.
C'est ça, je pense, l'aspect le plus particulier de la conception du monde dans le sanglot des cigales.
Si l'on suit cet aspect et que l'on cherche à aboutir à la meilleure fin possible, alors la première chose qui vient à l'esprit est de créer une alliance entre tous les personnages de cet univers et de les liguer contre Miyo Takano.
Et d'ailleurs, il y a beaucoup de scènes dans Les réjouissances qui soutiennent cette théorie et apportent de l'eau à son moulin.
Mais en même temps, l'histoire décrit Miyo Takano comme un être extrêmement seul,
et en écrivant certaines scènes qui prennent le plaisir du lecteur à la voir perdre à contre-pied, une nouvelle énigme est posée par ce dernier tome.
Tout le monde -- sauf Takano -- s'est retrouvé sous une même bannière, ont fait d'elle un bouc émissaire et l'ont tabassée, et donc, pour tout le monde sauf pour Takano, tout est bien qui finit bien.
Et j'ai l'impression que le fait de montrer cette alliance si vertueuse pour faire un peu oublier le fait que l'on donne le méchant en sacrifice est une tendance très ancrée dans les œuvres narratives.
À cause d'une attaque extra-terrestre, les pays de la planète arrêtent de se faire la guerre et se mettent ensemble pour repousser l'envahisseur.
Bravo au genre humain, félicitations, ah là là on est trop forts, la paix c'est formidable.
C'est un schéma que l'on retrouve un peu partout, en Orient comme en Occident.
Je n'aurais pas assez d'une vie entière pour recenser toutes les histoires dans lesquels un grand méchant très facilement identifiable -- extra-terrestre, monstre ou démon -- se fait massacrer pour pouvoir renforcer l'idée d'une fraternité inhérente au genre humain.
En plein milieu d'une guerre, un troisième ennemi arrive, alors les deux premiers surmontent leurs différences et repoussent le nouveau venu. Certes, c'est une histoire qui peut vous prendre aux tripes, voire par les sentiments…
Mais je pense que cette façon de procéder engendrera -- et nécessitera -- toujours “un troisième homme” (un sacrifice) pour pouvoir espérer créer de nouveaux liens entre deux peuples. Et ça, c'est un procédé injuste et contre-productif, voire carrément stérile. C'est un “démon”.
Enfin, je pense que tous les gens qui, un jour, ont écrit une histoire, l'ont déjà remarqué.
Et c'est pour cela que l'on a toujours besoin, dans certaines histoires, d'un méchant clairement identifiable qui serait uniquement cantonné dans son rôle de troisième ennemi.
Pour forcer la réconciliation entre deux peuples, on va chercher un nouvel ennemi commun.
Est-ce que je suis le seul à y voir un parallèle avec certains jeux douteux en politique internationale ?
Dans le monde réel, il n'y a que des êtres humains.
Vous ne trouverez ni extra-terrestre, ni démon venu des temps anciens, ni monstre.
Ce qui veut dire que si nous continuons à utiliser la méthode de l'ennemi commun pour rassembler les peuples, les êtres humains se feront toujours la guerre.
Et comme nous aurons toujours besoin d'un autre ennemi, la guerre amènera la paix, et la paix amènera toujours la guerre, en une chaîne sans fin.
J'ai voulu un peu expliquer cela en disant que ce processus était “le démon caché dans le monde des humains”.
Et maintenant que je vous ai parlé en long, en large et en travers de la conception du monde dans le sanglot des cigales, réfléchissons.
Êtes-vous sûr que la fin du dernier tome est bien conforme à cette philosophie ? Est-ce que c'est vraiment une fin heureuse pour tout le monde, si Takano est attaquée de toutes parts et éliminée ?
Exactement.
Je pense que cette fin n'est pas très différente de la fin atroce et abjecte de Malédiction meurtrière.
Et d'ailleurs, pendant que nous y sommes,
je pense que certains auront remarqué que du coup, la solution au problème de Satoko apportée dans La solution finale n'est pas vraiment la meilleure...
Mais comment faire pour faire de Takano une amie ?
Et ne venez pas me dire qu'il faudrait pousser Takano à la mutinerie et faire en sorte d'aller démasquer “Tôkyô” pour les faire tomber, hein ?
Enfin bon, je pense que si nous continuons comme ça à pousser la réflexion, nous n'allons pas tarder à rentrer dans des concepts philosophiques et religieux, et ce n'est jamais facile de mener une telle discussion à bien, aussi je préfère m'en arrêter là.
Finalement, quelle pourrait bien être la meilleure fin possible à cette saga, si l'on devait respecter scrupuleusement sa conception du monde ?
... Probablement une bien meilleure histoire que celle dépeinte dans Les réjouissances...
Je pense que cela ferait un bon examen final.
Vous qui m'avez fait l'honneur de suivre cette histoire depuis maintenant plus de quatre ans, peut-être verrez-vous dans cette interrogation finale un dernier petit cadeau de ma part.
Je vous suis infiniment reconnaissant de m'avoir suivi jusqu'au bout, malgré le côté brouillon et confus du message que je voulais faire passer.
Finalement, dans quelle catégorie ranger le sanglot des cigales ?
Je pense que, toutes choses considérées, le plus pertinent serait de la qualifier de “divertissement”.
Finalement, le plus important n'est pas de voir si vous aviez pu déduire “correctement” les résolutions des énigmes.
Si vous avez pris plaisir à tout lire, c'est le principal, non ?
Pour ma part, ma soif de défi n'est pas encore désaltérée.
Le rideau se referme maintenant sur le monde du sanglot des cigales, mais j'espère -- l'auteur Ryûkishi07 espère -- pouvoir vous rencontrer à nouveau dans un autre univers de fiction.
Je me demande bien quoi écrire, maintenant...
Je pense que le mieux et le plus agréable pour moi sera de laisser mon imagination vaquer dans les possibilités infinies des méandres de la création, en écoutant distraitement les cigales au dehors.
Je tiens à exprimer ma gratitude envers toutes les personnes qui ont donné de leur temps et de leur santé pour m'aider à réaliser cette œuvre.
Vraiment, merci du fond du cœur.
J'espère de toutes mes forces qu'un jour, nous nous rencontrerons à nouveau.
竜騎士07 - Ryûkishi 07